Étude

La dépression différente chez les hommes et les femmes

Le cerveau des hommes et des femmes se comporte très différemment durant une dépression, selon une nouvelle étude menée à Montréal et aux États-Unis. Cela alimente la théorie voulant que le traitement, et peut-être aussi le diagnostic, de ce trouble psychiatrique pourrait être distinct chez les deux sexes.

« Si on ne regardait que le point de vue moléculaire, ce serait deux maladies complètement différentes », explique l’un des coauteurs, Benoit Labonté, de l’Université Laval, qui a travaillé sur cette étude alors qu’il faisait son postdoctorat à l’École de médecine Icahn-Mount Sinai, à New York. « La dépression affecte l’activité des neurones dans différentes régions du cerveau. Les gènes exprimés en lien avec la dépression étaient très différents, ils étaient les mêmes dans seulement 5 à 10 % des cas. Même quand on voyait les mêmes gènes exprimés, souvent, ils l’étaient dans des directions opposées, par exemple surexprimés chez les hommes déprimés et sous-exprimés chez les femmes déprimées. »

Quelques études controversées ont avancé que certains antidépresseurs fonctionnaient mieux pour un sexe que pour l’autre, selon le neurobiologiste Labonté. Des chercheurs proposent aussi de tester des questionnaires diagnostiques différents pour les hommes, avec par exemple plus d’accent mis sur l’irritabilité et l’abus d’alcool et de drogues. « La dépression se ressemble beaucoup chez les deux sexes, mais chez les femmes, il y a une plus grande sévérité de symptômes, plus d’anxiété, plus de troubles de fonctionnement. »

Les chercheurs américains ont étudié une banque de cerveaux se trouvant à l’Institut Douglas de l’Université McGill, à Verdun. Ils ont comparé les hommes et les femmes sans problèmes avec les hommes et les femmes déprimés, puis ont confirmé ces différences d’expression des gènes chez des modèles mâles et femelles de souris. Il existe normalement des différences entre hommes et femmes sur le plan de l’expression des gènes du cerveau, mais en ce qui concerne la dépression, c’était radicalement différent, selon M. Labonté.

La prochaine étape est de tester des molécules liées à ces différentes activations des gènes du cerveau chez la femme et chez l’homme, pour voir si certaines fonctionnent mieux chez un sexe que chez l’autre. « On veut aussi être capables de voir une différence dans le sang, et peut-être par imagerie médicale. » Benoit Labonté s’attend-il à voir une application clinique de ces découvertes à moyen terme ? « Oui, certainement, les compagnies pharmaceutiques veulent aller vers la médecine personnalisée. »

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