Duchesne largué par son équipe

Le coureur québécois ne reviendra pas avec Direct Energie en 2018

Antoine Duchesne ne sera pas de retour avec Direct Energie l’année prochaine. « Très triste » de ce dénouement après quatre années sous les couleurs de l’équipe française, le cycliste s’attend à garder sa place dans le peloton européen.

En repos au Québec après une première moitié de saison marquée par des ennuis de santé, Duchesne a appris le non-renouvellement de son contrat lors d’un appel téléphonique la semaine dernière. En quelques minutes, le manager Jean-René Bernaudeau lui a fait comprendre qu’il ne le reprendrait pas en 2018.

La raison ? Le coureur de 25 ans s’est adjoint les services d’une agente belge l’automne dernier, ce qui aurait irrité Bernaudeau, qui refuse de passer par des intermédiaires pour ses négociations contractuelles.

« Je n’en ai jamais parlé à Jean-René parce que je sais qu’il n’aime pas les agents », a expliqué Duchesne, joint au téléphone hier après-midi. « Il ne travaille avec aucun agent et il ne veut pas qu’on en ait. »

Le natif de Chicoutimi plaide avoir voulu planifier son avenir en raison de l’incertitude entourant l’équipe de deuxième division. En 2015, les coureurs avaient dû patienter jusqu’en octobre avant d’apprendre l’arrivée in extremis de Direct Energie, qui a remplacé Europcar comme commanditaire principal. Ce n’est qu’en mars que la société française a annoncé son engagement avec la formation vendéenne jusqu’en 2019.

Au même moment, Bernaudeau a su que Duchesne avait embauché une agente. « En gros, c’est sa seule raison. Il s’attendait à ce que j’aille vers lui, que je lui explique ma raison, mais je ne l’ai pas fait. C’était peut-être une erreur de ma part. »

« Il m’a dit : “Quand j’ai vu ça, j’ai pris pour acquis que je n’avais plus à m’occuper de ton avenir et j’ai donc considéré que tu ne faisais plus partie de l’équipe.” »

— Antoine Duchesne, relatant les paroles de Jean-René Bernaudeau, patron de l’équipe Direct Energie

L’emblématique manager vendéen, qui dirige sa formation depuis 2000, aurait compris que son coureur lorgnait d’autres équipes, ce que ne nie pas le principal intéressé.

« J’étais ouvert à aller voir ailleurs, a dit Duchesne. Peut-être qu’un peu de changement, voir autre chose après quatre ans, ça aurait pu être bon aussi. Jean-René est une personne quand même proche de ses émotions. Pour lui, d’avoir fait ça, c’était une forme de trahison. »

En mai, Duchesne a jugé préférable d’attendre avant de solliciter son patron, très remonté par l’annonce du départ de Bryan Coquard, sprinter-vedette de Direct Energie. Les deux hommes devaient se parler le mois dernier au Tour de Suisse, mais Bernaudeau ne s’est pas pointé et Duchesne est tombé malade et a abandonné avant la fin.

« Au début des classiques, il nous avait tous promis, en pleine face, devant des témoins, que tout le monde dans la salle allait avoir une offre en juin, s’est désolé Duchesne. J’ai pris ça pour du cash. »

« J’ai donné mon 100 % »

Embauché chez Europcar à l’automne 2013, Duchesne suivait ainsi les traces de son compatriote David Veilleux, parti à la retraite prématurément après être devenu le premier Québécois à finir le Tour de France. Coureur au tempérament offensif, à son mieux sur le terrain des classiques, il a surtout servi les intérêts de ses équipiers.

En 2015, Duchesne a disputé la Vuelta, son premier grand tour. Il ne compte aucune victoire depuis son arrivée en Europe, mais s’est adjugé le maillot à pois de meilleur grimpeur sur Paris-Nice l’an dernier, ce qui lui a ouvert la porte du Tour de France, qu’il a terminé au 107e rang. Il a ensuite pris part aux Jeux olympiques de Rio et aux Championnats du monde. Cette saison a été plus difficile, avec deux épisodes sérieux de maladie et une grosse chute à Paris-Roubaix.

Déjà « très blessé » par cette fin abrupte, sur une justification qu’il qualifie d’« excuse », Duchesne était « encore plus choqué » d’apprendre qu’elle avait été ébruitée dans une brève dans L’Équipe d’hier. Le quotidien français a également indiqué que Bernaudeau en avait informé tous les coureurs avant le départ du Tour.

« Je trouve ça très triste parce que tout s’est toujours bien passé dans l’équipe, a relevé Duchesne. Je me suis toujours bien entendu, j’ai donné mon 100 % depuis quatre ans pour tout le monde, sans jamais penser à moi, et je me fais remercier de cette façon. J’aurais aimé que ça se passe autrement. »

Duchesne s’attend à trouver une place dans le peloton européen l’an prochain. « Pour l’instant, tout est en négociation, mais je ne devrais pas me retrouver dans la rue, a-t-il assuré. J’ai ma place sur le World Tour, et c’est vers ça que je suis en train de régler. »

Même si la motivation sera plus difficile à trouver, Duchesne promet de tout donner pour Direct Energie d’ici la fin de la saison, avec une attention particulière sur les Grands Prix de Québec et de Montréal, qu’il devrait disputer sous les couleurs de l’équipe nationale canadienne en septembre.

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