Chronique

La nouvelle Céline passe ou casse ?

Parfois, l’élégance et le chic de Céline Dion nous coupent le sifflet. Une jolie tunique Dior, des verres fumés surdimensionnés, des bottes noires toutes simples et voilà !

Puis, aïe, la chanteuse de 49 ans sort en public avec une casquette de cuir, des cuissardes en tissu de sofa scotchgard et un horrible manteau en peau de serpent. Bonjour le look de friperie haut de gamme, tendance vagabond chic.

La nouvelle Céline Dion « libérée et affranchie » polarise encore plus que l’ancienne, encadrée et contrôlée. Depuis la mort de René Angélil, sa séparation d’avec son imprésario Aldo Giampaolo et son association avec le styliste Law Roach, la diva de Las Vegas prend des risques comme jamais auparavant. Pour le meilleur et pour le pire.

Le meilleur, c’est quand Céline Dion assiste aux défilés haute couture de Paris avec ses looks impeccables. On l’a vue impériale cette semaine chez Christian Dior et Giambattista Valli, toujours assise près de la papesse de la mode, Anna Wintour du prestigieux magazine Vogue.

Les sorties publiques de Céline-la-modeuse provoquent quasiment des émeutes. Pour son image médiatique, ça vaut tout l’or des hommes.

Le pire, c’est quand l’artiste enfile une horrible salopette Givenchy en faux cuir (coût : 2000 $) et de grosses lunettes de soudeuse ou qu’elle exécute une danse lascive sur scène, « tout écartillée », avec un danseur musclé. D’un seul coup, la chanteuse de Charlemagne détruit ce qu’elle a construit de classique et renoue avec son côté quétaine, désolé de l’écrire.

Ce numéro sexy, qu’elle a inauguré sur la pièce Le ballet à Lille et Bordeaux, lui colle difficilement à la peau, on dirait, contrairement à son costume de scène hyper moulant à la Britney Spears. Aurions-nous un malaise avec cette image sexuée de Céline impliquant un autre homme que René Angélil, le seul amant qu’elle ait connu dans sa vie ? Probablement.

En même temps, tant mieux si l’interprète d’On ne change pas change, justement, et s’éclate. Céline a bûché comme une forcenée pendant 35 ans et mérite de se payer du bon temps.

Le problème, c’est que Céline Dion souffle le chaud et le froid depuis 18 mois. Elle cabotine, grimace sur scène, pousse des blagues, puis se métamorphose en déesse des plaisirs charnels. Bref, son personnage public s’éparpille dans tous les sens : vamp, clown, fashionista, diva gracieuse, pop star déchaînée, femme raffinée, bombe au lit, maman soccer, amie grivoise, on ne sait plus trop quelle Céline se pointe devant les caméras.

Difficile d’adopter toutes ces identités sans donner le tournis à ses admirateurs.

Après avoir été étiquetée « cool » par la presse internationale, souvenez-vous de son coton ouaté du Titanic porté l’été passé, la star a-t-elle conservé cette étiquette convoitée sur la planète pop ?

Selon le magazine Maclean’s, oui. Selon ses fans, c’est moins clair.

Hier, un cliché d’elle, nue sur une chaise, a été publié sur le compte Instagram de la bible mode Vogue. Trop vieille pour se dénuder, crise d’adolescence ou en manque d’attention, les vipères ont persiflé. Mais entre vous et moi, cette photo classique et de bon goût n’était pas du tout choquante, au contraire.

Ce qui fascine le plus à propos de la Céline 2.0, c’est à quel point ses camarades plus jeunes du showbiz la vénèrent. Au dernier gala des Billboard Music Awards, le rappeur torontois Drake s’est carrément prosterné devant elle. Sur Instagram hier, Katy Perry a carrément flippé en la croisant, par hasard, alors qu’elle posait au balcon d’un appartement de la place Vendôme.

Pour plusieurs membres de la génération Y, dont Xavier Dolan, Céline est une icône, une intouchable. Pour la génération plus vieille, Céline représente encore la pop générique et l’Elvis Gratton qui sommeille au fond de nous.

Contrairement à bien des stars préfabriquées qui n’ont absolument rien à dire, sauf des banalités, Céline a gardé sa candeur et sa générosité en entrevue. C’est ce qui garde intact le lien avec ses fans, cette absence de filtre, cette authenticité qui rappelle celle d’Adele.

Et le point le plus important dans tout ça : Céline Dion demeure une bête de scène. Aucun vêtement trop flyé ne lui enlèvera cette énergie et cette voix incomparables. Tel est son destin.

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