Services cellulaires

D’où viennent les dépassements ?

Entre les fournisseurs peu bavards, les téléphones plus complexes, les applis gourmandes et les consommateurs de plus en plus branchés, qui sont les premiers responsables des dépassements de forfait de données ? Quatre pistes de réponse.

ÉTUDE CONTROVERSÉE

En septembre 2012, des chercheurs de l’Université de Californie à Los Angeles, dirigés par Chunyi Peng, ont publié une étude aux conclusions retentissantes. Essentiellement, ils se sont penchés sur deux importants fournisseurs de téléphonie cellulaire – sans les nommer – pour découvrir que leur décompte de données utilisées était exagéré de 5 à 7 %. Ces fournisseurs calculaient les données émises, et non celles reçues par leurs clients. Quand le réseau est faible, certains « paquets » de données doivent être envoyés plus d’une fois. Le hic, c’est que cette étude n’a jamais été reproduite, et Mme Peng semble avoir abandonné ce champ d’études. Elle n’a pas répondu aux demandes d’entrevue de La Presse. Selon un expert universitaire québécois consulté, qui n’a pas souhaité lui non plus commenter l’étude, celle-ci est basée sur « un vieux problème qui devrait être techniquement résolu ».

DES TÉLÉPHONES PEU COLLABORATEURS 

Avec des dizaines d’applications installées et des systèmes d’exploitation qui ne se gênent pas pour se brancher à l’internet, les téléphones intelligents semblent aujourd’hui presque impossibles à contrôler, tant les paramètres sont nombreux. Les mystérieux « services systèmes » d’Apple, par exemple, vont chercher des centaines de mégaoctets. Sur Android, ce sont les « tâches en arrière-plan » qui vont consommer beaucoup de données. « Apple s’est aussi tiré dans le pied avec l’Assistance WiFi, qui permettait de se brancher au réseau cellulaire quand le WiFi est trop faible », rappelle Marc-Antoine Berthiaume, de Mac Québec. Cette option, qu’on peut désactiver, a d’ailleurs valu à des milliers d’utilisateurs un dépassement de forfait… et un recours collectif de 5 millions aux États-Unis. Plus globalement, « la technologie et sa complexité font partie du problème », estime Josée Thibault, commissaire adjointe au CPRST. « Je me considère comme une consommatrice assez éduquée et même pour moi, c’est difficile de suivre en détail ce que mon téléphone consomme. »

GARE À LA VIDÉO 

Pas besoin d’aller consulter la consommation de données détaillée pour établir une règle de base : la vidéo est ce qui fait le plus mal à votre forfait. « YouTube peut être une vraie catastrophe, explique Marc Ménard, spécialiste en dépannage informatique. Si on ne fait pas attention, il va jouer la prochaine vidéo par défaut. » Facebook et Twitter offrent également la lecture automatique des vidéos, une option très gourmande. « Ils démarrent tout seuls et en trois minutes, on peut passer 150 Mo, estime Marc-Antoine Berthiaume. » Notons qu’on ne peut se fier uniquement à la durée d’une vidéo pour établir sa consommation ; il faut notamment tenir compte de la résolution, de la qualité du flux et de la compression. 

CHANGEMENTS DE COMPORTEMENT 

Les utilisateurs de téléphones intelligents se sont adaptés à leurs appareils de plus en plus performants. Peu se contentent d’utiliser leur appareil pour ses fonctions de base – appels, SMS, courriels – et vont l’utiliser pour naviguer sur l’internet, écouter de la musique ou regarder des vidéos. « Honnêtement, un téléphone n’est pas la meilleure plateforme pour regarder un film, mais c’est parfois la seule qui est disponible dans un train », dit Marc Ménard. « Nos habitudes changent, le téléphone devient un appareil de divertissement pour nos enfants, de streaming de musique, d’envoi de photos et de vidéos en tous genres », note Martin Masse, de Zone Accro. Il remarque que les fournisseurs vont souvent offrir à peu de frais les appels illimités, mais « dès qu’on parle de données, ça monte rapidement. Les forfaits vont devoir s’adapter, ce qui n’est pas encore le cas. »

Enfin, si la plupart des fournisseurs envoient des notifications quand le forfait est sur le point d’être dépassé, il faut compter sur un délai pouvant aller jusqu’à 12 heures avant d’être prévenu, dit Marc-Antoine Berthiaume. « Et les données continuent d’être utilisées pendant ce temps-là. »

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