Innovation

Plus d’aide aux PME en échange d’un partage des bénéfices

QUÉBEC — Aux PME insatisfaites des programmes gouvernementaux en innovation, Québec propose une nouvelle approche : augmenter de façon importante l’aide de l’État en contrepartie d’un partage des bénéfices éventuels. Quitte à ce que le gouvernement essuie parfois des pertes dans l’aventure.

Le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, donne raison aux PME qui, en majorité, trouvent complexes et inadaptés à leur réalité les programmes d’aide en innovation, selon un sondage rendu public par l’organisme QuébecInnove.

« Elles ont raison de dire que c’est complexe, car il y a beaucoup de structures qui existent et de portes où aller cogner. On corrige ça avec la fusion du ministère de l’Économie et de l’Innovation avec Investissement Québec. Mais plus important, ce sont les programmes d’aide financière qui vont devoir être ajustés, modulés, pour pouvoir prendre plus de risques », a réagi M. Fitzgibbon lors d’une mêlée de presse mercredi.

Il donne l’exemple d’une entreprise qui voudrait acheter un robot au prix de 800 000 $. Jusqu’ici – « dans l’ancien temps », dit-il –, Québec offrait un prêt équivalant à 20 % ou 30 %, et l’entreprise devait fournir la différence. Or, « les banques souvent n’étaient pas enclines à financer ce risque-là », et l’entrepreneur se retrouvait seul à en assumer la majeure partie.

« Moi, je suis prêt à aller à un montant plus élevé que le 30 %, peut-être 80-90 %, dans la mesure où on partage le risque et le bénéfice. »

— Pierre Fitzgibbon, ministre de l’Économie

L’État va donc « prendre plus de risques, mais il va y avoir plus de bénéfices si ça s’avère que l’automatisation va donner des bénéfices tangibles à l’entreprise ».

« Économie circulaire »

Dans le cas de l’achat d’équipement d’un million de dollars, « le 800 000 $ que je prête, je pourrais faire une redevance, 200 000 $ de revenus sur le 800 000 $, et je l’investis ailleurs. C’est ce que j’appelle mon économie circulaire », a ajouté le ministre de l’Économie. Il prévient qu’« il va y avoir des pertes dans certains cas », mais son objectif est évidemment que les gains « compensent » celles-ci.

À l’heure actuelle, cette forme d’aide plus « agressive » est offerte de façon ad hoc, par décret du Conseil des ministres, et non en vertu des programmes actuels. « La réforme d’Investissement Québec va vouloir normaliser ce genre d’approche là », a indiqué M. Fitzgibbon.

Cette approche sera susceptible, selon lui, de corriger « le plus gros problème du Québec » depuis quelque temps. « On a des finances saines, mais la productivité est déficiente de façon importante quand on se compare à l’étranger. Il faut compenser cet écart. Et comment ça va se compenser ? Par des investissements en innovation. »

— Avec Isabelle Massé, La Presse

Ils ont dit

« C’est très porteur. C’est un bon modèle. Depuis le début, le ministre Fitzgibbon amène le concept de partage du risque. Cela dit, il faudra calibrer les revenus et bien étudier les demandes des PME. Si on donne trop, on créera trop de risque. Le projet doit être solide. »

— Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

« C’est une idée qui mérite d’être considérée. Ce peut être un outil parmi d’autres. Mais il faut voir si ça répond aux besoins des PME. Il faut se questionner sur les vraies besoins des entreprises et sur les meilleurs moyens d’y répondre. Nous disons, par exemple, qu’un allègement fiscal serait une très bonne solution, car ça donnerait les coudées franches aux PME pour qu’elles prennent les bonnes décisions. Selon un rapport du FCEI, les taxes sur la masse salariale sont beaucoup plus élevées pour les entreprises québécoises que partout ailleurs au Canada. C’est des ressources qu’elles n’ont pas pour investir. Par ailleurs, les PME apprécient les programmes bien gérés et qui leur font obtenir des résultats. Pour réussir, il faut de véritables objectifs de résultats. C’est dans cette optique qu’il faut penser l’aide aux entreprises. »

— Simon Gaudreault, directeur principal de la recherche nationale à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI)

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