Mon clin d’œil

Budget : l’art de se féliciter de donner aux gens ce qu’on leur a pris.

Opinion

Des chiffres pour s'attaquer à l’itinérance

Les résultats du deuxième dénombrement des personnes en situation d’itinérance à Montréal seront dévoilés dans les prochaines semaines et c’est un moment important.

Il est peu probable qu’une personne commence à ériger un édifice sans effectuer un examen approfondi du sol et du paysage. Les connaissances acquises grâce à l’examen du site sont un facteur important dans la conception et le coût d’un projet.

De la même façon, lorsque nous demandons aux groupes communautaires, aux gouvernements, aux donateurs et aux fondations d’investir dans la lutte contre l’itinérance, il est sage de consacrer temps et énergie à s’assurer que nous comprenons la situation sur le terrain. C’est la raison pour laquelle nous favorisons un dénombrement.

Étant donné que le premier décompte a eu lieu en 2015, les résultats du deuxième dénombrement devraient nous donner l’occasion de tirer des conclusions sur l’évolution de la situation chez nos concitoyens les plus vulnérables.

Des données méthodiques sont une denrée rare dans le milieu communautaire, notamment en raison des budgets généralement limités et sollicités.

Dans ce contexte, les services sont souvent élaborés à partir d’observations, d’expériences et d’anecdotes. Le résultat de cette approche ? Bons services et croissance en itinérance.

Aujourd’hui, nous, les ressources majeures en itinérance et hébergement à Montréal, constatons que nous devons mesurer et évaluer la situation pour bien cibler nos services. L’obtention de données ne pourra que favoriser les organismes dans leurs approches auprès des gouvernements et des donateurs afin qu’ils soient soutenus dans la lutte contre l’itinérance et dans leur volonté d’adapter leurs services à la réalité actuelle.

Les décomptes sont réalisés dans les villes, à l’échelle de notre province, du pays et du continent, ainsi qu’en Europe. En fait, les dénombrements sont requis par le secrétaire au Logement et au Développement urbain des États-Unis pour que les villes puissent recevoir un financement du gouvernement fédéral, et sont des éléments critiques afin de donner un aperçu des progrès réalisés en vue de réduire l’itinérance chronique et d'y mettre fin.

Une base de référence

Ces dénombrements peuvent fournir une estimation fiable du nombre de personnes en situation d’itinérance visible, une nuit donnée à Montréal. Ils nous permettent d’établir à la fois un ordre de grandeur et une base de référence permettant de comparer les résultats futurs. Ils peuvent nous donner une bonne idée du nombre de personnes utilisant les services existants. Ils sont utiles afin de permettre aux organisations de modifier leurs services pour avoir un meilleur impact.

Cela dit, les dénombrements ne nous fournissent pas toutes les réponses ou ne nous permettent pas d’évaluer tous les paramètres possibles. Ils ne dépeindront pas de manière adéquate l’étendue de l’itinérance cachée – qui fait référence aux personnes qui passent la nuit ou qui font du couch surfing chez un ami ou dans un logement précaire. Le dénombrement est imparfait et certains souligneront ses faiblesses et ses insuffisances. Mais est-ce que les critiques proposeront de meilleures solutions pour obtenir des données fiables ?

Depuis 2015, nous disposons de données très utiles pour répondre plus adéquatement à la problématique de l’itinérance chronique. Concrètement, plus de 1100 personnes qui étaient en situation d’itinérance chronique en 2015 ne le sont plus et sont présentement logées et soutenues grâce à la concertation de la Ville, la province, le fédéral et les organismes communautaires qui œuvrent dans le domaine de l’itinérance à Montréal. C’est un résultat positif pour chacun.

Soyons confiants en l’avenir et travaillons à renforcer et à améliorer la collecte des données sur les personnes en situation d’itinérance afin qu’elles puissent réintégrer leur place dans la société.

* Cosignataires : Sam Watts, Mission Bon Accueil ; François Boissy, Maison du Père ; Aubin Boudreau, Accueil Bonneau ; Marcèle Lamarche, Le Chaînon

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