Renaissance

La pub télé comme outil de relance

Pierre Legault est un véritable entrepreneur social. En 1994, 10 ans après avoir fondé la banque alimentaire Moisson Montréal, il a lancé Renaissance. La mission de la chaîne de magasins de récupération est double : favoriser l’insertion professionnelle et donner un coup de pouce à l’environnement.

« J’ai trouvé ma vocation : démarrer des projets à des fins sociales, mais en n’oubliant jamais la viabilité économique », explique M. Legault, psychoéducateur de formation. Le concept de Renaissance lui a entre autres été inspiré par la chaîne américaine Goodwill, fondée en 1902 à Boston.

Avec ses 10 magasins Fripe-Prix, ses 14 centres de dons, ses 6 librairies, ses 2 boutiques spécialisées ainsi que son centre de distribution et de liquidation, tous situés dans la grande région de Montréal, Renaissance emploie environ 300 personnes. L’entreprise à but non lucratif revend les vêtements, les chaussures et toute une panoplie d’articles que des citoyens déposent à ses centres de dons.

Renaissance tire 83 % de ses revenus des ventes réalisées dans ses magasins. Les 17 % restants proviennent d’Emploi-Québec, dans le cadre d’un programme visant l’insertion professionnelle de chômeurs et de prestataires de l’aide sociale. « Il ne s’agit pas d’une subvention, mais d’un contrat de service », tient à préciser Pierre Legault.

La viabilité de Renaissance dépend fortement des dons de biens que l’entreprise reçoit de la part de la population. Or, en 2011, les dons ont commencé à diminuer de façon marquée. La raison ? La multiplication des boîtes de dons dans les municipalités. Certaines appartenaient à des organismes de bienfaisance légitimes, mais d’autres à des entrepreneurs plus ou moins bien intentionnés. Résultat : en deux ans, les dons ont baissé de 60 % chez Renaissance.

« On avait vu qu’un phénomène semblable s’était produit quelques années plus tôt en Europe, raconte M. Legault. On savait qu’il ne fallait pas tarder à réagir : le marché était en train de changer rapidement. On s’est dit qu’en faisant notre travail le mieux possible, les gens allaient nous adopter. »

Cela dit, pour Pierre Legault et son équipe, il était clair qu’il fallait accroître la notoriété de Renaissance. Mais comment ? S’y connaissant peu dans ce domaine, l’entreprise a décidé de faire appel à une firme de publicité-marketing. La recommandation de cette dernière : faire une campagne publicitaire à la télévision !

L’idée était géniale, mais comment un organisme à but non lucratif pouvait-il la concrétiser ? D’abord en négociant des tarifs préférentiels avec l’agence de publicité, la boîte de production et les télédiffuseurs. Puis en remaniant le budget. « En affaires, il faut prendre des risques », dit M. Legault.

Le pari aura valu le coup. Au printemps 2012, une première campagne télévisée mettant en vedette Marc Labrèche et Guylaine Tremblay a connu un grand succès. La seconde, qui prend fin ces jours-ci avec Antoine Bertrand et Isabelle Boulay, a permis à Renaissance de consolider ses acquis. À preuve, l’entreprise a retrouvé, puis dépassé les niveaux de dons d’avant 2011. « Nous n’avons vraiment pas regretté notre décision », affirme Pierre Legault.

Renaissance ne peut pas se permettre de baisser la garde. En plus de la « concurrence » d’organismes de bienfaisance comme L’Armée du Salut, l’entreprise doit batailler avec la chaîne américaine Village des valeurs, qui compte 16 magasins au Québec. En 2012, sa société mère, Savers, a été acquise au coût de 1,7 milliard US par deux fonds d’investissement privés.

Pour l’instant, Renaissance n’a pas l’intention de s’aventurer à l’extérieur de la région métropolitaine. L’entreprise reste néanmoins à l’affût des occasions d’expansion ailleurs au Québec, en gardant à l’esprit de ne pas nuire à d’autres entreprises d’insertion déjà établies.

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