États-Unis

L’avortement légal bientôt impossible au Kentucky ?

La dernière clinique du Kentucky qui pratique des avortements pourrait bientôt être contrainte de fermer ses portes en raison des pressions exercées par l’administration de l’État.

Eizabeth Nash, analyste du Guttmacher Institute qui s’intéresse aux politiques régissant l’accès à l’avortement dans le pays, note qu’une telle situation n’a pas été observée depuis des décennies.

« Dans les années suivant le jugement Roe c. Wade, en 1973, on a rapidement vu l’accès à l’avortement s’étendre à tous les États », rappelle Mme Nash, qui s’inquiète de constater qu’une demi-douzaine d’États américains ne comptent plus aujourd’hui qu’une clinique pratiquant ce type d’intervention.

La disparition du dernier établissement à pratiquer des interruptions de grossesse au Kentucky reviendrait à dire que le gouvernement « abdique sa responsabilité » de garantir l’accès à ce service essentiel, dit Eizabeth Nash, analyste du Guttmacher Institute.

Le gouverneur républicain de l’État, Matt Bevin, qui se dit « férocement pro-vie », est déjà intervenu pour empêcher une clinique liée à Planned Parenthood de pratiquer des avortements au Kentucky.

Avec la bénédiction de l’élu, qui dit agir dans ce cas pour « assurer la santé, le bien-être et la vie des femmes », les autorités sanitaires ont maintenant dans leur ligne de mire l’EMW Women’s Surgical Center, à Louisville.

L’établissement, fondé en 1981, a été avisé au printemps que les accords conclus avec un centre hospitalier et un service ambulancier local pour assurer le transfert de patientes en cas d’urgence n’étaient pas conformes et que le permis de la clinique devrait par conséquent être retiré.

L’American Civil Liberties Union (ACLU) a saisi rapidement les tribunaux au nom de la clinique pour obtenir une injonction visant à bloquer la décision. L’une des avocates au dossier a indiqué que les considérations administratives évoquées par l’État étaient un artifice et que son objectif était « purement et simplement » d’empêcher tout avortement au Kentucky.

La clinique a obtenu en avril que le permis soit maintenu en attendant que la cause soit entendue sur le fond en septembre.

Lors des audiences tenues à ce sujet cette semaine, l’organisation de défense des droits de la personne a fait valoir que les accords de transfert évoqués par l’État existaient depuis des années et qu’ils avaient toujours été jugés acceptables jusqu’à ce que l’annonce de la révocation du permis sorte « de nulle part ».

Les avocats de l’ACLU ont notamment évoqué un jugement récent de la Cour suprême qui a rejeté les conditions sanitaires draconiennes imposées par l’État du Texas à des cliniques d’avortement pour les forcer à fermer.

Le plus haut tribunal du pays a indiqué à cette occasion que les restrictions imposées représentaient un « fardeau indu » pour les femmes désirant un avortement.

Mme Nash, du Guttmacher Institute, pense que la cause évoquée constitue une solide base pour contester la décision du gouvernement du Kentucky. Un verdict à ce sujet est attendu prochainement.

Le Dr Ernest Marshall, fondateur de l’EMW Women’s Surgical Center, a indiqué dans une déclaration écrite que le gouverneur de l’État cherchait « inlassablement » à empêcher son établissement de pratiquer des avortements.

« Les enjeux liés à notre dossier ne pourraient être plus importants. C’est le droit d’avoir accès à un avortement légal qui est en jeu », a-t-il indiqué.

L’avortement en chiffres

926 200 avortements ont été pratiqués aux États-Unis en 2014, soit 12 % de moins qu’en 2011

Le taux d’avortement était alors de 14,6 par 1000 femmes de 15 à 44 ans, en baisse de 13 % depuis 2008.

Le nombre de cliniques dans le pays a baissé de 6 % de 2011 à 2014. La chute a été plus marquée dans le Midwest (22 %) et le sud du pays (13 %).

États-Unis 

Aide d’urgence pour les victimes de Harvey
Trump relève le plafond de la dette

Donald Trump a signé hier la loi adoptée quelques heures plus tôt par le Congrès débloquant une aide d’urgence de 15,25 milliards pour les victimes de la tempête Harvey, relevant, du même coup, temporairement le plafond de la dette.

« Nos pensées et nos prières accompagnent toutes les personnes qui ont été touchées », a indiqué Sarah Huckabee Sanders, porte-parole du président américain, en annonçant cette signature.

Après le feu vert du Sénat jeudi, les élus de la Chambre des représentants ont voté par 316 voix contre 90 pour ce texte, qui avait fait l’objet d’un compromis entre le président républicain et la minorité démocrate.

« Merci à mes collègues du Congrès », a tweeté Ileana Ros-Lehtinen, élue républicaine de Floride, un État qui se prépare à l’arrivée d’un autre ouragan, Irma, ce week-end, et bénéficiera du renflouement de l’agence fédérale des situations d’urgence FEMA, qui supervise déjà l’aide au Texas et à la Louisiane, sinistrés par Harvey.

Opposition chez les républicains

L’opposition est venue entièrement du parti républicain, en particulier de l’aile conservatrice, scandalisée que les fonds d’urgence ne soient pas financés par des économies ailleurs dans le budget. Les conservateurs regrettent aussi que la limite légale de la dette ait été augmentée sans réforme structurelle.

Mais le relèvement de cette limite assure que les États-Unis ne feront pas défaut sur leur dette à la fin du mois de septembre ; le président Donald Trump en avait fait une priorité.

La loi finance également l’État fédéral jusqu’au 8 décembre, ce qui évite une éventuelle fermeture des administrations au début du nouvel exercice budgétaire, qui commence le 1er octobre.

« En finançant l’État pendant les trois prochains mois, les Américains peuvent être rassurés, en attendant que nous trouvions une solution permanente dans les prochains mois », a déclaré un responsable de la Maison-Blanche.

Bras de fer reporté

La loi reporte de facto le bras de fer au Congrès au mois de décembre, augurant une fin d’année conflictuelle et très chargée ; la majorité a en effet lancé le chantier d’une grande réforme fiscale, que les dirigeants du Congrès veulent faire aboutir avant 2018.

La majorité républicaine et l’opposition démocrate, qui a un pouvoir de blocage au Sénat, devront se mettre d’accord pour trouver une solution durable sur le budget et sur la dette, voire dans des dossiers aussi brûlants que les impôts, l’immigration ou la construction d’un mur à la frontière avec le Mexique.

Donald Trump « a donné aux démocrates un levier incroyable pour faire dérailler la réforme fiscale », a dénoncé le conservateur Sean Duffy, sur Fox News. « Cela va lui revenir dans la figure, ce sera un gros problème. »

La loi adoptée hier prolonge également jusqu’au 8 décembre la vie d’un programme public d’assurance contre les inondations, qui arrivait à expiration.

Cinq présidents derrière les sinistrés

Les cinq anciens présidents des États-Unis toujours en vie, Jimmy Carter, George H. W. Bush, George W. Bush, Bill Clinton et Barack Obama, ont lancé une campagne de financement pour venir en aide aux sinistrés de l’ouragan Harvey et à ceux de l’ouragan Irma qui fonce actuellement sur la Floride. La campagne, baptisée One America Appeal, a été lancée cette semaine dans une vidéo dans laquelle on retrouve les cinq anciens présidents. Les fonds recueillis dans le cadre de cette collecte seront déposés dans un compte spécial de la George H. W. Bush Presidential Library Foundation, liée à la bibliothèque présidentielle de Bush père, avant d’être versés en totalité aux sinistrés, selon les informations publiées sur le site web de la campagne. Ce n’est pas la première fois que d’anciens présidents des États-Unis s’unissent à des fins caritatives. En 2005, George Bush père et Bill Clinton avaient recueilli des fonds pour les victimes de l’ouragan Katrina et celles du tsunami qui avait frappé le sud de l’Asie fin 2004.

— Jeiel Onel Mézil, La Presse

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