Propos sur le déséquilibre fiscal

L’opposition tire à boulets rouges sur le ministre Leitao

OTTAWA — « C’est une bourde », dit le chef péquiste Pierre Karl Péladeau. La CAQ est « estomaquée ». Québec solidaire se demande s’il s’agit « d’ignorance ou d’insouciance ».

Les partis de l’opposition à Québec ont dénoncé hier les propos du ministre des Finances du Québec Carlos Leitao, qui considère qu’il « n’y a pas un déséquilibre fiscal aujourd’hui » entre Ottawa et les provinces. Les trois partis de l’opposition à l’Assemblée nationale sont plutôt d’avis qu’il existe actuellement un déséquilibre fiscal entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec.

« C’est une bourde », dit Pierre Karl Péladeau, chef du Parti québécois et de l’opposition officielle à l’Assemblée nationale, à propos des déclarations du ministre Leitao. « Quand tu es ministre des Finances et que tu dis qu’il n’y a pas de déséquilibre fiscal, j’aimerais bien ça qu’il me donne sa définition de déséquilibre fiscal, affirme-t-il en entrevue à La Presse. C’est clair qu’il y en a un, tout le monde le dit, y compris le Conference Board [dans un rapport en 2014]. Le simple fait qu’il y a des transferts est la preuve qu’il y a un déséquilibre fiscal, sinon toutes les provinces auraient les ressources pour remplir leurs missions essentielles. »

« Si tu dis que tout va bien, tu abandonnes immédiatement, tu n’as aucun pouvoir de négociation. On est à genoux devant le gouvernement fédéral. »

— François Bonnardel, député de la Coalition avenir Québec et porte-parole en matière de finances

« Est-ce par ignorance ou par insouciance ? Un gouvernement qui impose des sacrifices, qui coupe de manière aussi sauvage dans les services, devrait être soucieux d’aller chercher ce qui lui revient », affirme Amir Khadir, député de Québec solidaire et porte-parole en matière de finances.

Lors d’une entrevue à La Presse à la suite de la conférence semi-annuelle des ministres des Finances du pays, le ministre Leitao a expliqué ne pas croire à un déséquilibre fiscal actuellement. Il s’est dit plus préoccupé par le phénomène à long terme et a noté que le portrait changeait avec le nouveau programme économique du gouvernement Trudeau. Québec demande notamment à Ottawa de revoir la formule de calcul des transferts en santé afin de tenir compte de l’âge de la population (la formule actuelle tient uniquement compte de la taille de la population).

« C’est un piètre négociateur, c’est malhabile, dit François Bonnardel, député de la CAQ. Il y a un déséquilibre fiscal, ça va nous frapper encore plus fortement [en raison de la hausse des coûts en santé]. Nous ne pouvons pas attendre des négociations dans cinq ou dix ans. Comment est-ce possible de faire prendre conscience de cette situation au gouvernement fédéral ? Il faut lever le ton et expliquer notre contexte démographique. » La CAQ dénonce aussi le fait que le premier ministre Couillard avait déclaré en 2014 que le maintien de la hausse des transferts de santé à 6 % par an était « difficile à maintenir […] dans le contexte économique financier actuel ».

DIVISION SUR LA PÉRÉQUATION

En 2016-2017, le Québec recevra 10,03 milliards en péréquation, soit 57 % de l’enveloppe totale de péréquation de 17,88 milliards. Par habitant, le Québec occupera le cinquième rang sur six provinces bénéficiaires. Le ministre Leitao a expliqué lundi que la péréquation était « une composante très efficace du fédéralisme fiscal canadien ».

Sur ce dernier point, l’opposition est divisée à Québec. La CAQ estime qu’il n’y a « rien de réjouissant » à recevoir de la péréquation, tandis que Québec solidaire pense le contraire. « J’aurais aimé voir le ministre dire qu’on va développer notre économie [et recevoir moins de péréquation à long terme] », dit François Bonnardel, député de la CAQ. « Qu’on soit indépendantiste comme moi ou fédéraliste comme M. Leitao, on doit se soucier de la juste répartition de la richesse, affirme Amir Khadir, député de Québec solidaire. Je ne suis jamais honteux de répartir la richesse. C’est la chose la plus noble qu’on puisse faire. »

— Avec la collaboration de Vincent Marissal

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