INTERNET LE PHARMACHIEN

Différencier le vrai du n’importe quoi

C’est plus fort que lui. Quand il entend parler de guérison par les anges, d’irrigation du côlon, de cure détoxifiante et de fausses informations véhiculées sur les vaccins, Olivier Bernard a les cheveux qui lui dressent sur la tête. Pharmacien et passionné de vulgarisation scientifique, il s’est donné comme mission de « différencier le vrai du n’importe quoi en santé ». Avec humour et impertinence. Son premier livre, Le Pharmachien (tiré de son blogue), sera en librairie ce jeudi.

L’aventure du blogue Le Pharmachien a débuté en 2012. « C’est venu de mon expérience comme pharmacien, des propos que j’entendais de la bouche des clients et des gens autour de moi. D’ailleurs, j’ai fait un chapitre complet sur comment survivre aux soupers de famille. Les choses qui se disent autour de la table pendant les réveillons sont parfois farfelues, insensées. Je me sentais souvent dépourvu et impuissant dans ces situations », raconte-t-il en entrevue téléphonique.

« Les gens sont de plus en plus méfiants face au système de santé. Par exemple, ils ont une vision très irréaliste de ce qu’est un médecin, de ses limites. Ces dernières années, les professionnels de la santé n’ont peut-être pas fait un bon travail pour montrer un côté plus humain, plus empathique. Ils ne sont peut-être pas assez proches des gens, et ça crée une déconnexion. Les gens se tournent vers d’autres approches qui sont parfois efficaces, parfois inefficaces et parfois même dangereuses. »

DÉBOULONNER LES MYTHES AVEC HUMOUR

Olivier Bernard a donc imaginé une façon d’intervenir non pas avec une personne à la fois, mais à grande échelle. « Je voulais créer quelque chose de scientifique, crédible et très solide, mais très humoristique en même temps, qui rejoindrait tout le monde. Je souhaitais être efficace et diffuser des messages à plusieurs personnes en même temps et peut-être pouvoir faire une différence. »

Aussi, quand le pharmacien n’est pas derrière un comptoir (ou en voyage), il vulgarise et dessine… comme il peut. Et présente les résultats sur son blogue. « Sans être très bon, j’ai découvert que j’étais capable de dessiner, alors j’ai poursuivi dans cette lancée. » Son trait de crayon et le ton adopté par Le Pharmachien rappellent ceux du dessin animé américain South Park duquel il dit s’inspirer largement.

Il s’attaque à la quête du naturel, au marketing pharmaceutique, à l’« hyperscience » dans les médias, aux dernières modes santé comme le régime sans gluten, aux suppléments protéinés, etc. « Quand les gens entendent ou lisent une nouvelle, ils doivent se questionner. » Un aliment considéré miraculeux peut devenir suspect et vice-versa, souligne-t-il. On le voit actuellement avec le gras notamment. La science et les connaissances évoluent.

« C’est donc dangereux pour le public de partir sur une chose, une mode, sans nuances. » — Olivier Bernard, alias Le Pharmachien

Olivier Bernard propose plus qu’une simple mise en garde : il « anéantit les pseudosciences » et « cherche à mettre fin aux mythes scientifiques et médicaux ». Il passe notamment au tordeur les homéopathes, naturopathes, coachs de vie, maîtres Reiki et autres acteurs du « côté obscur des soins ». Il vise juste, semble-t-il. Le succès de son blogue a rapidement fait boule de neige. Il compte plus de 62 000 fans Facebook… et plusieurs ennemis !

AMORCER LA RÉFLEXION

Il n’a d’ailleurs pas l’ambition de convaincre les gens fortement persuadés du pouvoir des esprits cosmiques et les adeptes des théories de conspiration. « Je m’adresse à monsieur et madame Tout-le-Monde qui a un intérêt pour la santé, qui manque d’information et qui hésite, à la personne qui est sur la clôture et qui ne sait pas de quel côté sauter. J’aime penser que je peux permettre d’amorcer une réflexion plus critique sur certains sujets. »

Le livre adopte le même ton irrévérencieux que le blogue. Olivier Bernard réunit d’ailleurs des thèmes déjà explorés, en plus d’inédits. Les fans ne seront pas dépaysés. « C’est une drôle d’expérience pour moi de publier un livre. Je n’ai aucune idée de l’accueil que me réservera le public. Est-ce que les gens vont me suivre ? Si ça marche bien, c’est clair que je serai motivé à en faire un deuxième totalement différent, dans un autre style. J’ai déjà des idées, j’ai une surabondance d’idées. Mon défi est plutôt de choisir ce dont je veux parler et de me fixer des priorités. »

Internet Le Pharmacien

Qui est-il ?

Nom : Bernard Olivier

Âge : 33 ans

Lieu de naissance : Beauport

Habite : Montréal

Diplôme : maîtrise en pharmacogénétique

Emploi : pharmacien indépendant à temps partiel (fait des remplacements partout en province)

Caractéristiques : « nerd assumé », « fier introverti », « créatif »

Nom de son chien : Abby

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