Procès de Lise Thibault

« J’AI SIGNÉ MON ARRÊT DE MORT »

Lise Thibault affirme avoir précipité sa propre chute en signant, en 2007, le décret qui autorisait l’enquête sur ses dépenses. Contrairement à ce qu’elle avait elle-même demandé, le décret autorisait une vérification sur sept années de mandat, plutôt que sur la dernière année seulement. « Je me suis dit : “un an ou sept ans, il n’y a pas de différence, je suis restée la même”. » Le premier ministre Jean Charest était à ce moment tellement préoccupé par la période électorale qu’elle a préféré ne pas l’accabler avec ce détail. « J’ai signé mon arrêt de mort. » L’ex-lieutenant-gouverneur a évoqué plusieurs épisodes plus sombres de son mandat, hier, notamment son divorce d’avec René Thibault, en 2001. « Se divorcer, quand on est lieutenant-gouverneur, c’est encore pire que quand on est simple citoyen, parce que les juges abusent de nous », a-t-elle commenté, sans donner de détails. Mme Thibault soutient que son divorce lui aurait coûté environ 70 000 $. L’experte-comptable de la poursuite, Jacinthe Senneville, a établi que Patrimoine canadien a remboursé à l’ex-lieutenante-gouverneure une facture de près de 38 000 $ présentée par les avocats chargés de son divorce.

— Isabelle Mathieu, Le Soleil

Procès de Lise Thibault

Des pauses-café « officielles » au Tim Hortons

Tout était activité officielle pour Lise Thibault. Même une pause-café chez Tim Hortons. « Les gens qui me rencontraient ne donnaient pas la main à un client, mais au lieutenant-gouverneur, fait-elle valoir. C’était officiel. »

À la barre des témoins pour la troisième journée de son procès pour fraude et abus de confiance, Lise Thibault a insisté sur le fait qu’à ses yeux, chacune de ses sorties était une activité officielle. Même une virée à la cabane à sucre avec les seuls membres de sa famille. « Dans cette cabane à sucre là, il y avait d’autres personnes », insiste-t-elle.

Son agenda ne témoigne pas de tout ce qu’elle faisait dans une journée, assure Lise Thibault, et surtout pas du travail de bureau. L’ex-lieutenant-gouverneur affirme qu’elle s’astreignait à lire huit journaux par jour.

« Et pas lire un journal comme un citoyen ordinaire lit le journal, mais comme un chef d’État lit le journal. »

— Lise Thibault

La charge de travail était telle, affirme Mme Thibault, qu’il lui arrivait de travailler deux heures en pleine nuit pour ne pas prendre de retard.

Lise Thibault a répété qu’elle se fiait aux gens avec qui elle travaillait pour le « débroussaillage » des factures. Elle signait le certificat officiel pour les réclamations à Patrimoine canadien « parce que c’était un formulaire, tout simplement ».

Des fonctionnaires de Patrimoine canadien sont venus expliquer durant le procès que ce certificat était un document essentiel pour le gouvernement, parce qu’il attestait que les frais réclamés étaient liés à l’exercice des fonctions de lieutenant-gouverneur.

UNE AMBIANCE PLUS CONVIVIALE QUE CELLE D’UN HÔTEL

Lise Thibault évoque avec bonheur la maison de son garde du corps Guy Hamelin, à Beaupré, où elle a vécu de 2003 à 2007, dans une ambiance bien plus conviviale que celle d’un hôtel, dit-elle. Elle affirme que le loyer, qui a varié de 600 à 800 $ par mois, était payé à même ses allocations provinciales.

Pourtant, une haute fonctionnaire de Patrimoine canadien a expliqué lors du procès que la location de la maison avait été remboursée par son ministère, même si, selon elle, la dépense prêtait flanc à la contestation.

Lise Thibault a toujours trouvé normal de payer les repas de ses gardes du corps, même si ceux-ci touchaient une indemnité journalière. « J’aurais trouvé ça très inélégant que la vice-reine demande deux factures », a-t-elle souligné.

Il était d’autant plus pertinent de les inviter « quand je pense à tout ce qu’ils faisaient pour moi en raison de mes limitations », ajoute Mme Thibault. « Sa Majesté aurait fait la même chose », conclut-elle.

Le contre-interrogatoire de Lise Thibault par le procureur de la Couronne Me Marcel Guimont devrait s’amorcer aujourd’hui.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.