LIVRE HALTE À LA SURCHAUFFE !

« Ce livre est un appel à l’action. David Suzuki y partage avec nous les plus récentes avancées des savants sur la question du climat, mais surtout, il trace des pistes concrètes pour créer un monde plus sain et plus juste pour toutes et tous. »

Livre Halte à la surchauffe !

Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ?

Avec l’accélération du changement climatique qui menace l’avenir même de l’humanité, nous aurons besoin d’une véritable révolution pour renverser la vapeur.

L’ampleur des épreuves et des sacrifices qui s’annoncent dépendra de notre détermination, de notre rapidité d’action et de la portée des solutions que nous mettrons en œuvre. En appliquant le plus judicieusement possible un vaste ensemble de mesures, nous parviendrons peut-être à bâtir un monde plus sain, plus écologique et plus juste.

Les solutions à privilégier sont celles qui permettront de renoncer le plus rapidement possible aux combustibles fossiles.

Il est essentiel de conserver l’énergie et de continuer à développer les énergies vertes. À cet égard, les technologies qui apparaissent les plus porteuses et connaissent l’essor le plus fulgurant sont l’éolien et le solaire, mais la géothermie, l’énergie marémotrice et certains types d’hydraulique peuvent aussi jouer un rôle important. Les biocarburants sont prometteurs, mais seulement si leur production n’accapare pas de terres normalement destinées à la culture d’aliments. […]

Mais les autres facteurs déterminants du changement climatique, eux, semblent plus complexes à traiter. Comment réduire la dépendance à l’automobile individuelle ? Les véhicules écoénergétiques ou électriques sont-ils une voie d’avenir ou ne font-ils qu’enfermer le monde dans la culture délétère de l’automobile ? Que faire de la source majeure d’émissions qu’est l’agriculture ? Certains prônent un recours accru aux méthodes industrielles et aux organismes génétiquement modifiés, tandis que d’autres recommandent plutôt de miser sur la production locale et de travailler de concert avec la nature, en pratiquant entre autres l’agroécologie.

Il est difficile de s’entendre sur les meilleures façons de s’attaquer au réchauffement planétaire, mais on n’a guère d’autre choix que d’en discuter et de les étudier ; ce faisant, on s’approche d’une solution. Par contre, il ne faut pas se limiter à cela. Il faut maintenant agir. Nous devons cesser de nous tenir à l’écart en attendant que le gouvernement et l’industrie fassent le nécessaire, surtout depuis qu’un président et un parti climatosceptiques ont pris le pouvoir aux États-Unis, pays dont la participation aux mesures de protection du climat est essentielle pour le monde entier.

Même dans les circonstances idéales, les gouvernements bougent lentement. Il ne faut pas compter sur eux pour amorcer des transformations qui s’imposent cruellement. 

C’est nous qui devons incarner le changement. Oui, nous avons du pain sur la planche, mais il ne faut pas baisser les bras. Nous avons peut-être même une belle occasion à saisir, bien qu’elle soit semée d’embûches. L’élection présidentielle de 2016 aux États-Unis a certes mis au jour des aspects peu reluisants de la société américaine, mais elle a aussi révélé une insatisfaction profonde, de plus en plus marquée, à l’égard du statu quo. Il y a de bonnes raisons à cela. Le fossé entre riches et pauvres ne cesse de s’élargir, la mondialisation et les incessantes innovations technologiques ont multiplié les laissés-pour-compte d’un système économique dépassé, le racisme s’affiche au quotidien dans les médias sociaux et à la télévision, les normes éducatives se sont affaiblies, les médias traditionnels sont en déclin, la guerre et la violence persistent, et les effets du changement climatique s’aggravent chaque jour.

Ce n’est pas en jetant de l’huile sur le feu qu’on réglera ces problèmes. C’est pourtant ce qu’ont fait de nombreux Américains en 2016. Ceux et celles d’entre nous qui croient en un avenir meilleur doivent maintenant tenter de maîtriser l’incendie sans étouffer la flamme. Malgré l’engagement pris par Donald Trump de renverser tous les progrès accomplis jusqu’ici en matière de protection de l’environnement et du climat, rien ne pourra arrêter la vague. Chaque année depuis 2010, les énergies renouvelables ont supplanté les combustibles fossiles dans les choix d’investissement, et l’écart va croissant. Des États et des villes des États-Unis fixent un prix au carbone et investissent dans les énergies vertes et le transport en commun, le prix des véhicules électriques devrait être comparable à celui des véhicules à essence vers 2022, et le mouvement mondial contre le changement climatique n’est pas à la veille de s’essouffler.

L’histoire montre que, lorsqu’ils parlent haut et fort, les défenseurs des peuples et de la planète sont entendus. C’est pourquoi nous devons faire tout notre possible pour léguer un monde habitable aux générations futures, si c’est là ce que nous souhaitons.

Même si les gouvernements, l’industrie et les autres institutions doivent prendre les devants, chacun de nous peut apporter sa contribution. Chacun de nous peut, à sa façon, se joindre au mouvement en plein essor qui réclame un avenir meilleur pour l’humanité entière, et non pour le seul 1 %.

La reconnaissance du discours scientifique sur le réchauffement planétaire et la mise en œuvre des mesures nécessaires pour éviter une hausse importante des températures ouvriraient la voie à d’immenses possibilités. L’étape la plus fondamentale à franchir consiste à décider de réduire les émissions : tant qu’on n’aura pas commencé à le faire, on ignorera quelles occasions se présenteront.

En 1961, quand le président John F. Kennedy a déclaré que les États-Unis enverraient des astronautes sur la Lune en toute sécurité dans un délai de dix ans, personne ne savait comment ils allaient s’y prendre. Étonnamment, non seulement le pays a atteint son objectif avant la fin de la décennie, mais des centaines de retombées inattendues en ont découlé, dont l’ordinateur portable, le téléphone cellulaire, le GPS, le thermomètre auriculaire à infrarouge et la couverture isothermique. Tout comme les défenseurs du programme Apollo mondial de lutte contre le réchauffement planétaire, j’ai la conviction qu’il se produira la même chose quand nous aurons entrepris d’éviter la catastrophe climatique.

L’accord de Paris a démontré que plusieurs chefs d’État prennent l’enjeu du réchauffement planétaire au sérieux. Des gens de tous les milieux apportent des changements à leur mode de vie, cherchent des solutions et rejettent le statu quo. Une révolution commence.

Il arrive qu’une catastrophe soit nécessaire pour que les choses changent. Quand des citoyens ne peuvent plus respirer, comme c’est souvent le cas dans certaines villes de Chine et du Mexique, les gouvernements n’ont d’autre choix que de s’attaquer au problème.

Mais le progrès est aussi tributaire des plus beaux aspects de la nature humaine. 

Quiconque se soucie de l’avenir de l’humanité et de la planète a le pouvoir et le devoir de s’exprimer avec plus de force que ceux qui veulent maintenir le monde dans une spirale destructrice. En nous tenant debout et en prenant la parole, nous pourrons faire de cette petite planète bleue et de ses miraculeux systèmes biologiques et naturels un lieu où il fera bon vivre, pour tous.

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