RÉDUCTION DES GAZ À EFFET DE SERRE

Québec « n’a rien en place » pour atteindre ses cibles, déplore un scientifique

Le gouvernement du Québec s’est attiré des éloges pour ses ambitieuses cibles de réduction de gaz à effet de serre. Le hic : il n’y a « absolument rien en place » pour les atteindre. Et la province doit rapidement créer un institut scientifique capable d’identifier les meilleures mesures à implanter.

C’est le message que lance le physicien et ancien coprésident de la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, Normand Mousseau.

« Les cibles du Québec sont hallucinantes, mais on n’a absolument rien en place pour y parvenir, a dit M. Mousseau en entrevue à La Presse. On n’a même pas les capacités, au Québec, de faire de la modélisation et d’étudier les conséquences des choix qui s’offrent à nous. »

Le gouvernement québécois s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % d’ici 2020 et de 37,5 % d’ici 2030 à partir des niveaux de 1990. Le dernier inventaire, qui date de 2012, indique que les émissions au Québec ont diminué de 8 % depuis 1990. Mais les projections du Ministère montrent que sans effort additionnel, les émissions du Québec resteront stables jusqu’en 2030, puis recommenceront à augmenter.

« Le défi n’est pas d’atteindre les cibles, dit M. Mousseau. Demain matin, je peux enlever les trois quarts des voitures sur les routes et ça va être fait. La question, c’est comment le faire en générant les meilleures retombées sur le développement économique et la qualité de vie. »

C’est là qu’entre en jeu l’institut qu’il voudrait créer, et dont la mission serait « d’accompagner » le gouvernement dans l’atteinte des cibles de réduction. Selon Normand Mousseau, Québec ne possède ni l’expertise ni les outils nécessaires pour faire les meilleurs choix de réduction.

Concrètement, l’institut jouerait trois rôles. D’abord, tester plusieurs mesures de réduction avec des outils de modélisation pour évaluer leurs coûts et leurs impacts. Ensuite, documenter quelles mesures prises à l’étranger ont conduit aux meilleurs résultats. Puis, étudier l’acceptabilité sociale des mesures proposées.

Le physicien dit s’inspirer du consortium Ouranos, créé en 2001 par le gouvernement du Québec et d’autres partenaires afin évaluer les impacts des changements climatiques.

« L’idée est d’appuyer l’ensemble du gouvernement pour s’assurer que tous les investissements, autant dans les transports que les municipalités, sont intégrés au plan de réduction », explique-t-il.

Selon lui, les investissements du fédéral en infrastructures qui sont attendus bientôt rendent un tel institut d’autant plus nécessaire.

Normand Mousseau admet avoir recueilli peu d’appuis jusqu’à maintenant. Gaz Métro a confirmé à La Presse avoir « montré un intérêt » pour son projet.

« C’est en étudiant de multiples scénarios qui offrent des chemins différents vers le même but qu’on offrira aux politiciens et au public des choix réels quant à notre avenir », dit Normand Mousseau.

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