Télévision

Petites et grandes victoires sur le TDAH

Le TDAH, ou trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, est à la mode. Entre ceux qui en parlent comme le mal du siècle et ceux qui nient pratiquement son existence, plusieurs considèrent qu’on saute vite sur le Ritalin au moindre écart de comportement.

Dommage que le débat nous détourne de la détresse bien réelle vécue par les personnes qui en sont atteintes. Et elles sont nombreuses : au Québec, 60 000 enfants et 270 000 adultes sont touchés. Dans sa nouvelle minisérie documentaire intitulée TDAH mon amour, diffusée à Télé-Québec le lundi à 21 h dès le 26 octobre, Claire Lamarche fait abstraction des polémiques autour du phénomène pour mieux s’intéresser aux gens qui le vivent au jour le jour, tous différemment, et qui s’en sortent. Trois épisodes, trois catégories d’âge : chez l’enfant (26 octobre), l’adolescent (2 novembre) et l’adulte (9 novembre).

Le parcours est difficile, mais l’issue est positive. Particulièrement touchant de voir dans l’épisode sur l’adolescence un Alexandre Sampson, 17 ans, qui ne l’a pas eue facile, et que les médicaments ont éteint. Au point de tomber en dépression. En quatrième secondaire, il se met à consommer, jusqu’à la surdose. Convulsions, arrêt respiratoire, Alexandre passe à un cheveu de mourir. Son père a un choc en entendant son fils lui dire à son réveil : « Moi, mourir, ça me dérange pas. »

La suite est plus heureuse. Alexandre ira à Portage, un centre pour toxicomanes, d’où il sortira avec l’impression d’avoir réussi quelque chose, de s’être senti utile pour la première fois de sa vie. Un moment qu’il raconte avec une étonnante lucidité. Son père dira que la marginalité de son fils, d’abord vue comme une nuisance, l’a plutôt propulsé vers l’avant. On ne peut qu’applaudir.

Voilà un cas où la médication n’a pas été un succès. Jean-Philippe Leduc-Gaudet, lui, a vu ses notes passer de 30 à 90 % grâce aux médicaments, assez pour terminer une maîtrise à l’université. Mais on est parti de loin : délinquant à l’adolescence, il provoquait des accidents de voiture. Maintenant, l’exercice quotidien lui permet d’éloigner l’anxiété. Et à 27 ans, il ne saurait plus se passer de ses médicaments, comme un diabétique de son insuline.

D’autres choisissent de refuser les médicaments, tout comme les drogues. C’est le cas de Christopher Bard, 15 ans, chez qui on a décelé un TDAH dès la maternelle. Compréhensifs, ses parents ont accepté qu’« il ne pète pas des scores » à l’école. Sa mère dit même être certaine que son fils n’ira pas à l’université. Mais elle l’aide constamment à faire ses devoirs, surtout les jours où « Christo » a passé l’après-midi dans la lune, ou dans ses chansons.

La musique a servi d’exutoire à Alexandre et Christopher, tous deux très talentueux comme vous le verrez. Hyperactif, Christopher jouait de la batterie sur son bureau avec ses crayons et dérangeait toute la classe. Mettez-lui une batterie ou une guitare entre les mains, et il saura quoi faire. Vous le verrez conclure le second épisode avec son groupe rock, dans un numéro qui sonne comme une grande victoire.

Coproductrice avec Claire Lamarche et Valérie Bissonnette, Stéphanie Couillard dit n’avoir eu aucune difficulté à convaincre les gens de témoigner de leur situation.

« Ces personnes-là ont envie de crier : “Croyez-moi, je souffre !” »

— Stéphanie Couillard, coproductrice de TDAH mon amour

Stéphanie Couillard ajoute qu’on sait finalement peu de choses sur le TDAH même si on en parle beaucoup.

Tournée avec beaucoup d’humanité, TDAH mon amour permet certainement de mieux comprendre ce mal qui afflige tant d’enfants, mais aussi d’adultes, qui découvrent souvent qu’ils ont eux-mêmes un TDAH quand leur enfant reçoit le diagnostic, ce qui explique bien des choses. On peut facilement comprendre à quel point le trouble du déficit de l’attention vient accentuer les comportements d’un adolescent en pleine période charnière, affectant sa capacité d’évaluer le danger.

En regardant la série, on constate à quel point l’école peut représenter un enfer pour un élève vivant avec un TDAH et qui n’est pas traité adéquatement. Quand lire un livre représente une mission impossible, et qu’on peut mettre un temps fou à finir un travail parce qu’il faut relire cinq fois les questions pour s’assurer de les comprendre, comment ne pas appeler ça un enfer ?

Claire Lamarche, qui nous avait déjà donné les excellentes séries documentaires Soins intensifs (sur le milieu de la santé) et Écoles à l’examen (sur le milieu scolaire), commencera prochainement le tournage de trois documentaires distincts, dont un sur le monde policier et un autre qui fera écho à Soins intensifs, pour la prochaine année à Télé-Québec.

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