Filature de Julie Snyder
Garda devra dévoiler l’identité de « John Doe »
La Presse
La Cour supérieure a ordonné hier à la firme de sécurité Garda et à son enquêteur Claude Viens de communiquer à Julie Snyder l’identité de « John Doe », l’individu ou l’entreprise qui a fait prendre l’animatrice en filature à l’aéroport de Québec le 26 juin dernier. Ils ont 48 heures pour s’exécuter.
Le juge Paul Mayer s’est rendu aux arguments des procureurs de l’animatrice en fin de journée, ordonnant également à Garda et à M. Viens de cesser toute forme de filature ou de surveillance à l’endroit de M
Snyder pour les 10 prochains jours. « M Snyder subit un préjudice sérieux auquel il est urgent de mettre fin », a justifié le magistrat.« Aucun motif sérieux ne semble justifier la filature », a-t-il ajouté. « M
Snyder a le droit que la détresse psychologique [provoquée par la filature] cesse. La violence vient du fait que John Doe n’a pas comparu. Il ou elle se cache. Il ou elle n’a pas donné d’explications. »La décision pourrait être portée en appel par Garda ou « John Doe », mais leurs avocats n’ont que 48 heures pour obtenir un jugement bloquant l’ordonnance.
Selon les clauses de l’ordonnance, l’identité de « John Doe » sera transmise à M
Snyder seulement. La décision de la rendre publique, ou non, reviendra à elle. « Nous ne sommes pas certains de la position que nous allons prendre. S’il y a des procédures judiciaires [intentées contre « John Doe »], ça va inévitablement devenir public », a précisé son avocat, M Mathieu Piché-Messier, à sa sortie de la salle d’audience. Les avocats de M Snyder ont notamment évoqué en cour la possibilité d’entreprendre un recours contre « John Doe » pour atteinte à la vie privée de leur cliente, mais ont dit avoir besoin de connaître son identité pour « poursuivre la bonne personne ».« Ma cliente est extrêmement contente. La cour vient de démontrer l’atteinte à la vie privée [provoquée par la filature] et qu’il faut que ça cesse immédiatement. »
— M
Mathieu Piché-Messier, avocat de Julie SnyderEn cour, l’avocate de Garda a soutenu que les agences d’enquête privées seraient durement touchées par une décision ordonnant la divulgation de l’identité de « John Doe » puisqu’elles ont « une obligation de confidentialité absolue » à l’égard de leurs clients. « C’est toute une industrie qui souffrirait d’une divulgation sur la base d’une preuve ténue », a insisté M
Céline Tessier.L’argument a été rejeté par le juge Paul Mayer. Rien dans la loi n’accorde aux agents d’investigation privés le privilège du secret professionnel. « La Loi sur la protection des renseignements ne peut être invoquée », a-t-il dit. Richard Marrier, président de la firme d’enquête Canaprob, indique toutefois que les clients d’agences d’investigation protègent généralement leur identité derrière leur avocat lorsqu’ils demandent une filature. « Ce sont les avocats qui donnent les mandats. Les enquêteurs privés ne sont pas tenus au secret professionnel, mais les avocats, eux, le sont », résume-t-il. En l’occurrence, seul le nom de l’avocat ou de l’avocate de « John Doe » pourrait être transmis à M
Snyder, estime-t-il.M. Marrier estime que la décision du juge Mayer « fait mal » à l’industrie de l’enquête privée. « Mais en même temps, les cas de surveillance domestique sont loin d’être l’essentiel de notre travail. Plus de 80 % de nos clients sont des entreprises ou des organismes qui nous font enquêter sur des cas de fraude », dit-il. « Ça ne changera pas beaucoup la business. »