rémunération des hauts dirigeants

Envisageable, la taxe « glouton » ?

Un gouvernement péquiste mettrait en place à la troisième année de son mandat une taxe « glouton » sur la rémunération totale des hauts dirigeants d’entreprises. Est-ce la bonne formule pour freiner la flambée des salaires ? Et cette mesure est-elle applicable ? La Presse a recueilli les commentaires de spécialistes et du Conseil du patronat du Québec.

Le Parti québécois explique sa taxe « glouton » ainsi : « Le salaire moyen, au sein d’une entreprise publique, sera comparé à la moyenne des cinq plus hauts revenus. Si le résultat des hauts salaires est plus de 30 fois supérieur, l’entreprise devra payer la “taxe glouton”, soit un pourcentage appliqué sur la portion des salaires des cinq plus hauts dirigeants excédant la norme des 30 fois. »

« Pour donner le temps aux entreprises de changer leurs pratiques, explique le Parti québécois, la mesure ne s’appliquera qu’à la troisième année de notre mandat, à un taux de 10 %. À partir de la quatrième année, le taux sera de 25 %. »

Nicolas Marceau a apporté quelques précisions par courriel à la demande de La Presse. Selon lui, la mesure est applicable, parce que la rémunération des patrons des sociétés cotées en Bourse est déjà publique. Ce serait Revenu Québec qui aurait la responsabilité d’appliquer cette mesure.

Nicolas Marceau précise que le Parti québécois ne veut pas imposer de plafond salarial et laisser le choix aux entreprises. Mais si elles n’optent pas pour la modération, elles devront payer une taxe spéciale. Est-ce que cette mesure suffirait à stopper la flambée des salaires des hauts dirigeants ? « Ça va envoyer un message clair, et ceux qui ne veulent pas s’y conformer devront débourser », écrit-il par courriel.

STOPPER LA FLAMBÉE

Le spécialiste Jean-Pierre Ouellet, ex-associé chez Stikeman, ex-premier vice-président du CN et ex-vice-président du conseil de RBC Marchés des Capitaux, croit depuis longtemps qu’il faut s’attaquer à la croissance démesurée de la rémunération des hauts dirigeants, dont les performances n’ont pas nécessairement suivi une croissance d’amélioration exponentielle.

« Il y a des actionnaires institutionnels qui commencent à s’insurger contre les hausses des salaires complètement disproportionnées, complètement injustifiées. C’est scandaleux, a-t-il dit lors d’une entrevue téléphonique avec La Presse. Pour que la mesure du Parti québécois soit applicable, il faudrait toutefois qu’elle soit adoptée par les deux paliers de gouvernement, le provincial et le fédéral. Si toutes les provinces s’entendaient, oui, ce serait une mesure assez efficace. »

Élargir la mesure

Le professeur Michel Magnan, titulaire de la chaire de gouvernance d’entreprise Stephen A. Jarislowsky de l’Université Concordia, soutient que la fiscalité peut jouer un rôle dans la compression ou la réduction de croissance des rémunérations au sein d’une société. Or, il faudrait élargir la mesure proposée par le Parti québécois à toutes les professions.

« C’est le rôle de l’impôt de réduire ces inégalités, mais encore doit-il être appliqué de manière uniforme et équitable, dit-il. De plus, viser uniquement les entreprises privées québécoises pourra encore réduire la place du Québec au sein des marchés financiers et boursiers canadiens, certaines sociétés choisissant possiblement de se privatiser pour échapper à cette règle. »

Le Conseil du patronat du Québec abonde aussi dans le même sens.

« Je suis toujours fasciné comment on cible vite les gens du milieu des affaires, a affirmé Yves-Thomas Dorval, président du Conseil du patronat du Québec, en entrevue avec La Presse. Si on parle des hauts taux de revenu, il y a aussi les artistes, les athlètes, les joueurs de hockey. Est-ce que leur salaire est correct par rapport à l’ensemble des employés qui travaillent au sein d’une équipe ? Par exemple, avec celui qui passe la Zamboni ? »

L’argument des sièges sociaux

Le Conseil du patronat du Québec souligne au passage que le nombre de contribuables qui gagnent 250 000 $ et plus par année au Québec représente 0,7 %, selon les statistiques publiées en 2014 par le ministère des Finances. Il ajoute que ces contribuables payent 17 % de l’ensemble des impôts.

« On a déjà dit que dépassé 49 % de taux marginal d’imposition, c’était déjà limite, soutient Yves-Thomas Dorval. On est rendu à 53 %. On ne peut pas penser qu’on va bâtir une économie en punissant les gens qui gagnent de très hauts salaires. Tout ce qu’on va faire, c’est d’amener les gens à s’établir ailleurs. Les sièges sociaux vont aller s’établir ailleurs. »

L’argument du déménagement des sièges sociaux, souvent évoqué, ne tient pas la route, selon le spécialiste Jean-Pierre Ouellet.

« Le siège social d’Air Canada est à Montréal de par la loi fédérale qui l’a privatisé, explique-t-il. La même chose pour le CN. Les banques, c’est pareil. Je vois mal comment Bell, Vidéotron et Cogeco déménageraient leurs sièges sociaux. Tandis que Bombardier, je crois qu’il y penserait deux fois, parce qu’à chaque cycle économique, il retourne voir le gouvernement pour se faire aider. »

— Avec Hugo Pilon-Larose, La Presse

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Les entreprises comptent trop sur la faiblesse du dollar

Accros à la faiblesse du dollar, les entreprises canadiennes de tous les secteurs d’activité ont négligé les investissements nécessaires pour mieux affronter la concurrence. Plusieurs d’entre elles sont donc devenues plus vulnérables si l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) disparaissait ou si de nouvelles barrières tarifaires apparaissaient. 

C’est la conclusion que tire une étude du Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal qui a analysé la compétitivité des entreprises entre 2000 et 2014.

« Les entreprises se sont trop longtemps réfugiées derrière un taux de change favorable pour faire des affaires aux États-Unis », conclut l’équipe de chercheurs. Plus de 75 % des exportations canadiennes sont destinées au marché américain.

L’étude constate que dans la majorité des secteurs, la plupart des entreprises ont fait des gains de productivité au cours de la période, quand on les compare aux entreprises américaines.

En tenant compte de l’évolution du taux de change, le portrait n’est toutefois plus le même.

« Une fois les coûts de production ajustés pour tenir compte de l’évolution du taux de change, les gains sont devenus des pertes », explique Robert Gagné, directeur du Centre sur la productivité et coauteur de la recherche.

Au total, la compétitivité de l’économie canadienne (définie comme la capacité de faire face à la concurrence) a reculé de 16,7 % entre 2000 et 2014, ont mesuré les chercheurs.

Certains secteurs d’activité ont mieux fait que d’autres, mais dans l’ensemble des 34 groupes industriels examinés, seulement trois ont réellement amélioré leur compétitivité comparativement à leur équivalent américain. Il s’agit de l’agriculture, de la fabrication de papier et de la fabrication de produits en bois.

Le recul le plus important a été observé dans le secteur informatique et électronique, où les entreprises canadiennes ont perdu l’avance qu’elles ont déjà eue sur leurs concurrents américains.

Une béquille

La faiblesse du dollar a aidé les entreprises à augmenter leurs exportations, sans effort de leur part pour augmenter leur productivité. Malgré les efforts consentis au cours des années par les gouvernements pour aider les entreprises, le dollar canadien a continué d’être une béquille en cas de coup dur. Il devrait d’ailleurs continuer de jouer ce rôle si l’ALENA disparaissait.

En pleine renégociation des accords commerciaux avec les États-Unis, l’amélioration de la productivité des entreprises canadiennes devrait être la priorité, résume l’étude. « Les entreprises canadiennes doivent plus que jamais éviter de se réfugier à nouveau derrière la faiblesse du dollar canadien. »

Départ du patron du ministère des Finances

Le sous-ministre en titre du ministère des Finances du Québec, Luc Monty, a annoncé son départ à ses employés hier, a appris La Presse. Il quitte la haute fonction publique pour occuper un emploi à l’extérieur du gouvernement du Québec et dans un autre secteur d’activité. La nouvelle sera annoncée ce matin par communiqué. L’homme de 59 ans a travaillé au ministère des Finances du Québec pendant 32 ans, sous des ministres aussi divers que Bernard Landry, Monique Jérôme-Forget et Carlos Leitão. Il occupe le poste de plus haut fonctionnaire aux Finances (sous-ministre en titre) depuis sept ans, période durant laquelle le Québec a retrouvé l’équilibre budgétaire. La vérificatrice générale concluait, dans son dernier rapport (sur le rapport préélectoral), que « les prévisions économiques ainsi que les prévisions du cadre financier et de la dette sont plausibles dans tous leurs aspects significatifs ». Luc Monty restera en poste pour assurer la transition jusqu’à la venue du prochain gouvernement, peu importe le parti qui prendra le pouvoir. Son nouvel emploi sera dans la région de Québec. — La Presse

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Le nouveau Sinorama se fait hara-kiri

Le nouveau voyagiste portant le nom de Sinorama n’aura pas fait long feu. L’entreprise a été dissoute le lundi 10 septembre, à peine un mois après avoir vu le jour. Baptisée Voyages NGH Sinorama, l’entreprise avait été constituée en société le 9 août, deux jours après que Vacances Sinorama a vu son permis révoqué par l’Office de la protection du consommateur (OPC). Lundi, au registre des entreprises, elle a déposé son certificat de dissolution. Voyages NGH Sinorama était détenue par Qiang Wang. L’homme d’affaires, qui se fait appeler John Wang, est président d’une agence de voyages et de tours d’autocars située à Markham, dans la région de Toronto, appelée New Golden Horse Tours (NGH). La Presse avait pris connaissance de cette nouvelle entité le 21 août, puis fait des appels dans les jours suivants à Toronto pour avoir des détails, mais sans succès. L’article sur la nouvelle NGH Sinorama a paru samedi dernier, le 8 septembre, dans La Presse+. — Francis Vailles, La Presse

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Les syndiqués de Postes Canada se dotent d’un mandat de grève

Les travailleurs de Postes Canada ont donné le feu vert à leur syndicat, hier, pour déclencher une grève d’ici à la fin du mois. Les membres du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) se sont prononcés massivement en faveur d’un débrayage lors d’un vote qui s’est conclu dimanche. Le syndicat affirme que près de 94 % des facteurs en milieu urbain ont voté pour un arrêt de travail, comparativement à 96 % des facteurs en banlieue et en région rurale. La date limite pour parvenir à un accord a été fixée au 26 septembre. Le STTP indique que les enjeux majeurs de la négociation avec l’employeur sont la sécurité d’emploi, la rémunération de toutes les heures travaillées, les taux de salaire horaire et la garantie d’un nombre minimal d’heures de travail chaque semaine. — La Presse canadienne

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Le syndicat de Pages Jaunes dénonce le lock-out

Le président du syndicat des représentants aux ventes de Pages Jaunes dénonce le lock-out décrété contre ses 130 membres, lundi soir, qualifiant la décision de l’employeur d’« irréfléchie » et se disant stupéfait de l’annonce. Le syndicat croit que l’employeur cherche à diviser afin d’obtenir des concessions de la part des employés. Lundi, l’entreprise, dont le siège social est établi à Montréal, a déclaré qu’elle n’avait d’autre choix que d’imposer un lock-out, accusant la partie syndicale d’être inflexible. Pages Jaunes a annoncé en janvier un plan visant à supprimer environ 500 emplois au Canada afin de réduire ses dépenses et d’améliorer ses résultats financiers dans un contexte de baisse des revenus numériques et imprimés. La convention collective des représentants est échue depuis le 31 décembre. — La Presse canadienne

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