Un gars, une passion

Le message derrière une œuvre

Nicolas Des Ormeaux 

37 ans 

Passion : le recyclage créatif

Ville : Montréal

Il est sculpteur. Il fait des assemblages à partir de pièces et accessoires du quotidien qu’il trouve dans les poubelles et les ventes-débarras. Dans ce qui n’a plus aucune valeur pour la majorité des gens, Nicolas Des Ormeaux voit une horloge, un microphone ou une lampe. Au-delà de la création, il y a surtout un message bien plus grand, que l’artiste souhaite transmettre : nous consommons trop.

Musicien et membre fondateur du groupe eXterio, qu’il a quitté, il crée son premier objet en préparation du lancement d’un album. « Je me suis inspiré de David Bowie pour fabriquer un micro à partir d’un combiné téléphonique et un autre à partir d’un émetteur CB pour le chanteur. »

Puis, sur un chantier, celui qui gagne maintenant sa vie comme charpentier-menuisier met la main sur un imposant thermomètre industriel. Sans idée précise en tête, il le conserve jusqu’à ce qu’il lui trouve une seconde vie. Sa copine, artiste peintre, lui fait découvrir les arts visuels. Un voyage autour du monde lui fait constater la débrouillardise des habitants des pays en développement. Ses convictions de simplicité volontaire se précisent. Le musicien allait devenir artisan-récupérateur et le recyclage créatif (upcycling) allait tracer une ligne directrice dans son cheminement artistique.

PLUS QUE DU RECYCLAGE

« L’upcycling est l’action de récupérer une matière dont on n’a plus besoin pour lui donner une valeur ajoutée. Ça décrit exactement ce que je fais », explique l’artiste, pour qui le processus est guidé par une conscience écologique et sociale farouchement opposée à la surconsommation.

Son atelier, c’est l’ancien salon de son petit trois-pièces. « J’ai vidé le salon pour m’installer. Ça m’a donné de l’espace et du temps. Pas de télévision, c’est du temps pour sortir, aller marcher, trouver des objets et créer », calcule Nicolas Des Ormeaux.

L’INDÉPENDANCE DE L’ARTISTE

Il a beaucoup de plaisir à travailler dans cette pièce baignée de lumière naturelle où s’empilent des objets en attente d’être sauvés in extremis du chemin menant au terrain d’enfouissement. 

« Je ne me vois pas avoir une boutique et être obligé de produire. Je préfère être dépendant de ce que je trouve plutôt que d’être dépendant des gens qui achèteront mes œuvres. »

— Nicolas Des Ormeaux 

Tant mieux s’il conclut une vente, en ligne ou à l’occasion de l’une des nombreuses expositions auxquelles il participe (12 cette année seulement), mais au-delà de la sculpture qu’il présente à un client curieux, ce sont les valeurs derrière la création qui font sa fierté.

SUSCITER LA RÉFLEXION

En novembre, Nicolas Des Ormeaux présentera une première conférence à des élèves de 4e secondaire sur ses projets de recyclage créatif et les motivations derrière ses choix de simplicité volontaire. Il souhaite utiliser ses créations pour parler de développement durable, d’environnement et de surconsommation.

« C’est nouveau pour moi, une conférence, et c’est exactement là où je veux aller. Je veux consommer intelligemment et le moins possible et faire part de mon expérience aux autres. Mon processus doit être cohérent. » La présentation ne sera que de 90 minutes, mais il espère que l’idée progressera vers quelque chose de plus concret : « Je suis très à l’aise avec les jeunes et j’aimerais pouvoir faire des ateliers avec eux, les amener à travailler avec moi dans la création d’objets. »

Motivé par des convictions profondes, il souhaite sortir le recyclage créatif de l’ombre et encourager les gens à se questionner sur leurs habitudes de consommation. « Pourquoi ce ne serait pas cool de fabriquer soi-même une lampe à partir d’objets récupérés au lieu d’en acheter une neuve ? »

Soulever la question en utilisant ses créations comme matériel didactique dans un contexte ludique, avec des jeunes curieux et ouverts d’esprit, est probablement la plus belle occasion que peut espérer l’artiste. « J’ai fait beaucoup de choses que je ne pensais jamais faire dans ma vie… il n’y a rien de précis devant moi. La suite, je veux l’inventer. »

Le proliférateur

Au cœur du parc La Fontaine, l’œuvre publique conçue par le duo formé de Melsa Montagne et de Nicolas Des Ormeaux, couple dans la vie et artistes passionnés, rend hommage à Frédéric Back. Avec l’aide de la Ville de Montréal, ils ont transformé un arbre mort en une fronde capable de lancer des glands de chêne géants. Appelé Le proliférateur, cet arbre fêtera son premier anniversaire le 1er novembre.

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