Mon clin d'œil

Quand on regarde les performances du Canadien, de l’Impact et des Alouettes, on se dit que, finalement,

la Formule électrique, c’était pas si pire que ça.

OPINION

L’aide médicale à mourir, toujours un vrai choix ?

Cette option doit être accompagnée d’une politique globale de soins palliatifs assortie d’un financement adéquat

L’adoption de la loi sur l’aide médicale à mourir a fait beaucoup jaser et couler des litres d’encre. Que l’on soit pour ou contre, c’est désormais un choix pour tous les Québécois qui disposent d’un pronostic de fin de vie et qui sont aptes, jusqu’au moment de la mort, à consentir à recevoir l’injection mortelle.

Cette loi, et c’était l’annonce gouvernementale, ne peut toutefois pas être légitime sans être accompagnée d’une politique globale de soins palliatifs assortie d’un financement adéquat. Sans cela, le risque de dérapage est énorme.

J’ai eu le bonheur de travailler dans une maison de soins palliatifs. J’ai vu des gens arriver convaincus que, dans l’état avancé de perte de facultés physiques et de maladie dans lequel ils se trouvaient, ils n’avaient plus qu’à espérer mourir le plus rapidement, et sans douleur, possible.

J’ai vu ces mêmes personnes, une fois rassurées et soulagées, renouer avec des plaisirs simples : sentir l’odeur des fleurs, rire en famille, manger une fraise de saison, regarder les oiseaux par la fenêtre ou chanter dans un bain.

Une recette toute simple : un lieu paisible qui respire la vie, le respect complet des choix et de la dignité des personnes, du personnel et des bénévoles en quantité suffisante et quelques narcotiques efficaces et bien gérés.

Des petits moments d’éternité que la vie effrénée, la maladie et les routines hospitalières leur avaient fait oublier… Simple, mais malheureusement loin d’être accessible pour tous. Dans les faits, 69 % des Québécois n’ont pas accès aux soins palliatifs (Institut de la statistique du Québec, 2015).

Être malade, subir des traitements agressifs, ne plus reconnaître son corps décharné, perdre peu à peu ses capacités physiques et son autonomie et réaliser que l’on va devoir laisser nos proches poursuivre la vie sans nous est un enjeu majeur qui peut facilement devenir une « souffrance insupportable ».

Le personnel hospitalier, bien intentionné, mais débordé, n’est pas toujours suffisamment libéré pour accompagner cet acte comme il se doit et les familles sont parfois laissées à elles-mêmes sans intervenant social pour les accompagner… Attention, le personnel hospitalier et les gestionnaires sont compétents et humains, mais l’organisation des soins et les récentes compressions budgétaires dans le réseau ne leur permettent pas d’être les soignants disponibles et attentionnés qu’ils aimeraient être.

L’accès à l’aide médicale à mourir « entraîne le risque que celle-ci s’impose petit à petit au détriment des soins palliatifs ».

« Cette substitution serait facilitée par le fait que l’on propose au personnel médical une solution qui est beaucoup moins contraignante, plus facile à mettre en œuvre et qui sollicite beaucoup moins de moyens cliniques » (Jean-Frédéric Poisson, 2015).

Notre ministre de la Santé est sorti en grande pompe à l’automne 2015 pour annoncer un financement de 10 millions par année en soins palliatifs. Dans les faits, personnes n’a vu la couleur de cet argent qui n’a en fait même pas épongé les coupes monstres appelées « efforts de rentabilité », mais qui, dans les départements de soins palliatifs et en soutien à domicile, se traduisent par moins de personnel disponible et des critères d’admission aux services grandement resserrés.

Mourir n’est pas une maladie, être alité n’est pas devenir un fardeau ; sonner une infirmière pour avoir de l’aide ne doit pas donner l’impression d’être exigeant, et arrêter le temps pour vivre ses derniers moments en famille ne doit pas engendrer la culpabilité de priver ses proches de revenus de travail. Alors, la souffrance devient insupportable et l’aide médicale à mourir n’est plus un réel choix.

L’expérience en soins palliatifs, avec des soins adaptés, un milieu de vie agréable, un soutien psychosocial et spirituel et la présence des proches à chacun des moments où on en a envie, permet non seulement de franchir ce mur, mais de s’y reposer et apprécier le paysage une dernière fois… Et alors, de faire un vrai choix éclairé sur la façon dont on souhaite mourir dans la dignité.

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