Sports Finances

Le CH vaut 1,25 milliard US

À défaut d’une Coupe Stanley, le Canadien a la meilleure rentabilité de la LNH. La surenchère pour les équipes de sport professionnel fait monter la valeur du CH à 1,25 milliard US, selon Forbes. Une surenchère qui fera augmenter le prix des futurs Nordiques à au moins 600 millions US, selon des experts. Même à ce prix, Québecor se dit toujours intéressée.

Un dossier de Vincent Brousseau-Pouliot

Classement annuel Forbes

Champion de la rentabilité

Le Canadien de Montréal est en tête de la Ligue nationale de hockey (LNH) dans une catégorie : la marge de profit. Le Tricolore, qui vaut 1,25 milliard US, a généré une marge de profit de 39 % la saison dernière, selon l’étude annuelle du magazine Forbes sur les finances des équipes de la LNH.

92 millions US

Ce sont les profits (bénéfices d’exploitation) générés par le Canadien la saison dernière (2016-2017) sur des revenus de 236 millions US, selon Forbes. Il s’agit donc d’une marge de profit de 39 %, la plus élevée de la LNH, devant les Rangers de New York (38 %), les Maple Leafs de Toronto (36 %) et les Blackhawks de Chicago (26 %). Le CH se classe au deuxième rang des profits et des revenus, derrière les Rangers (profits de 94,1 millions sur des revenus de 246 millions), mais devant les Maple Leafs (profits de 76,4 millions sur des revenus de 211 millions). « Le prix des billets a énormément augmenté et le Canadien réussit quand même à avoir des amphithéâtres à pleine capacité », dit Philip Merrigan, professeur en économie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). 

1,25 milliard US

C’est la valeur du Canadien de Montréal, selon Forbes. Au taux de change actuel, l’équipe vaut 1,6 milliard CAN. Il s’agit d’une hausse annuelle de 12 %, soit la hausse moyenne dans la LNH la saison dernière, selon Forbes. En 2009, la famille Molson et ses partenaires minoritaires avaient acheté l’équipe de hockey, le Centre Bell et evenko pour 575 millions CAN.

Cinq raisons pour lesquelles le CH vaut aussi cher

La rareté des équipes dans les grands marchés

Au cours des dernières années, les investisseurs ont été prêts à débourser une prime importante pour acheter des équipes sportives dans des marchés économiques importants, comme la vente de 2,2 milliards des Rockets de Houston (NBA), en septembre. « Les marques les plus fortes dans les marchés les plus importants vont se vendre à des multiples [de profits ou de revenus] plus élevés que les autres équipes. Surtout au hockey, où les six équipes les plus riches font environ 70 % des profits de la ligue », dit Mike Ozanian, directeur de l’étude sur les finances de la LNH pour Forbes.

La bonne performance de la Bourse

Aux États-Unis, l’indice S&P 500 est à son plus haut niveau historique – ce qui influence indirectement à la hausse l’évaluation des équipes de sport professionnel. « Les gens [fortunés] font beaucoup d’argent à la Bourse et ils veulent diversifier leurs investissements, dit Mike Ozanian, de Forbes. L’évaluation des actions est très élevée actuellement [18 fois les profits aux États-Unis], les multiples sont élevés et ça influence l’évaluation de tous les types d’actifs, incluant les équipes de sport. »

Les finances de l’équipe

Le Canadien est deuxième dans la LNH pour les profits, et premier pour la marge de profit. « Ils font un excellent travail de gestion et d’intégrer des événements qui ne sont pas reliés au hockey dans l’amphithéâtre », dit Mike Ozanian, de Forbes.

Le rendement sur la glace

Les partisans attendent la Coupe Stanley depuis 1993. Sauf que depuis 10 ans, le CH offre tout de même une équipe relativement compétitive qui a participé aux séries huit fois sur dix. Le début de saison en dents de scie de l’équipe ne devrait pas nuire à sa valeur à long terme, « qui dépend de profits futurs étalés sur une longue période », selon l’économiste Philip Merrigan. « L’équipe a bien fait au cours des dernières années, mais elle doit être extrêmement vigilante, car les gens à Montréal sont plus sensibles qu’ailleurs aux performances. »

Le dollar canadien

Le dollar canadien a remonté en moyenne de 5 cents US durant la saison 2016-2017, pour un taux de change à 80 cents US. Comme le CH paie ses joueurs en dollars américains en raison de la convention collective, cette remontée du huard a aidé ses finances – comme celles de toutes les équipes canadiennes.

Devancé par Toronto

Pour la troisième année, les Rangers de New York sont l’équipe du circuit Bettman qui vaut le plus cher : 1,5 milliard US, en hausse de 20 %. Mais les Maple Leafs de Toronto ont dépassé le CH au deuxième rang, avec une valeur de 1,4 milliard, en hausse de 27 %. Au cours de la dernière année, Toronto a conclu une entente de 32 millions par année pour 20 ans avec la Banque Scotia pour les droits d’identification de leur amphithéâtre. Il s’agit de l’entente la plus lucrative à cet effet dans la LNH, devant les Rangers de New York (30 millions/an). C’est essentiellement en raison de ce nouveau contrat que Toronto a devancé Montréal.

Pas de pertes au Canada

Huit équipes – toutes américaines – ont perdu de l’argent en 2016-2017, dont l’Arizona (-19 millions), Buffalo (-13 millions) et la Floride (-11 millions). Les sept équipes canadiennes de la LNH ont toutes terminé la dernière saison en générant des profits.

Note : Pour réaliser son étude, Forbes s’appuie notamment sur des documents d’institutions financières, de consultants, d’autorités publiques et d’agences de notation. Le Canadien de Montréal tout comme la Ligue nationale ont indiqué ne pas avoir participé à l’étude de Forbes et ne l’ont pas commentée hier.

Future équipe de la LNH à Québec

Québecor se dit prête à allonger 600 millions US

Même si le prix risque d’augmenter à 600 millions US, Québecor reste intéressée à acquérir une équipe d’expansion de la Ligue nationale de hockey.

Plusieurs analystes estiment qu’avec le succès de Las Vegas, le prix d’une future équipe d’expansion ne sera pas de 500 millions US, mais se situera plutôt entre 600 et 700 millions US. L’étude annuelle de Forbes sur les finances de la LNH, publiée hier, établit d’ailleurs la valeur moyenne d’une équipe à 594 millions US.

À 600 millions US, Québecor souhaiterait toujours acquérir une équipe de la LNH, a confirmé hier l’entreprise à La Presse. « Au prix que vous me mentionnez [600 millions US], on est encore très intéressés », a dit Hugo Delaney, vice-président des affaires publiques et communications de Québecor.

Et à 700 millions US ? L’entreprise a indiqué ne pas vouloir négocier sur la place publique – d’autant plus que la LNH n’a ouvert aucun processus d’expansion officiel. Au taux de change actuel, une équipe à 600 millions US coûterait environ 760 millions CAN.

Samedi dernier, le journaliste de Sportsnet Chris Johnston a indiqué qu’une nouvelle équipe d’expansion de la LNH coûterait entre 600 et 700 millions US, au-delà des 500 millions US payés par Las Vegas en juin 2016.

« C’est difficile de donner un prix précis, mais ce sera au moins 500 millions US. »

— Mike Ozanian, directeur de l’étude annuelle de Forbes sur la LNH

« La LNH veut 700-750 millions, mais c’est un peu ambitieux. C’est plus raisonnable de penser que le prix serait de 600 millions US », indique Drew Dorweiler, financier montréalais dont la firme Darmouth Partners se spécialise notamment en analyse de valeur pour des équipes de sport professionnel.

Seattle, Houston, Québec

Si la LNH lance un nouveau processus d’expansion, Québecor pourrait toutefois avoir deux sérieux adversaires : un groupe de Seattle mené par l’ex-PDG de MLSE Tim Leiweke, qui vient de s’entendre avec la Ville de Seattle pour rénover le Keys Arena, et le nouveau propriétaire des Rockets de Houston, qui a démontré de l’intérêt pour une équipe de la LNH.

La région métropolitaine de Houston compte 6,5 millions de personnes (5e rang aux États-Unis), celle de Seattle, 3,8 millions (15e rang), celle de Québec, 765 000.

« En fin de compte, la LNH ira probablement vers la personne qui paiera le prix le plus élevé, dit Mike Ozanian, de Forbes. Je n’écarterais pas Québec, je ne pense pas que le prix [d’expansion qui monterait à 600 millions US] empêcherait Québec d’avoir une équipe. Winnipeg a montré que vous pouvez avoir une équipe dans un petit marché, et Québec a une excellente base de partisans. »

Le financier Drew Dorweiler, qui a agi comme consultant pour un groupe de Houston qui n’a finalement pas déposé d’offre lors du dernier processus d’expansion de 2015-2016, est plus pessimiste quant aux chances de Québec d’avoir une équipe d’expansion.

« Je pense que l’argent n’est juste pas là. La rentabilité du projet ne peut pas justifier cette somme. Selon mes informations, ils ont eu de la difficulté à réunir 500 millions la dernière fois. »

— Drew Dorweiler, financier montréalais dont la firme Darmouth Partners

La LNH rappelle ne pas avoir de processus d’expansion en vigueur actuellement. « Il n’est donc pas possible de prédire ce qu’une future équipe d’expansion pourrait coûter ou quand le bureau des gouverneurs prendrait une telle décision », a indiqué par courriel Gary Meagher, porte-parole de la LNH.

Des valeurs à la hausse

Autre détail important pour Québecor : le prix de 500 millions payé par Las Vegas pour accéder à la LNH a haussé de façon importante la valeur des équipes les moins riches de la LNH – et donc les plus susceptibles de déménager.

Un exemple ? Les Coyotes de l’Arizona ont beau avoir perdu 19 millions l’an dernier, leur valeur a néanmoins augmenté de 25 %, à 300 millions, selon Forbes. La valeur des Hurricanes de la Caroline (profits annuels de 3 millions US) a augmenté de 61 %, à 370 millions.

« La LNH ne veut déménager aucune de ses équipes », dit Mike Ozanian, de Forbes.

Dans le dernier processus d’expansion en 2015-2016, Québec était l’une des deux villes candidates avec Las Vegas. Seul Las Vegas a obtenu une équipe d’expansion, au prix de 500 millions US. Québecor a indiqué ne pas « être arrivée aux discussions financières » sur le prix d’une équipe avec la LNH.

Québecor était-elle prête à payer 500 millions US ?

« Québecor est un joueur sérieux, on était prêts à aller jusqu’au bout. Sauf qu’on n’est pas arrivés aux discussions financières parce qu’il y a un ensemble de facteurs qui font qu’ils ont fait la sélection de Vegas et non de Québec, mais Québecor est un joueur sérieux qui veut aller jusqu’au bout », avait déclaré Pierre Dion, alors président et chef de la direction de Québecor, en entrevue à Radio-Canada en juin 2016 après la décision de la LNH de ne pas accorder d’équipe à Québec.

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