L’arrière-boutique
Rassembleuse
La Presse
Dans un français à l’accent charmant, Jennifer Glasgow raconte les étapes qui l’ont menée de ses Prairies natales au Montréal des années 90. Venue pour une histoire de cœur une fois son baccalauréat en arts en main, restée par coup de foudre pour cette ville où elle s’est rapidement sentie chez elle, la designer brode ici sa vie de ses élans d’enthousiasme et de ses idées fécondes.
Jennifer Glasgow a bien mangé quelques croûtes avant de trouver sa place, mais ses yeux pétillent lorsqu’elle évoque cette époque où on arrivait encore à vivre une vie de bohème dans la métropole avec trois fois rien, ce qui correspond assez bien à ses revenus de l’époque !
Fraîchement débarquée chez nous, elle cumule les petits boulots dans des manufactures de vêtements, puis obtient des contrats de création de costumes et de chapeaux extravagants pour des spectacles de danse et de drag-queens.
Son objectif est cependant de travailler pour le Cirque du Soleil, où elle voit des possibilités intéressantes sur le plan créatif. Après des études en chapellerie à Banff, elle est engagée par le groupe québécois. Elle participera à la confection des coiffes spectaculaires du spectacle
.Après deux ans, l’occasion se présente de tenter une autre aventure. Avec une collègue, elle lance une ligne de vêtements pour enfants. L’entreprise ne mènera nulle part, mais elle lui donnera néanmoins l’envie de gérer sa propre entreprise.
Avec deux de ses amies, elle rêve de créer un endroit rassembleur pour la communauté artistique bouillonnante du Mile End. Avec 500 $ chacune en poche, les trois partenaires ouvrent la boutique Local 23 dans un quartier en pleine effervescence. On y vend des vêtements, des accessoires, des albums de Constellation Records, des magazines faits à la main…
Bientôt à court d’espace, deux d’entre elles ouvriront la boutique Général 54 qui se spécialise dans les vêtements et accessoires mode. « On voulait créer un espace où les designers pourraient obtenir des conseils pour se développer et recevoir du feedback des clients afin d’améliorer leurs créations, ce qui n’est pas nécessairement le cas quand nos créations sont vendues dans d’autres boutiques », raconte la designer, qui a depuis repris seule les rênes de la boutique.
Général 54 met de l’avant les créations de Jennifer Glasgow et celles d’une quarantaine d’autres designers de vêtements et accessoires. Ceux qu’elle pourrait voir comme des compétiteurs, la créatrice en a fait ses alliés.
« Chacun a son style et sa façon de voir les choses. Je veux les aider à s’épanouir. Et puis, c’est plus intéressant pour la cliente d’avoir accès à différents styles plutôt qu’à un seul. »
Son style à elle est féminin et classique. D’une simplicité qui n’est jamais banale par ses détails originaux et ses coupes maîtrisées. « Je crée avec l’intention de générer un bien-être chez l’autre. Je veux offrir un produit qui soit de la meilleure qualité possible. J’espère que celle qui portera ces créations se sentira belle et vraiment spéciale », explique-t-elle.
Visiblement, ses clientes sont assez nombreuses à y avoir trouvé un certain bien-être pour que la designer puisse rêver d’agrandir son champ d’action. Pour les prochains mois, la marque travaillera à assurer une présence sur le territoire américain. Jennifer Glasgow est une rêveuse, certes, mais visiblement de celles qui passent ensuite à l’action !