Vie au travail

Avoir à cœur la santé mentale en entreprise

Des dirigeants de très grandes entreprises au Québec font de la santé mentale un enjeu sérieux au sein de leur organisation. En pleine Journée Bell Cause pour la cause, hier, ceux de la Banque Nationale, d’Industrielle Alliance et d’Hydro-Québec ont détaillé pourquoi.

La pénurie de main-d’œuvre est-elle une motivation derrière vos efforts ?

Ce n’est pas la principale raison, répondent en chœur Louis Vachon, président et chef de la direction de la Banque Nationale, Éric Martel, PDG d’Hydro-Québec, et Yvon Charest, président et chef de la direction d’iA Groupe financier. « Mais il y a un lien, car on en demande plus à nos employés en place, a soutenu ce dernier, en marge d’un panel organisé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, hier. Il y a un danger réel d’effet boule de neige. »

51 milliards

C’est ce qu’il en coûte au Canada en frais médicaux et perte de productivité, selon Marc Corbière, professeur titulaire à l’Université du Québec à Montréal et chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. « On dit que d’ici à 2020, la dépression sera la première cause d’invalidité, rapporte-t-il. Mais nous y sommes ! Un demi-million de travailleurs canadiens sont en absence de maladie chaque semaine. Et parmi ceux qui retournent au travail, 50 % font une rechute. Ça représente des coûts monétaires et humains. »

Pourquoi la grande entreprise s’implique-t-elle ?

— Pour éliminer l’aspect tabou. « On peut se faire entendre davantage, note Éric Martel. On peut encourager à mettre des moyens de détection. Cela dit, ça ne prend pas des millions. C’est une question de leadership. Les PME peuvent aussi avoir de bons résultats. »

— Pour donner de la visibilité au problème. « La visibilité aide, dit Louis Vachon. Parlant de tabou, j’avais été approché en 2007 pour soutenir une cause semblable et on m’avait encouragé à ne pas la prendre. Ce n’était pas porteur. Mais je voyais déjà que c’était un enjeu important. »

Le rôle du dirigeant

« En tant que patron, il faut faire partie de la solution. Le patron doit être un isolant de stress et non un transmetteur ! »

— Louis Vachon

Bell cause pour cette cause

La campagne publicitaire de Bell a connu son apogée hier avec la huitième Journée Bell Cause pour la cause, qui a enjoint les Canadiens à envoyer textos et messages sur les réseaux sociaux en échange d’un don de 5 cents pour chaque interaction à des programmes en santé mentale. « Depuis 2010, Bell cherche à changer les choses sur quatre fronts : la lutte contre les préjugés, l’accès aux soins, la recherche et la santé au travail, énumère Martine Turcotte, vice-présidente exécutive, Québec, de Bell, avant le panel dans la salle d’un hôtel de Montréal. Les choses s’améliorent. On a trois PDG des plus grandes entreprises du Québec avec nous. Pensez-y ! Il y a huit ans, on n’aurait pas rempli cette salle [avec 350 personnes]. Collectivement, on a fait un grand bond. Chez Bell, on a enregistré une baisse de 20 % des cas d’invalidité de courte durée dans les cinq dernières années. On a maintenant des gestionnaires qui sont éduqués. Il y a un soutien. »

Des actions concrètes

Comment détecter les cas de dépression et les autres problèmes de santé mentale ? « Le secret est dans le sondage régulier, estime Yvon Charest. Nous envoyons des questions à nos 6000 employés. La solution est d’avoir une action précise et ponctuelle. »

« Par de la formation aux gestionnaires, ajoute Éric Martel. Ça leur met de la pression, mais c’est important. Et en encourageant les employés à utiliser les services en place. »

Pour protéger les employés

Toujours plus de travail, des outils technologiques qui rendent de plus en plus floue la ligne entre les activités professionnelles et personnelles… « On veut que nos employés prennent plein d’initiatives, remarque Yvon Charest. On leur donne ainsi de la pression. Les milléniaux sont plus sujets à avoir des épisodes d’anxiété. Donc cet enjeu va prendre de plus en plus d’importance. »

« Nos statistiques à la Banque Nationale ne sont pas aussi bonnes que celles de Bell, admet Louis Vachon. Nous ne connaissons pas une telle baisse de 20 % des cas d’invalidité. Donc c’est important d’y travailler. »

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