On prononce « régime de Vichy » et d’aucuns font illico l’association avec les heures les plus sombres de l’histoire politique de France. Pensez ! Pétain et son gouvernement « aplatventriste » ! Dans un ouvrage tiré de son doctorat, en partie mené à l’Université Concordia, la Vichyssoise d’origine Audrey Mallet s’emploie à apporter des nuances.
Elle soulève toutes les pierres et déconstruit une idée trop simplifiée du régime honni, sans pour autant en prendre la défense. Bien au contraire ! En situant le régime de Vichy dans une perspective très large – des décennies avant et après la période 1940-1944 –, l’auteure conclut que la ville, ses gouvernements, sa population ont tenté de jouer la carte victimaire et n’ont pas emboîté le pas au devoir de mémoire qui se manifeste dans le reste du pays depuis les années 70. Tout cela dans l’espoir de revenir à ce qu’elle sait faire le mieux : entretenir le tourisme avec ses eaux et ses cures.
Parce que Vichy est, dixit Mme Mallet, une ville attentiste et habituée à servir. Et ses habitants se placent dans « une position privilégiée de spectateurs ». Elle explique par exemple que, dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, Vichy s’est empressé de faire renaître le tourisme. Or, celui-ci s’est dégradé durant la guerre d’Algérie (1954-1962), la ville étant un pôle d’attraction des Pieds-Noirs, partisans d’une Algérie française. La ville a alors basculé du centre gauche vers la droite.
Cela dit, l’auteure analyse avec maints détails tous les chapitres de Vichy durant la guerre : avant la débâcle, l’arrivée du gouvernement français, le régime de Pétain, la place des Juifs, la libération, etc. Tout cela avec une écriture limpide. Comme de l’eau.