Grande entrevue Paul Raymond, PDG d’Alithya

Bâtir un nouveau champion mondial des TI

Paul Raymond ne se contente pas de petites ambitions, il voit grand et en mène large. L’ex-dirigeant de CGI a quitté la multinationale québécoise en 2011 pour participer au rachat de la firme d’experts-conseil en informatique CIA de Québec, rebaptisée Alithya depuis. En moins de cinq ans, il a hissé la petite entreprise au rang de plus importante société privée de services-conseils en technologies de l’information (TI) au Québec. Son ambition ultime et immédiate, bâtir un nouveau champion mondial des TI.

Ingénieur en informatique, Paul Raymond s’est joint à CGI lorsque l’entreprise comptait 500 employés. Il a vécu de l’intérieur la transformation de la société en géant mondial des technologies de l’information et il y a participé puisqu’il a été durant 12 ans responsable de l’intégration et de l’impartition de CGI aux États-Unis.

« J’ai vécu 12 ans à Boston. J’étais responsable du développement du nord-est des États-Unis. De Boston à Wall Street. J’ai été en quelque sorte un “ intrapreneur ” pour CGI. J’ai appris à gérer et à générer de la croissance », résume Paul Raymond.

Il y a cinq ans, le fondateur de CIA, une petite firme de conseil-informatique issue du Mouvement Desjardins à Québec, a approché Paul Raymond et son partenaire Pierre Turcotte (un autre ancien dirigeant de CGI) pour qu’ils participent au rachat du bloc de contrôle qu’avait justement acquis CGI, en 1998.

« CIA était détenue à 60 % par CGI et comptait quelque 200 experts-conseils. CGI arrivait au terme de son contrat avec Desjardins et voulait donc être rachetée.

« L’entreprise avait une belle plateforme, une belle expertise, mais n’affichait pas de croissance. On a décidé d’embarquer parce qu’on voyait le potentiel de développement au Canada et aux États-Unis. On est capable de bâtir au Québec un autre champion mondial des TI », est convaincu Paul Raymond.

CROISSANCE RAPIDE ET PAPE

En cinq ans, Alithya est passée de 200 à 1200 experts-conseils en réalisant des acquisitions et par croissance organique. L’entreprise a ouvert des bureaux à Vancouver, Calgary, Toronto et Ottawa.

« On a fait l’acquisition de Sinapse en 2012, on a changé de nom pour Alithya en 2013 et on a fait l’acquisition de Groupe conseil OSI l’an dernier tout comme on a absorbé la division services-conseils de Telus.

« Pour assurer notre plan d’expansion, on a accueilli quatre nouveaux investisseurs : Desjardins Entreprises Capital régional et coopératif ; Telus, Investissement Québec et l’Industrielle-Alliance qui ont acquis 53 % de notre capital », explique Paul Raymond.

L’entreprise vient tout juste de mettre en place une antenne à Chicago pour accompagner un de ses gros clients canadiens et a tissé sur place une entente avec la firme américaine Advanced Ressources, une entreprise-conseil qui compte 1400 experts.

Ce partenariat pourrait s’élargir avec le temps et servir de tremplin à Alithya pour conquérir le marché américain. Si la nouvelle firme de TI a financé jusqu’à maintenant son expansion à même ses liquidités, elle planche sur l’éventualité prochaine de réaliser un premier appel à l’épargne public pour accélérer son développement.

Paul Raymond, Pierre Turcotte et le fondateur de CIA Ghyslain Rivard ont 35 % des actions d’Alithya, mais ils détiennent des actions de contrôle qui leur assurent 10 votes chacune.

« On a bien expliqué à nos partenaires financiers que notre volonté est de bâtir un champion mondial des TI et que l’on souhaite conserver le contrôle. Ils comprennent très bien nos motivations. »

— Paul Raymond, PDG d’Alithya

« On a quelque 400 employés qui ont des actions, mais en réalisant une émission publique de nouvelles actions on va assurer une plus grande liquidité pour ceux qui veulent vendre ou acheter de nos titres », soumet Paul Raymond.

Le PDG souligne par ailleurs que les entreprises privées de TI ont une valorisation deux fois moindre que celles qui sont publiques, d’où l’attrait de se transformer prochainement en société ouverte.

« Notre politique est de payer nos acquisitions 50 % au comptant et l’autre 50 % avec de nos actions. C’est plus simple quand tes actions s’échangent à la Bourse », expose-t-il.

DES SECTEURS PORTEURS

Alithya a développé son expertise autour de trois grands axes : le conseil stratégique aux entreprises, l’intégration haut de gamme et le recrutement en TI.

Son principal champ d’expertise reste le secteur financier, d’où l’entreprise provient, mais Alithya a aussi développé des compétences fines dans le domaine des télécommunications, des affaires gouvernementales et la santé ainsi que dans les transports.

L’entreprise s’est classée récemment au septième rang des 15 entreprises de TI qui ont affiché la plus forte croissance au Canada. Alithya a enregistré des revenus de 120 millions, en 2015, en hausse de 50 % sur l’année précédente. L’objectif est d’atteindre le plateau des 300 millions de revenus d’ici trois ans.

Seulement pour l’année en cours, Alithya prévoit embaucher au moins 400 personnes dans ses opérations courantes, ce qui exclue les embauches qui pourraient survenir à la suite d’acquisitions.

Alithya vient tout juste de s’engager avec Desjardins dans un projet de technologie financière (fintech) d’envergure, soit de concevoir le guichet automatique de demain.

« On vient d’emménager dans un local 10 guichets automatiques qui pèsent deux tonnes chacun autour desquels travaillent plus d’une centaine d’experts d’Alithya et de Desjardins pour développer le guichet de demain. C’est l’un des 50 projets fintech sur lesquels on travaille », souligne Paul Raymond qui précise qu’il ne prévoit pas manquer de travail dans les prochaines années, tellement les technologies sont appelées à évoluer.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.