Emploi

La vétérinaire rassurante

Ce matin-là, c’était plutôt tranquille à la clinique vétérinaire de la rue Fleury. Il n’y avait pas l’ombre d’un « patient » à quatre pattes dans la salle d’attente.

« Mais il y a des jours où il y a pas mal plus d’action et qu’on voit arriver en urgence des chats et des chiens malades ou blessés », raconte la vétérinaire Odette Girard, 52 ans.

Ça fait plus de 30 ans qu’elle soigne les petits animaux et qu’elle rassure ceux qui s’en occupent ; qu’elle flatte les chats dans le bon sens du poil et qu’elle demande aux gentils chiens-chiens de lui donner la patte.

« Je me surprends à aimer encore davantage mon travail, confie-t-elle. C’est à la fois exigeant et valorisant. Ceux qui nous apportent leur animal sont souvent inquiets, angoissés. C’est un membre de la famille. Ils ne veulent pas le perdre, le voir mourir. »

Un deuil

La mort. Le deuil. Encore tout récemment, un de ses clients, un « monsieur âgé », a dû faire euthanasier son chien, son fidèle compagnon, parce qu’on n’acceptait pas les chiens dans la résidence pour personnes âgées où il est allé vivre, seul.

« Un an auparavant, il avait perdu sa femme, raconte-t-elle, touchée. La mort de son chien a ravivé une plaie encore vive, lui a rappelé le décès de sa femme. »

Odette Girard juge d’ailleurs tout à fait normal qu’un bon vétérinaire soit aussi un bon psychologue. On comprend facilement que son travail ne consiste pas uniquement à ausculter mademoiselle griffée ou monsieur bouledogue.

« C’est déchirant d’annoncer à une personne qu’on va peut-être devoir euthanasier son chat, ou son chien, dit-elle. Mais il y a aussi le scénario inverse. Parfois, il faut expliquer au propriétaire de l’animal qu’il faudra pousser nos analyses et que cela risque de faire augmenter la facture. »

Une réalité

À ce sujet, elle ne cache pas que les questions financières liées aux interventions en clinique ne sont pas toujours faciles à régler. Les propriétaires de quadrupèdes seraient plus nombreux, pour ces raisons, à souscrire à des polices d’assurance maladie pour couvrir les soins de santé de leurs bêtes.

« La pratique de médecine vétérinaire a beaucoup évolué ces dernières années, soulève-t-elle. On a maintenant des équipements à la fine pointe de la technologie et il faut les payer, ces équipements, pour améliorer la qualité de nos traitements. »

« Personnellement, je tente de m’ajuster en fonction du budget du client, quand un cas pose vraiment problème, souligne-t-elle. Je fais ce que je peux. Je comprends. J’aime les animaux. Mais il y a des fois où j’aimerais qu’on comprenne que je ne roule pas sur l’or parce que j’ai une clinique vétérinaire. »

« Avec mes années de pratique, j’ai réalisé que les propriétaires d’animaux associent souvent la mort de leur chat, de leur chien, à un deuil personnel, au décès d’un conjoint, d’un parent, d’un ami. Ces deuils sont liés, il ne faut pas les minimiser. »

— Odette Girard

Un choix

Odette Girard dirige un mini-hôpital doté d’une salle de radiologie, d’une salle d’anesthésie, d’une salle de chirurgie. « Nous sommes passés à l’ère numérique, relève-t-elle. On fait de la télé-médecine. »

Comme les humains, ses « patients » souffrent de cancer, de diabète et d’hyperthyroïdie, ou bien ils se sont fait mal à une patte, ou encore, ils souffrent d’embonpoint parce qu’ils mangent mal, ou trop bien.

Elle dit avoir fait « un choix », celui de prendre tout son temps pour poser le bon diagnostic et pour expliquer aux propriétaires des animaux malades ou blessés la marche à suivre.

« Je laisse le temps à mes clients de me parler, de parler de leur animal, de leurs inquiétudes, dit-elle. Une consultation peut durer jusqu’à trois quarts d’heure. »

« Je ne veux pas aller trop vite et risquer de perdre un animal, faute de traitements appropriés », ajoute-t-elle.

Chiens et chats

C’est un chien de 20 kg, un magnifique barbet âgé de 9 mois, qui a accueilli le journaliste et le photographe de La Presse à la clinique de quartier.

« Il faut aimer les animaux et le monde pour pratiquer la médecine vétérinaire », convient Odette Girard en présentant son chien prénommé Manny.

Dans sa clinique, elle fait d’ailleurs bien attention de ne pas forcer la cohabitation entre les chats et les chiens. Certains jours de la semaine, elle planifie des rendez-vous « exclusivement » pour les chats pour éviter que les félins ne soient en contact avec les chiens.

« Les chats et les chiens n’apprécient pas de se retrouver dans la même pièce, et dans une salle d’attente où ils sentent toutes sortes d’odeurs qui ne leur sont pas familières, a-t-elle observé. À vrai dire, les chats n’aiment pas tous les chiens ! »

Comme c’est sans doute le cas pour les humains…

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