On ne peut même pas dire que le Canadien court un risque en embauchant Alexander Semin pour une saison à seulement 1,1 million.
Si c’en est un, il est encore moins périlleux que celui que les Hurricanes de la Caroline avaient pris en 2012 lorsqu’ils l’avaient embauché pour un an (et 7 millions) sur le marché des joueurs autonomes.
Sous les ordres de Kirk Muller, Semin avait ensuite connu une excellente campagne, récoltant 44 points en 44 matchs durant cette saison écourtée par le lock-out.
« Quand je l’ai eu, je l’ai employé avec Eric Staal et Jiri Tlusty, et ç’a peut-être été l’un des trois meilleurs trios de la ligue », se souvient Muller, qui est maintenant entraîneur adjoint chez les Blues de St. Louis.
« Je lui avais confié de nombreuses responsabilités. C’est un joueur intelligent et, ce que j’ignorais à son sujet, c’est qu’il est très bon défensivement. »
— Kirk Muller, ancien entraîneur-chef des Hurricanes de la Caroline
« Il a excellé pour nous. Il ne fait pas toujours les choses parfaitement comme on le voudrait – on aimerait parfois qu’il applique davantage le système –, mais il fournit les résultats voulus. C’est juste qu’il s’y prend différemment pour y arriver ! »
Les Hurricanes ont voulu tabler sur l’excellente chimie de ce trio en s’engageant à long terme avec Semin. Mais avec un joueur dont la constance et l’implication ont souvent fait défaut, ça avait tous les airs d’un fiasco annoncé.
Après des résultats en demi-teinte il y a deux ans, le Russe de 31 ans s’est carrément effondré la saison dernière avec seulement 19 points en 57 matchs. Les Hurricanes se sont résolus à racheter les trois dernières années de son contrat qui lui accordait 7 millions par saison.
« Ça n’a pas été un bon moment à passer après que mon contrat a été racheté, mais j’ai essayé de ne pas trop y penser, a indiqué Semin, hier, en conférence téléphonique. Je suis très content d’avoir signé [un contrat à Montréal]. Ce nouvel arrêt pourrait aider ma carrière.
« L’an dernier a été une mauvaise saison. Je ne marquais pas, je ne faisais pas de points et je ne jouais pas bien. Je veux essayer de revenir au niveau de jeu dont je suis capable. Si l’équipe m’aide, je vais pouvoir aider l’équipe. »
Le départ de Pierre-Alexandre Parenteau, le mois dernier, a augmenté encore davantage les besoins du Canadien à l’aile droite. Même s’il est permis de croire qu’il était dans la course pour obtenir Patrick Sharp, le directeur général Marc Bergevin s’était dit prêt à laisser la chance aux jeunes de se faire valoir. Or, avec ses lettres de créance dans la LNH, c’est évidemment Semin qui aura la première audition.
Pour autant qu’il saisisse sa chance, le poste disponible est taillé sur mesure pour lui.
« Alex est un marqueur naturel qui a un très bon lancer. Nous croyons que son ajout à notre groupe d’attaquants contribuera à notre production offensive et à notre avantage numérique. »
— Marc Bergevin, directeur général du Canadien, dans un communiqué
Les Hurricanes vont continuer de le payer pour des promesses non tenues alors que le Canadien lui versera moins d’argent qu’à Torrey Mitchell. Si Semin, sept fois marqueur de 20 buts, produit comme il l’avait fait sous les ordres de Muller ou comme lors de certaines saisons à Washington, le CH aura peut-être signé l’aubaine de l’année.
Si la morosité de l’an dernier se confirme et que son déclin se poursuit, ce ne sera pas un trop lourd boulet à traîner pour le CH.
Deux constats s’imposent. Le premier, c’est que le marché pour Semin s’est révélé beaucoup moins « robuste » que ce que laissait entendre son agent Todd Diamond le 1 juillet. Faut-il s’en étonner ? La mauvaise réputation de l’attaquant russe le précède depuis longtemps. On le dit au mieux énigmatique, au pis carrément désintéressé. Déjà, à Washington, ses coéquipiers des Capitals se grattaient la tête en se demandant comment un marqueur de 40 buts de sa trempe pouvait se contenter d’aussi peu.
« Son gabarit et ses aptitudes forment une combinaison digne de l’élite dans la ligue, rappelle pourtant Muller. Il a le potentiel pour dominer, mais encore faut-il qu’il le veuille.
« Il pourrait très bien s’enflammer à Montréal. »
L’autre conclusion, c’est que la KHL n’est décidément plus la menace qu’elle était autrefois pour la Ligue nationale. Si un joueur russe talentueux mais introverti opte pour un contrat d’un an à 1,1 million dans la LNH plutôt que de rentrer dans son pays, c’est que l’attrait de la KHL est décidément bien bas.
« Mon agent a souvent dit publiquement que je voulais jouer dans la Ligue nationale, a insisté Semin. Je suis encore jeune, je veux jouer ici et ma famille aime habiter ici. »