Interdiction du cannabis aux moins de 21 ans

Trois mythes tenaces

Le gouvernement vient de déposer un projet de loi qui augmenterait l’âge légal d’achat et de possession du cannabis à 21 ans et qui interdirait sa consommation dans tous les lieux publics. Avant de prendre une décision aux conséquences multiples, il importe de contrer trois mythes tenaces voulant que cette mesure protégera le cerveau des jeunes et empêchera la banalisation de la substance.

VRAI ou FAUX ?

1. Rendre le cannabis légal à 21 ans permettra de protéger les jeunes de 18 à 21 ans.

Faux. Ces jeunes continueront de consommer et n’auront pas accès aux produits contrôlés (exempts d’engrais toxiques), à des produits à faible teneur en THC, à des produits contenant du CBD (possiblement protecteur), aux activités de prévention et aux conseils de consommation à moindre risque et de réduction des méfaits pouvant entre autres être dispensés par les employés de la SQDC.

Selon les plus récentes données, environ 42 % des jeunes âgés de 18 à 25 ans ont consommé du cannabis au cours de l’année précédente. Ce sera donc plus de 100 000 jeunes québécois qui ne seront pas protégés par la légalisation. C’est le marché illégal qui sera protégé et qui conservera cette clientèle.

2. Interdire de fumer du cannabis dans tous les lieux publics est la meilleure façon de protéger la population contre la fumée secondaire.

Faux. Il est vrai que la fumée secondaire dans un lieu fermé présente un risque pour la santé comme toute forme de fumée produite par combustion. La fumée secondaire dans un espace bien aéré comme les trottoirs, ou les espaces verts ne présente pas de risque pour les autres non-consommateurs, ni pour la santé pulmonaire, ni pour ce qui est d’une possible intoxication.

3. Fumer du cannabis augmente les risques de psychoses de 40 %.

Vrai. Mais il faut tenir compte du risque de départ. C’est comme pour la loterie. Si vous achetez 10 billets, vous avez 10 fois plus de chances de gagner. Mais comme au départ vous n’avez qu’environ une chance sur 14 millions de gagner, votre probabilité de remporter le gros lot reste infime. Évidemment la psychose est une conséquence grave, mais le risque de départ demeure somme toute faible.

Finalement, rappelons qu’au Québec l’âge de la majorité est 18 ans. À partir de 18 ans, nous considérons que les jeunes adultes sont en mesure de prendre des décisions éclairées concernant différents comportements comportant un certain niveau de risque : consommer de l’alcool, du tabac, avoir une arme à feu, se marier, voter, etc. Comment expliquer toutefois qu’ils n’auront pas la maturité nécessaire pour choisir ou non de consommer du cannabis ?

* Signataires : Line Beauchesne, professeure titulaire au département de criminologie de l’Université d’Ottawa ; Serge Brochu, professeur émérite, École de criminologie, Université de Montréal ; Jean-Sébastien Fallu, professeur agrégé, École de psychoéducation, Université de Montréal ; Roxanne Houde, médecin-résidente en santé publique et médecine préventive et co-présidente de Jeunes médecins pour la santé publique (JMPSP) ; Monique Lalonde, direction de santé publique de Montréal ; David-Martin Milot, médecin spécialiste en santé publique et médecine préventive ; Robert Perreault, psychiatre et expert en médecine préventive, Direction de santé publique de Montréal

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