Salon du livre de Montréal

Pour une culture scientifique

Comment s’assurer que les sciences jouent un rôle plus important dans les débats de société et dans la formation ? Deux vétérans du journalisme et de la communication scientifiques, Félix Maltais, du magazine Les débrouillards, et Mathieu-Robert Sauvé, auteur du récent livre Évolution ! La science de l’évolution en un clin d’œil, en débattront.

Dragons

Comment améliorer la culture scientifique au Québec ? « On pourrait avoir à la télé une émission avec des scientifiques en vedette, comme les quatre entrepreneurs des Dragons, dit Félix Maltais. Grâce à cette émission, ces quatre ou cinq entrepreneurs sont devenus des vedettes et l’entrepreneuriat a une superbe vitrine. Trouvons un concept et créons les Dragons scientifiques ! »

Garçons

« Les animations à l’école, de type Débrouillards, Neurones atomiques, les Innovateurs, sont d’excellentes initiatives, malheureusement de plus en plus victimes des compressions en milieu scolaire », dit Mathieu-Robert Sauvé. « Le didacticien des sciences Marcel Thouin a déjà expliqué que les expériences de type hands-on de la science étaient un moyen de contrer le décrochage des garçons. Ils aiment voir la nature en action. Mais ces approches sont rarement possibles avec les enseignants titulaires, car ils n’ont pas l’expérience adéquate et la créativité nécessaire. »

Réforme

La culture scientifique a régressé au Québec à cause de la réforme scolaire, selon Mathieu-Robert Sauvé. « Dans les écoles primaires et secondaires, la réforme instaurée depuis 2000 a fait reculer l’enseignement des sciences en nombre d’heures consacrées à la science à l’école, en termes d’objectifs précis à atteindre et en matière d’évaluation des acquis. Je crains le pire pour le Québec dans le prochain PISA, qui portera sur la science dans une quarantaine de pays. On le sait, les enseignantes sont mal à l’aise pour enseigner les sciences, car elles n’ont souvent pas eu une bonne expérience avec les sciences, jadis mal enseignées au bac en pédagogie. Plutôt que de régler ce problème, la réforme l’a exacerbé. »

Inculture

L’invasion « sournoise » des pseudosciences sur l’internet constitue l’aspect le plus inquiétant de l’inculture scientifique, selon Mathieu-Robert Sauvé. « Les médaillons magiques et les rameaux de cerf qui guérissent du cancer, tout ça se nourrit d’inculture scientifique. L’adhésion au paranormal et aux remèdes miracles (du genre faire suer à mort une personne en pensant la guérir). Dans mon livre, je relate le fait que les États-Unis ont failli perdre la course vers l’espace parce qu’ils n’ont pas eu accès aux connaissances scientifiques modernes et à un enseignement adéquat. Pourquoi ? À cause du lobby religieux qui obtenait des écoles l’enseignement du créationnisme. Cet obscurantisme déteignait sur tout, jusqu’à ce qu’on donne un sérieux coup de barre dans les années 50. »

Encourageant

Tout n’est pas sombre, selon Félix Maltais. « Les musées d’Espace pour la vie à Montréal sont en progrès [nouveau Planétarium, importantes rénovations à venir au Biodôme et à l’Insectarium], le Centre des sciences de Montréal n’existait pas il y a 20 ans, nous avons lancé deux magazines scientifiques pour les jeunes [Les explorateurs il y a 14 ans et Curium l’an dernier]. L’excellente émission Découverte est toujours là, et Télé-Québec a maintenant deux émissions scientifiques [Radio Ville-Marie aussi] ! Et grâce à des éditeurs comme MultiMondes et Michel Quintin, il se publie au Québec plus de livres de culture scientifique que jamais. L’Association des communicateurs scientifiques donne même des prix pour les meilleurs livres du domaine, chose impensable il y a 20 ans ! »

Ailleurs

D’où tirer son inspiration ? Des pays d’Europe du Nord, selon Mathieu-Robert Sauvé. « Particulièrement la Finlande, qui se classe toujours en haut dans les concours internationaux de connaissances générales sur les grands thèmes classiques (Est-ce que la Terre autour du Soleil ? Combien y a-t-il de planètes dans le système solaire ?). Israël et les pays d’Asie comme le Japon, la Corée du Sud et le Viêtnam font également bonne figure. Ces nations ont une tradition de valorisation de la connaissance. On y passe plus de jours d’école par an [de 10 à 20 % de plus qu’au Québec] ; on va à l’école le samedi ; les parents poussent la connaissance, aident leurs enfants pour les devoirs. »

L'animation Plus de science pour tous a lieu samedi, 17 h, à l’Espace Archambault.

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