Incubateurs

Un modèle bousculé par la technologie

D’abord lieux de rassemblement d’entreprises en démarrage, les incubateurs ont sans cesse ajouté à leur offre. Et ça continue avec l’avènement des technologies numériques.

Le temps où « incubateur d’entreprises » rimait seulement avec « rassemblement d’entreprises en démarrage sous un même toit » est révolu. Les incubateurs ont progressivement ajouté une offre d’encadrement à leurs poulains, mais celle-ci ne suffit plus pour se démarquer.

Selon Jean Bibeau, un entrepreneur en série qui prépare une thèse doctorale sur les incubateurs d’entreprises à l’Université de Sherbrooke, les outils de communication d’aujourd’hui sont en train de bousculer les façons de faire pour bien des incubateurs.

« L’environnement de travail d’un incubateur peut aujourd’hui être autant physique que virtuel, dit-il. Mon mentor, je peux le trouver en Israël s’il le faut. »

Selon lui, les gestionnaires d’incubateurs ont donc avantage à tisser un réseau à l’extérieur de leurs murs afin d’assurer une plus-value à leurs protégés.

« C’est une tendance mondiale, affirme-t-il. Aujourd’hui, les occasions de réseautage sont nombreuses pour les entrepreneurs, et ils peuvent interagir sans avoir à se planter dans un incubateur. »

« Pour se démarquer, les incubateurs doivent miser sur le capital relationnel. »

— Jean Bibeau, entrepreneur en série qui prépare une thèse doctorale sur les incubateurs d’entreprises à l’Université de Sherbrooke

DES EXEMPLES

Voilà justement ce à quoi s’est affairé le Centre d’entreprises et d’innovation de Montréal (CEIM), un incubateur qui couve des entreprises technologiques. Le CEIM a profité des derniers mois pour signer deux ententes avec des partenaires, tous membres du Canadian Digital Media Network (CDMN), un réseau pancanadien qui regroupe notamment des incubateurs.

La première, qui le lie à son vis-à-vis vancouvérois Wavefront, garantit un partage d’expertises entre les deux groupes tant sur le plan des technologies que des réseaux d’affaires.

La seconde, paraphée avec le MaRS de Toronto, permettra au CEIM d’avoir accès à une équipe de 11 spécialistes qui se consacrent exclusivement à la veille technologique.

Selon Serge Bourassa, président et chef des opérations du CEIM, pareilles collaborations ne pourront que donner un coup de pouce aux entreprises que le Centre chapeaute. Après tout, « ce sont les besoins de nos entrepreneurs qui conditionnent les partenariats et collaborations que nous recherchons », dit-il.

À l’incubateur-accélérateur de Québec LE CAMP, on s’affaire aussi à étendre le réseau. Ici, par contre, on met l’accent sur les aspects de commercialisation des technologies.

« Notre rôle n’est pas de valoriser la recherche comme le ferait un incubateur universitaire. L’objectif, c’est d’augmenter les ventes de nos entreprises. »

— Isabelle Genest, chef de la direction de l’incubateur-accélérateur de Québec LE CAMP

Pour y arriver, l’incubateur alloue à chaque entrepreneur un guide à l’interne qu’il appelle « sherpa ». À celui-ci s’ajoutent des experts parmi la quarantaine affiliée à l’institution.

Mais l’organisme ne se limite pas aux environs de Québec pour trouver des spécialistes capables d’encadrer le travail de ses entrepreneurs. « Dès qu’une entreprise vient chez nous, c’est qu’elle veut être internationale au jour un, explique sa représentante. Il faut donc qu’on le soit aussi. » Pour y arriver, LE CAMP s’est doté d’experts tant en Californie qu’à New York. « Nos entrepreneurs ont accès à un bureau à Manhattan et à des experts sur place », indique Isabelle Genest.

L’organisme vient aussi de signer une entente de collaboration avec l’accélérateur Héméra de Bordeaux. Une première cohorte d’entrepreneurs du CAMP y séjournera bientôt pour découvrir les façons de faire françaises.

COORDINATION

Élargir le réseau d’experts autour des incubateurs ne constitue toutefois qu’une partie de la clé du succès à venir des incubateurs, selon Jean Bibeau.

« Le gestionnaire d’incubateur doit non seulement assembler un réseau, mais aussi bien gérer les collaborations, affirme-t-il. Si un entrepreneur reçoit en même temps les conseils d’un avocat, d’un mentor ou d’un agent de brevets, il va virer fou. »

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