Tarifs des CPE 

Casse-tête en vue pour les parents séparés

La facture supplémentaire pour les enfants en Centre de la petite enfance (CPE) risque de causer des maux de tête aux parents séparés qui ont des bambins en garde partagée.

Pour un même enfant, le tarif pourrait être différent, en fonction du parent qui reçoit la facture de la garderie. Ce qui provoquera d’importantes iniquités et tensions, selon des parents qui se trouvent dans cette situation.

GARDE PARTAGÉE : CONFUSION

Marianne Fortier craint de payer une facture deux fois plus importante que celle de son ex-conjoint pour leur enfant qui fréquente le CPE, même si les deux parents ont des revenus similaires. La jeune mère a deux enfants de sa première union : un en CPE et l’autre à l’école, où il fréquente le service de garde. Elle a maintenant un nouveau conjoint, qui est le père de son troisième enfant. Or, la facture supplémentaire de la garderie sera établie, à partir du 1er avril, en fonction du revenu familial des parents. « Ça signifie que le gouvernement tiendra compte du revenu de mon nouveau conjoint, souligne Marianne Fortier. Mais je paie seule ma partie de la facture pour la garderie de cet enfant. Mon nouveau conjoint n’a pas à y contribuer, puisque ce n’est pas son enfant. »

Une facture salée

Tarif de CPE à payer

Si on tient compte seulement du revenu de la mère : 

7,30 $/jour

Si on tient compte aussi du revenu du nouveau conjoint : 

11,58 $/jour

Frais supplémentaires : 1070 $/année

Les parents continueront de payer 7,30 $ par jour directement au CPE. La facture supplémentaire, s’il y a lieu, sera calculée en fonction de leur revenu familial lorsqu’ils rempliront leur déclaration de revenus.

RELATIONS TENDUES ENTRE EX-CONJOINTS

Les parents séparés doivent partager les dépenses liées aux enfants. Mais il arrive que certains ne réussissent pas à s’entendre. Par exemple, Marianne Fortier et son ex-conjoint reçoivent tous les deux une facture du CPE, représentant la moitié des frais, pour éviter les disputes à ce sujet. Si un seul des deux doit payer le CPE et qu’ils doivent ensuite s’entendre pour se rembourser les frais, des tensions risquent de surgir. « Normalement, celui qui a le revenu le moins élevé déclare l’enfant comme personne à charge sur sa déclaration de revenus, et les parents partagent ensuite les sommes reliées aux déductions et aux crédits d’impôt », indique Sylvie Lévesque, PDG de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ). Mais quand les relations sont tendues entre les ex-conjoints, le partage peut être difficile, dit-elle.

ENFANTS QUÉBÉCOIS VIVANT DANS DES FAMILLES RECOMPOSÉES OU MONOPARENTALES

0 à 4 ans : 10 %/8,5 %

5 à 9 ans : 15,4 %/13,8 %

10 à 14 ans : 14,3 %/24,6 %

15 à 17 ans : 14,8 %/27,7 %

Source : Institut de la statistique du Québec, 2011

OUBLIÉES, LES FAMILLES RECOMPOSÉES ?

Difficile de savoir si la situation des familles monoparentales et recomposées sera prise en compte dans les mécanismes servant à fixer la contribution des parents d’enfants en CPE. « La question a été abordée au cours des consultations, toutes sortes d’histoires nous ont été rapportées, mais je ne peux pas vous indiquer s’il y aura des amendements au projet de loi à ce sujet », dit Andrée-Lyne Hallé, attachée de presse du ministre des Finances, Carlos Leitao. Dans sa forme actuelle, le projet de loi prévoit que la contribution des parents est basée sur le revenu familial, peu importe le type de famille. C’est aussi ce qui se passe pour les crédits d’impôt et prestations diverses destinés aux familles : un père ou une mère qui élève ses enfants seul peut perdre jusqu’à 10 000 $ en avantages fiscaux s’il s’installe avec un nouveau conjoint.

QUI PAIE QUOI DANS LES FAMILLES RECOMPOSÉES ?

Sylvie Lévesque a insisté sur le fait que la fiscalité est mal adaptée à la réalité changeante des familles d’aujourd’hui quand elle a témoigné devant la Commission des finances publiques de l’Assemblée nationale, il y a deux semaines, au sujet du projet de loi qui introduit la modulation des tarifs de CPE. « Le revenu familial est considéré au niveau fiscal, mais dans le quotidien, dans la pratique, quand on forme une famille recomposée, seul le parent va payer pour ses enfants. L’autre conjoint ne paiera pas nécessairement pour l’ensemble des frais de la famille », a-t-elle fait valoir.

« Il me semble que, quand on est une famille, qu’on soit recomposé ou pas, enfin, peut-être que je suis très vieux jeu, mais il me semble que tout le monde doit contribuer. »

— Carlos Leitao, ministre des Finances

LES YEUX SUR LE 1er AVRIL

Le gouvernement prévoit toujours l’entrée en vigueur des nouveaux tarifs le 1er avril. Le projet de loi 28, qui vise l’implantation de plusieurs mesures prévues au budget de juin dernier, doit d’abord être adopté. Mais les élus doivent l’étudier article par article, ce qui risque d’être long. « On espère avoir la collaboration des partis d’opposition, indique l’attachée de presse du ministre des Finances. Si ça devait être retardé, il pourrait y avoir des ajustements sur la date d’implantation, mais on ne s’inquiète pas encore. »

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