Alimentation

Le lait Coca-Cola arrive au Canada

Pour la première fois, le lait de Coca-Cola sera vendu à l'extérieur des États-Unis. Les produits laitiers Fairlife arriveront sur les tablettes canadiennes dès le mois de septembre.

Alimentation

« Un lait savoureux et novateur »

Le lait Coca-Cola arrive sur nos tablettes. Dès septembre, les consommateurs canadiens pourront goûter au Fairlife, une marque de la multinationale américaine, et l’entreprise aura en 2020 son usine sur le sol canadien pour le produire. C’est la première fois que le lait de Coca-Cola sera vendu à l’extérieur des États-Unis. 

Le géant des boissons gazeuses veut ainsi continuer à diversifier son offre de boissons. Fairlife, qui se classe dans la catégorie des laits à valeur ajoutée, sera offert en versions nature et au chocolat. Sans lactose, il contient 50 % plus de protéines et 50 % moins de sucre. 

« C’est un lait savoureux, novateur, un produit avant-gardiste qui va élargir le marché canadien, parce qu’il n’y a aucun lait qui lui ressemble actuellement », affirme en entrevue téléphonique Antoine Tayyar, directeur des communications et des affaires publiques pour Coca-Cola Canada.

Le prix de détail suggéré sera de 4,99 $ pour le format 1,5 L et de 1,99 $ pour celui de 240 mL. Selon AC Nielsen, qui mesure les habitudes de consommation, le lait à valeur ajoutée représentait environ 25 % du marché du lait au Canada en 2017. La multinationale espère venir stimuler ce créneau avec sa force de distribution, ses outils marketing et, surtout, parce que ce type de lait répond aux attentes des consommateurs, selon elle.

Depuis que le Fairlife a été lancé aux États-Unis en 2014, le leader mondial des boissons gazeuses soutient qu’il a séduit 40 % des consommateurs qui ne buvaient plus ou pas de lait.

« C’est un avantage pour toute l’industrie laitière parce que ça va augmenter la production laitière et ramener plus de gens vers la catégorie des produits laitiers. »

— Antoine Tayyar

La consommation de lait traditionnel est en décroissance au pays, et les transformateurs misent sur de nouveaux produits pour rejoindre les consommateurs. 

Permis spécial

En temps normal, le lait de consommation américain ne peut pas être importé au Canada. Coca-Cola a donc obtenu un permis spécial d’une durée de 15 mois en attendant que sa nouvelle usine de Peterborough, en Ontario, soit construite. Par le passé, Danone avait bénéficié d’une exemption semblable pour son produit à boire DanActive.

Coca-Cola a promis d’investir 85 millions de dollars pour la construction de cette septième usine en territoire canadien. Dès qu’elle sera opérationnelle en 2020, le Fairlife sera produit avec du lait des producteurs laitiers situés à proximité de l’usine.

Les producteurs de lait d'accord

« Comme les producteurs de lait dans tout l’est du Canada mettent en commun leurs ventes, c’est clair qu’indirectement, les producteurs de lait du Québec vont d’une certaine façon contribuer à l’approvisionnement de ce marché-là », se réjouit au téléphone Alain Bourbeau, directeur général des Producteurs de lait du Québec.

Lorsque Coca-Cola a rencontré les différents producteurs de lait du Canada pour leur faire part de son projet, les Producteurs de lait du Québec avaient quelques inquiétudes au sujet de la compétition et de l’ingrédient principal dans la fabrication du produit.

« Notre premier réflexe a été de demander : “Est-ce que ce sera de la croissance ou du déplacement de marché ?”, explique Alain Bourbeau. Ce qu’on a compris de leur pitch de vente, c’est que c’est un produit qui va sans doute déplacer un peu de consommation courante, mais qui va refidéliser certains consommateurs. C’est intéressant parce que le créneau des laits fortifiés est assez peu développé. La compagnie nous a aussi rassurés en disant que le produit serait fait entièrement avec du lait. »

De leur côté, les producteurs laitiers du Canada se sont dits ravis d’apprendre qu’un nouveau produit intéressant sera offert aux consommateurs canadiens dès cette année.

« Il s’agit d’une initiative positive pour les producteurs, puisqu’à l’avenir, le produit sera réalisé avec du lait provenant des fermes canadiennes, a écrit par courriel Pierre Lampron, producteur laitier et président des Producteurs laitiers du Canada. Nous sommes heureux que ces entreprises reconnaissent nos normes élevées en matière de qualité et de bien-être animal, qui ont guidé leur choix d’élargir leur offre au Canada. »

Alimentation

L’économie du lait au Québec

La production laitière est un rouage important de l’économie dans l’ensemble des régions du Québec.

12 000 propriétaires de fermes laitières

Production de plus de 3 milliards de litres de lait par an

Valeur à la ferme de plus de 2 milliards de dollars, soit 28 % de l’ensemble des recettes agricoles québécoises

Bon an, mal an, les entreprises laitières du Québec investissent plus de 500 millions pour maintenir ou améliorer leurs installations.

Les fermes laitières du Québec sont responsables de 82 661 emplois (directs, indirects et induits, en 2014).

À l’échelle du Canada, ce sont 36 % des recettes découlant de la production laitière qui proviennent du Québec.

ALENA

Trudeau était prêt à offrir un meilleur accès aux fermiers américains

Ottawa — Le gouvernement Trudeau était prêt à accorder aux fermiers américains un plus grand accès au marché canadien pour les produits laitiers, les œufs et la volaille dans le cadre des négociations visant à moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), mais l’exigence des États-Unis d’inclure une clause crépusculaire de cinq ans a fait dérailler les pourparlers.

C’est du moins ce qu’a indiqué le premier ministre Justin Trudeau au réseau de télévision NBC dans le cadre de l’émission Meet the Press diffusée dimanche. Alors qu’il a toujours affirmé que son gouvernement allait défendre bec et ongles la gestion de l’offre au Canada dans le cadre de ces négociations qui sont maintenant dans l’impasse, Justin Trudeau a donc dévoilé un peu plus le jeu des négociateurs canadiens en indiquant pour la première fois qu’il était prêt à jeter du lest, si cela pouvait mener à la conclusion d’une nouvelle mouture de l’ALENA.

M. Trudeau a donné cette entrevue au réseau NBC afin de faire valoir directement aux Américains l’absurdité de la décision de l’administration Trump d’imposer des tarifs douaniers aux exportations canadiennes d’acier (25 %) et d’aluminium (10 %) en invoquant l’article 232 de la loi concernant la sécurité nationale.

Durant l’entrevue, le premier ministre a répété certains des propos qu’il a tenus depuis l’annonce de Washington jeudi dernier, notamment que le Canada est l’allié le plus fidèle des États-Unis sur le plan militaire et que l’imposition de tarifs est « inacceptable » et « insultante ».

Mais c’est l’aveu qu’il était prêt à revoir les règles concernant la gestion de l’offre au pays afin de permettre un meilleur accès aux fermiers américains qui a retenu l’attention, hier.

Interrogé par l’hôte de l’émission Meet the Press Chuck Todd pour savoir ce qu’il croyait que le président des États-Unis souhaitait obtenir comme concessions pour renouveler l’ALENA, M. Trudeau a répondu qu’il visait notamment le secteur de l’automobile au Mexique et un meilleur accès au marché canadien pour certains produits agricoles, notamment les produits laitiers.

« Nous avions démontré notre flexibilité dans ces secteurs et cela me semblait prometteur. Mais les États-Unis exigent qu’on ajoute une clause crépusculaire à l’ALENA et cela n’a aucun sens. On ne signe pas un traité commercial qui expire tous les cinq ans. Non, je ne serai pas à la table si cela fait partie des négociations. »

— Justin Trudeau

Alors qu’il réagissait à la décision de l’administration Trump devant les journalistes canadiens, la semaine dernière, M. Trudeau avait fait état d’une proposition qu’il avait faite au président américain il y a deux semaines de se rendre à Washington afin de parachever les négociations entourant l’ALENA, convaincu qu’une entente était à portée de main. Il avait aussi indiqué avoir renoncé à ce projet après avoir reçu un appel du vice-président Mike Pence quelques jours plus tard qui le pressait d’accepter une clause crépusculaire au préalable. Mais le premier ministre n’avait pas évoqué qu’il était prêt à faire preuve de « flexibilité » pour ce qui est de la gestion de l’offre.

« Quelle hypocrisie »

Aux Communes, hier, le député conservateur de Mégantic-L’Érable, Luc Berthold, a accusé le premier ministre de tenir un double discours dans ce dossier.

« Les producteurs canadiens font face à un gouvernement libéral à deux faces qui prétend ici qu’il protège la gestion de l’offre, tout en négociant en cachette des parts de marché de la gestion de l’offre aux Américains. C’est exactement ce que le premier ministre a admis en entrevue à NBC : “Le Canada sera flexible sur l’accès au marché de l’agriculture pour mieux négocier l’ALENA.” Quelle hypocrisie », a lancé M. Berthold, qui est le critique de son parti en matière d’agriculture.

Même s’il était présent aux Communes, M. Trudeau a laissé à son ministre de l’Agriculture, Lawrence MacAuley, le soin de répondre à cette charge du Parti conservateur. « Notre gouvernement appuie fermement le système de gestion de l’offre au pays. Le premier ministre, moi-même, la ministre des Affaires étrangères, les autres ministres du cabinet et le caucus, et aussi les négociateurs canadiens ont clairement indiqué cette position du Canada », a dit le ministre.

Malgré ces assurances, le président du Mouvement pour la gestion de l’offre, Marcel Groleau, s’est dit inquiet de cette possible concession du gouvernement Trudeau alors que les Américains se montrent intraitables sur les questions commerciales.

Dans une série de gazouillis, hier, le président Trump a d’ailleurs de nouveau accusé le Canada d’ériger des barrières commerciales qui nuisent aux agriculteurs américains. « Le Canada a toutes sortes de barrières commerciales sur nos produits agricoles. Ce n’est pas acceptable », a-t-il affirmé dans un tweet.

« Les fermiers n’ont pas bien réussi depuis 15 ans. Le Mexique, le Canada, la Chine et d’autres les ont traités de manière injuste. Quand j’aurai fini les pourparlers commerciaux, cela va changer », a-t-il aussi écrit plus tard.

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