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Des fournisseurs à court de cannabis médical

Des patients souffrent de ces pénuries qui coïncident avec l’ouverture du marché récréatif.

L’engouement pour le pot récréatif depuis une semaine laisse un goût amer à plusieurs patients consommant du cannabis médical, qui sont aux prises avec à des pénuries sans précédent auprès de différents producteurs.

« C’est désolant ! », lance Daniel, ancien combattant de l’Afghanistan traité depuis deux ans avec du cannabis médical pour des douleurs chroniques liées à un accident et des symptômes de stress post-traumatiques. La marijuana l’a aidé à réduire considérablement sa prise d’opioïdes et d’anxiolytiques.

« Depuis mardi dernier, on est un peu dans le vide. Je prends des produits très spécifiques pour soigner mes symptômes, et il n’y a pas moyen de savoir quand ils seront de nouveau disponibles. J’ai essayé d’aller à la SQDC pour trouver un produit de remplacement, mais ils ne savaient pas quoi me répondre. Alors j’essaie de “toffer” comme je peux, et ce n’est pas facile », dit l’ancien combattant, qui a demandé qu’on taise son nom complet pour garder la confidentialité de son dossier médical.

Son fournisseur habituel, MedReleaf, a annoncé encore hier être à court de plusieurs souches pour ses clients médicaux.

L’entreprise commercialise aussi du cannabis pour le marché récréatif à la Société québécoise du cannabis (SQDC) sous la marque San Rafael ’71, dont trois produits sont en rupture de stock.

MedReleaf et sa société mère Aurora n’ont pas rappelé La Presse, mais affirment sur Facebook que ces pénuries sur le marché médical « ne sont pas liées au marché récréatif », mais plutôt à de nouvelles règles d’étiquetage qui l’obligent à réemballer plusieurs produits. De nombreux patients doutent fortement de cette affirmation sur les réseaux sociaux et avancent que les produits médicaux ont été détournés pour répondre à la forte demande du marché récréatif.

Hexo, plus important fournisseur de la SQDC, dit pour sa part avoir « mis de côté » des produits pour assurer que ses patients médicaux ne soient pas touchés. « Nous avons dû porter notre délai de livraison à 48 heures, plutôt que 24 heures, et les nouvelles règles d’emballage y sont certainement pour quelque chose. Mais jusqu’à maintenant, nous n’avons pas eu de problème d’approvisionnement du côté médical », a assuré la porte-parole Isabelle Robillard.

Tilray, autre important fournisseur, indique sur sa page Facebook éprouver des « ruptures temporaires » pour certaines souches et dit espérer y remédier « vers la fin du mois ».

Des produits convoités

Des cliniques spécialisées dans le traitement des patients du cannabis médical affirment que des ruptures de stock semblables touchent aussi d’autres fournisseurs. « Il semble y avoir une pression accrue chez les fournisseurs depuis la légalisation », note Guillaume Fortin, coordonnateur infirmier à la clinique Santé Cannabis.

« Certains produits sont maintenant devenus beaucoup plus difficiles à obtenir, en particulier au niveau des souches à haute teneur en THC (plus de 20 %). »

— Guillaume Fortin, coordonnateur infirmier à la clinique Santé Cannabis

Véronique Lettre, cofondatrice de la clinique NatureMédic, de Magog, précise que les ruptures de stock sont relativement fréquentes pour les patients du cannabis médical. « Nous, c’est l’huile de CBD [une substance non psychoactive du cannabis réputée avoir des vertus anti-inflammatoires et anti-anxiogènes) que nos patients ont de la difficulté à trouver. Quand les clients sont habitués à ces produits, c’est très difficile pour eux d’en utiliser un autre. »

« C’est fou comment la demande est forte. Les fournisseurs disent qu’ils privilégient leurs clients médicaux, mais permettez-moi d’en douter », ajoute-t-elle.

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