Opinion

Le parti pris anticycliste du SPVM

Le 18 septembre, vers minuit, j’ai été renversée par un VUS rue Sherbrooke alors que je circulais à vélo.

J’étais immobilisée à l’intersection de la rue Union (où il n’y a pas de feux de circulation) et j’ai regardé plusieurs fois à gauche et à droite avant de m’engager pour traverser la voie, constatant qu’il n’y avait aucune voiture en vue. Mais un VUS, dont les phares étaient éteints, m’a happée de plein fouet à 20 km/h.

L’information concernant la vitesse du véhicule m’a été communiquée par un policier alors que les ambulanciers m’embarquaient. Ce même agent a inscrit le numéro de l’incident sur une petite carte qu’il a glissée dans mon sac à dos.

Après une dizaine d’heures au trauma de l’Hôpital général de Montréal, j’ai reçu mon congé. Je m’en suis tirée avec deux fractures (hanche et sacrum), en plus de douleurs un peu partout dans le corps et d’un bon choc nerveux. Depuis, je suis sur la morphine, je me déplace avec une canne, mais suis incapable de faire davantage que quelques pas. Je suis clouée au lit et je dors beaucoup.

SOUS LE CHOC

Quelques jours après les événements, j’ai pris mon courage à deux mains pour appeler le SPVM afin de connaître les détails de l’accident dont j’ai été victime : le récit des témoins, du conducteur, etc.

Eh bien, ce fut l’horreur. Après avoir raccroché, j’étais sous le choc et j’avais envie de pleurer de rage.

D’abord, d’un ton froid et méprisant, on m’a indiqué qu’on ne fournissait pas de rapport d’accident, puis à force d’insister, on m’a dit que oui, on pouvait peut-être le fournir, moyennant 15 $ pour la photocopie, mais qu’il fallait me déplacer en personne.

J’ai dû insister pour au moins connaître verbalement le contenu du rapport, non sans ressentir le profond agacement que je causais à mon interlocutrice. « Je suis désolée, je ne me fais pas frapper tous les jours, j’aimerais seulement connaître les détails de ce qui s’est passé SVP », lui ai-je dit.

C’est alors que j’ai appris que le rapport comprenait uniquement la version du conducteur, non seulement parce que les enquêteurs n’ont pas cru bon de m’interroger (bien que je n’ai jamais perdu conscience et que j’étais en état de répondre, comme l’ont constaté les ambulanciers), mais on n’y retrouve aucun autre témoignage, alors qu’il y avait des témoins, dont une bonne samaritaine qui m’a tenu la main jusqu’à l’arrivée des ambulanciers.

Pire, le conducteur, j’imagine pour se protéger, y affirme que j’ai surgi devant lui de nulle part, une affirmation totalement absurde !

Traitez-moi de naïve, et vous aurez bien raison, mais je croyais que les policiers avaient un minimum de considération pour leur travail et leurs concitoyens.

Je constate dans ma chair le parti pris des forces policières envers les automobilistes, de même que la déconsidération totale dont sont victimes les cyclistes, que la police considère comme des citoyens de seconde classe.

L’analyse que je fais du choix de ne pas accorder de crédit à la voix de la victime et à celles des témoins, de même que du ton avec lequel on m’a parlé, est que, lorsqu’il est question d’un cycliste, la cause est entendue : ce sont TOUS des cowboys.

Bien sûr, certains me diront de porter plainte, de faire valoir mes droits, puisqu’un tel rapport bâclé n’est pas acceptable. Théoriquement, ils ont raison, mais cela n’est pas très réaliste considérant le fait que je suis en convalescence pour les six prochaines semaines et que je suis techniquement incapable de me déplacer.

Ainsi, ma lettre vise plutôt à exprimer mon désarroi quant au double standard dont sont victimes les cyclistes et ma consternation quant au fait qu’une seule version soit retenue par les policiers en cas d’accident : celle des automobilistes.

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