Question d’éthique 

Comment gérer la surcharge de travail ?

Chaque semaine, nous réfléchissons à un dilemme éthique où les principes et les valeurs s’entrechoquent. Parce qu’il arrive que la réponse ne soit pas simple, Pause invite les lecteurs à soumettre une question qui les préoccupe.

Mise en situation

Une infirmière est appelée à faire des heures supplémentaires. Épuisée, éprouvant des problèmes de concentration, elle a l’impression qu’elle ne pourra pas accomplir son travail tout en respectant son code professionnel. De plus, la pression à l’hôpital fait en sorte qu’elle n’a pas le temps d’accorder le temps voulu à chacun de ses patients. Elle éprouve un conflit de valeurs entre son désir d’offrir une présence chaleureuse et réconfortante d’une part, et l’obligation d’efficacité d’autre part. Elle vit un véritable dilemme éthique. Que devrait-elle faire ?

La réponse de Jacques G. Ruelland, Ph.D, professeur à la retraite de l’Université de Montréal et auteur de nombreux ouvrages sur l’éthique et la philosophie.

« Tout d’abord, établissons une chose : l’éthique, c’est la recherche du bien. Et en bioéthique, ce bien est le bien du patient. Le problème dans le milieu de la santé, c’est qu’on peut avoir trop de patients, et il devient alors impossible de faire du bien à chacun d’entre eux. Il faut alors faire des choix et prendre des décisions en fonction du bien du patient.

« L’infirmière peut donc commencer par se demander quelle est l’origine de son malaise éthique : ses compétences ou le temps disponible pour effectuer sa tâche ?

« Dans sa recherche de solution, l’infirmière doit se sentir libre. On ne peut pas faire le bien si on est contraint, si on ne fait pas un choix librement.

« Si on établit que l’infirmière subit des contraintes d’horaires, on peut donc dire qu’elle n’agit pas librement. Dans ce cas, ce sont les normes qui devraient s’adapter aux valeurs de l’infirmière (et de ceux qui travaillent dans le domaine de la santé).

« Quand on a le sentiment de ne pas faire son travail comme il faut, on n’est pas en conformité avec sa conscience. »

— Jacques G. Ruelland

« Revenons à notre infirmière. Elle se demande : “Qu’est-ce qu’on attend de moi ? Que je soigne les patients.” Ensuite elle doit déterminer quelle action elle doit poser pour être bien avec sa conscience. L’idée ici est qu’elle fasse un choix responsable, c’est-à-dire un choix qu’elle sera capable d’assumer. Si l’infirmière est responsable de 50 patients et qu’elle les soigne tous mal parce qu’elle manque de temps, elle n’est pas en paix avec sa conscience. Elle n’est pas satisfaite de son travail. Par contre, elle peut décider d’en soigner seulement 20 ou 25, les plus exigeants, ceux qui, selon son jugement professionnel, ont le plus besoin d’elle. Elle peut prendre la responsabilité de ce choix en expliquant sa décision à ses supérieurs. Elle devrait être capable de l’assumer, car intérieurement, elle sera en paix avec ses valeurs et aura résolu son malaise éthique. »

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