Opinion  Réforme électorale

Pour une démocratie du XXIe siècle

Le vote obligatoire et le vote à 16 ans amèneraient les jeunes à participer davantage au processus électoral

Le vieillissement de la population québécoise est indéniable : en 2031, la population des 65 ans et plus sera plus nombreuse que celle des moins de 20 ans. Le résultat de ce changement démographique est significatif. Vers 2029, la croissance démographique du Québec sera strictement assurée par la migration internationale.

Rapides et inéluctables, ces tendances auront principalement deux conséquences. D’une part, elles pourraient multiplier les conflits intergénérationnels. À l’image de celles du gouvernement Harper, les priorités politiques des prochains gouvernements québécois risquent fort d’être alignées sur les intérêts du groupe démographique le mieux représenté politiquement : les 65 ans et plus. 

Des investissements dans les soins de santé, la sécurité et le soutien aux aînés sont à prévoir et pourraient se faire au détriment de ceux, par exemple, en éducation. D’autre part, l’accroissement de la population immigrante aura ses effets sur la nature des enjeux électoraux, notamment en périphérie, où se situent les circonscriptions les plus compétitives. Le débat sur la Charte des valeurs n’est sans doute que le début d’une lutte annoncée qui pourrait faire croître les clivages intergénérationnels.

Ces conséquences politiques s’expliquent en partie par la participation électorale inégale des différents groupes démographiques. Les électeurs des nouvelles générations votent en moins grand nombre que ceux des générations antérieures, si bien qu’il y a un écart de plus de 20 points entre le taux de participation des électeurs présentement âgés de 25 à 34 ans par rapport à ceux du même groupe d’âge en 1985.

Les conséquences de la diminution du poids démographique des nouvelles générations de Québécois sont claires : ceux-ci choisiront de moins en moins leurs représentants élus et contribueront ainsi à augmenter le déficit démocratique.

Toutefois, nous estimons que trois réformes ont le potentiel de renverser les effets politiques pervers produits par les présents changements démographiques : l’institution du vote obligatoire, l’abaissement de l’âge légal de voter et la mise en place d’un mode de scrutin mixte compensatoire.

RENOUVELER LE CONTRAT SOCIAL

Il ne fait aucun doute que le caractère obligatoire du vote, surtout s’il est accompagné de sanctions légales, inciterait les électeurs à se rendre aux urnes en plus grand nombre. Par le biais du vote obligatoire, le taux de participation augmenterait de 12 points, et encore davantage si l’âge légal de voter était simultanément abaissé à 16 ans. L’exemple du Brésil, où le vote est optionnel pour les électeurs âgés de 16 ou 17 ans et de 70 ans et plus, mais obligatoire pour les autres, est des plus pertinents pour le Québec.

La troisième réforme vise le mode de scrutin. Il est bien connu que le scrutin majoritaire uninominal à un tour favorise largement les grands partis politiques. Un système mixte compensatoire, qui introduirait un élément de proportionnalité dans notre mode de scrutin actuel, permettrait une meilleure représentation politique des intérêts des différents segments de la population. Le Québec aurait tout à gagner à suivre l’exemple de l’Écosse, qui donne aux électeurs deux votes, à savoir un pour désigner un candidat local, et l’autre pour choisir un parti. Avec ce deuxième scrutin, les partis reçoivent des sièges additionnels en fonction de la proportion des votes obtenus. 

Une telle réforme augmenterait assurément le nombre de partis au parlement et favoriserait de ce fait la formation de gouvernements de coalition. Encore une fois, l’exemple de l’Écosse, avec laquelle nous partageons le même type de régime parlementaire, nous démontre qu’il est possible d’obtenir un gouvernement stable, même lorsqu’aucun parti n’obtient une majorité des sièges.

Voilà autant de propositions pouvant servir à renouveler le contrat social au Québec et à rendre ses institutions conformes à la réalité démographique du XXIe siècle.

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