ALENA

Rouvrir l’ALENA

L’un des scénarios les plus probables, selon plusieurs experts, est une renégociation en bonne et due forme de l’ALENA, plutôt que sa mise au rancart. Moins de 48 heures après l’élection de Donald Trump, tant le Canada que le Mexique se sont dits ouverts à entamer des discussions à cet égard.

« Si les Américains veulent parler de l’ALENA ou de n’importe quel autre accord commercial, [le Canada] est toujours ouvert pour en discuter avec eux », a indiqué hier le premier ministre Justin Trudeau.

Mercredi, la ministre des Affaires étrangères du Mexique, Claudia Ruiz Massieu, a déclaré sur CNN que l’élection de Donald Trump « est l’occasion de réfléchir si nous devons moderniser » le traité « de manière qu’il soit encore plus avantageux pour les trois pays signataires ». Le Mexique se dit prêt à « moderniser » l’ALENA, mais pas à le « renégocier », a ajouté la ministre.

Il faut dire qu’une renégociation formelle de l’ALENA s’avérera beaucoup plus longue et ennuyeuse qu’un retrait pur et simple de l’accord par les États-Unis, observe le professeur Hervé Prince, de l’Université de Montréal. S’ensuivra une fastidieuse partie de demandes et concessions, qui risque de pénaliser les deux plus petits acteurs du trio nord-américain.

« Dans le contexte actuel, alors que le protectionnisme est en train de monter, je ne pense pas que ni le Mexique ni le Canada n’ont intérêt à rouvrir l’ALENA. »

— Hervé Prince, professeur agrégé et directeur de l’Observatoire de l’intégration économique à l’Université de Montréal

Pierre Marc Johnson, qui a agi à titre de négociateur en chef pour le Québec dans le cadre des négociations de l’accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne, estime lui aussi qu’une renégociation de l’ALENA pourrait soulever une série d’enjeux pour les pays membres. L’issue d’un tel exercice, « essentiellement politique », est impossible à anticiper.

« Le jour où on veut déranger un morceau du puzzle, c’est compliqué », résume M. Johnson.

Bernard Colas, avocat au cabinet CMKZ, croit pour sa part qu’un gouvernement Trump pourrait « très bien » agir en violation des règles de l’ALENA et de l’OMC. Un comportement qui entraînerait sans doute des poursuites du Canada et du Mexique – et constituerait en fin de compte une stratégie pour les forcer à adopter des clauses plus avantageuses pour les États-Unis.

« Ce qui risque d’arriver, c’est que [Trump] risque de nous brasser, comme avec le bois d’œuvre, qu’on veuille négocier pour finalement mettre fin à ce conflit et qu’on trouve un moindre mal à continuer à faire affaire, dit-il. C’est le plus probable. »

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