Opinion : Système public de retraite

Il faut choisir les voies ensoleillées

Au moment où les ministres des Finances du Canada se préparent à une réunion clé qui déterminera l’avenir de notre système public de retraite, je ne peux m’empêcher de penser à mes parents.

Mon père a travaillé de l’âge de 16 ans jusqu’à sa retraite à 65 ans pour le même employeur sans jamais avoir accès à un régime de retraite. Ma mère, trop occupée avec six enfants à la maison, n’a presque pas travaillé. Il n’était pas question d’épargner, ni dans un REER ni ailleurs. Le Régime de rentes du Québec (RRQ), le Supplément de revenu garanti (SRG) et la Sécurité de la vieillesse additionnés n’ont pas suffi pour leur assurer une existence digne. Ils ont vécu leur vieillesse dans la pauvreté, dépendants de l’aide de leurs enfants.

Lorsque ces régimes publics ont été créés dans les années 60, le but était d’éviter aux générations suivantes l’appauvrissement qui a frappé le foyer de mes parents.

Malheureusement, à l’époque, il avait été convenu de limiter l’importance des régimes publics dans le but de laisser à l’épargne privée une place prépondérante.

Mais l’épargne privée est nettement insuffisante encore aujourd’hui. Environ 2 % des revenus de nos retraités actuels proviennent des REER ! Les employeurs s’étaient engagés à compléter les modestes programmes publics par des régimes complémentaires de retraite (RCR) accessibles aux employés. Mais, 60 % des Québécois n’ont pas accès à ces fameux régimes d’employeurs.

Le rapport annuel 2015 du RRQ indique que la rente moyenne versée est de 490 $ par mois. Quant au SRG, qui est en quelque sorte l’aide sociale des aînés, près de la moitié des retraités du Québec est assez démunie pour en bénéficier !

MARGE DE MANOEUVRE

Ainsi, 50 ans plus tard, le Canada fait piètre figure au chapitre de la préparation de la retraite. Il faut donc voir comme une bonne nouvelle le fait que le taux de cotisation cumulé des travailleurs et des employeurs canadiens au régime public de pensions est, de très loin, plus bas que n’importe quel autre pays riche comparable (même les États-Unis !) ; car ceci signifie qu’il existe une importante marge de manœuvre pour l’amélioration du Régime de pensions du Canada (RPC) et de sa version québécoise (RRQ).

Mais comment s’y prendre ? Doit-on écouter les associations d’employeurs canadiens qui plaident pour des formules restreintes et ciblées seulement sur les personnes les plus pauvres ? Ou la Fédération des chambres de commerce du Québec qui plaide pour la création d’un régime volontaire permettant aux employeurs de se dégager de leur responsabilité ?

Il existe des voies plus ensoleillées ! Nous demandons à nos ministres provinciaux et fédéral de respecter la vocation universelle du RPC et du RRQ.

En ciblant uniquement les plus pauvres, on laisserait tomber la classe moyenne.

Comme l’a fait le comité d’experts sur l’avenir du système de retraite (rapport D’Amours), nous proposons une deuxième rente entièrement capitalisée et financée à parts égales. Contrairement à ce comité, cependant, nous pensons qu’une rente qui commencerait à 75 ans ne règlerait pas le problème d’appauvrissement actuel. Elle doit commencer dès 65 ans.

Au même coût que dans le scénario du comité D’Amours, on ferait passer la rente de 25 % de remplacement du revenu moyen à 40 %. Mais, avec un point de pourcentage de cotisation supplémentaire par partie, on réussirait à atteindre notre objectif de doubler la rente, c’est-à-dire de viser 50 % de remplacement d’un revenu moyen qui serait rehaussé à 77 000 $ comme dans les régimes de la CNESST et du RQAP. Voilà à quoi ressemblerait un régime public qui permettrait à des millions de personnes âgées de relever la tête !

Le RPC et le RRQ sont d’excellents régimes qui coûtent beaucoup moins cher à administrer que les fonds de placement ou les régimes privés. De plus, la pression énorme que subissent les RCR se trouvera allégée par une amélioration des régimes publics. Ceci serait un gain pour des milliers d’employeurs. Enfin, notre proposition contribuerait à sécuriser les transitions professionnelles et, en ce sens, améliorerait la mobilité de la main-d’œuvre.

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