ÉCOSYSTÈMES
Abandonner la quête du « paradis perdu »
La Presse
L’écologisme peut parfois s’apparenter à la recherche d’un « paradis perdu », mais cette recherche est illusoire et nous éloigne des vrais enjeux.
En effet, les sociétés humaines modifient les écosystèmes depuis des millénaires et il faut en tenir compte dans nos objectifs et nos politiques de conservation.
C’est en résumé la conclusion d’une étude publiée récemment dans la revue
de la National Academy of Sciences des États-Unis.« Plutôt qu’un retour impossible à des conditions vierges, ce qui est requis est une gestion d’écosystèmes émergents pour garantir le maintien des services écologiques », affirment les auteurs de l’équipe dirigée par l’archéologue Nicole Boivin, directrice de recherche en archéologie de l’Université d’Oxford, en Angleterre.
Les auteurs se sont appuyés sur des dizaines de recherches publiées récemment et qui exploitent des technologies et méthodes de plus en plus sophistiquées, comme la génétique ou les microfossiles, pour étudier les rapports entre les communautés humaines et la nature.
« Reconnaître l’impact durable de l’humain sur la biodiversité globale nous donne une clé pour comprendre les interactions contemporaines entre l’humain et l’écologie et les transformations à venir. »
— Extrait de l’étude
Pour John Smol, professeur et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les changements environnementaux, la recherche est « très reliée » à son travail.
« Dans notre laboratoire, nous remontons le temps et nous essayons de trouver ce qui est “naturel”. Et les humains ont un impact depuis longtemps. »
Mais, ajoute-t-il, l’étude de M
Boivin « est très eurocentrique ». Il souligne que la plus grande part du Canada était quand même vierge à la préhistoire.Il se dit aussi « un peu inquiet de voir ce que certains militants conservateurs vont en retenir ».
« Ils vont dire : “Vous voyez, ça ne sert à rien de conserver quoi que ce soit, il n’y a rien de vraiment naturel.” Alors que ce que ça montre, au contraire, c’est que les écosystèmes sont très sensibles et ont enregistré l’impact des humains même depuis l’époque préhistorique. Et aujourd’hui, nous sommes 7 milliards. Notre impact est massif. On crée constamment de nouveaux produits chimiques. On déplace des espèces invasives à un rythme sans précédent. Et on modifie l’atmosphère à un rythme aussi sans précédent. »