COVID-19

Le Québec franchit la barre des 1000 cas confirmés

Québec — Après une deuxième journée où le nombre de cas confirmés de la COVID-19 a fortement augmenté, le Québec, province la plus touchée au Canada par la pandémie de coronavirus, devient la première à fracasser la barre des 1000 personnes infectées.

Au moment de publier, 1013 personnes avaient reçu la confirmation qu’elles avaient le virus, une augmentation de 385 cas en une journée. Les hôpitaux québécois soignent actuellement 67 patients, dont 31 sont aux soins intensifs. Le bilan des morts reste stable avec 4 décès à ce jour.

« Ce n’est pas pour rien qu’on a dit trois semaines » pour fermer les commerces non essentiels, a dit mardi François Legault, ajoutant qu’il « espère que c’est la période pendant laquelle on va être capables de commencer à voir une stabilisation » du nombre de nouveaux cas.

Si les autorités ne nient pas qu’il y ait actuellement de la transmission communautaire au Québec, l’heure est toujours aux investigations, a soutenu le directeur national de santé publique, Horacio Arruda.

« On est encore dans cette phase d’enquêter chacun des cas et d’investiguer ce qui se passe autour de ces cas-là », a-t-il indiqué.

La direction de santé publique de Montréal a également confirmé mardi qu’il y a 300 cas avec « évidence de transmission communautaire » dans la métropole. Le dernier bilan fait état de 439 personnes atteintes de la COVID-19 à Montréal.

«  [De] la transmission locale, il doit y en avoir […] pas seulement à Montréal, mais elle n’est pas pareille d’un territoire à l’autre, a ajouté le Dr Arruda. Cette pause que l’on prend actuellement, c’est une façon de diminuer la transmission locale. »

Lundi, le Dr Arruda affirmait qu’entre 40 et 60 % des cas détectés au Québec étaient encore en lien avec des voyages à l’étranger. Dans la capitale nationale, par exemple, on confirmait mardi que les 46 nouveaux cas déclarés étaient tous liés à des personnes qui avaient été en contact avec des voyageurs ou des cas positifs.

Une situation stressante

François Legault a reconnu mardi que la pandémie crée beaucoup d’anxiété au sein de la population. « Je sais qu’il y a des travailleurs qui ont perdu leur emploi et qui se demandent quand et s’ils vont retrouver leur emploi », a dit le premier ministre, alors qu’il ordonnait la veille que cessent toutes les activités économiques non essentielles jusqu’au 13 avril afin de limiter la propagation du virus.

« Je vous comprends de vivre des situations stressantes, c’est juste normal, mais ce que je veux vous dire, c’est que tout ça, c’est temporaire. On n’est pas pris là-dedans pour toujours », a-t-il insisté.

Le premier ministre a aussi reconnu que plusieurs entreprises avaient communiqué avec le gouvernement après que celui-ci eut ordonné qu’elles cessent temporairement leurs activités.

« Je comprends que plusieurs sont frustrés, mais en même temps, c’est important de répéter pourquoi on fait ça : pour protéger la vie de beaucoup de personnes. »

— Le premier ministre François Legault

« Ce sont des mesures qui sont dures pour les entreprises, c’est certain que ça va faire mal à l’économie, ça va faire mal aux entreprises, [mais] on va s’occuper autant que possible des entreprises par la suite », a-t-il ajouté.

Une situation toujours en contrôle

En entrevue avec La Presse, l’épidémiologiste Nimâ Machouf a rappelé que l’augmentation rapide du nombre de cas confirmés au Québec s’expliquait toujours, à ce stade-ci, par le fait que l’on teste beaucoup de gens.

« Il y a même des tentes qui sont installées dans des stationnements pour accélérer l’accès aux tests. Plus on va faire de tests, plus on va détecter des personnes positives », a-t-elle affirmé.

La scientifique n’explique pour l’instant pas pourquoi le Québec arrive en tête du nombre de cas confirmés de la COVID-19 au pays. La province utilise-t-elle la même méthodologie qu’ailleurs ? Plus de tests sont-ils effectués ici ? La semaine de relâche du Québec, qui arrive plus tôt qu’en Ontario, a-t-elle mis davantage de voyageurs à risque, alors que des restrictions de voyage n’étaient pas encore annoncées ? Ces questions demeurent ouvertes.

Mais Mme Machouf s’est dite rassurée mardi de constater que le taux d’hospitalisation est pour l’instant inférieur à ce que prévoyait le gouvernement dans ses scénarios.

« Ce qui nous réconforte, c’est que le taux d’hospitalisation est à environ 7 ou 8 % pour l’instant, alors que le ministère de la Santé s’est préparé à un taux de 15 %. On est très correct, mais c’est sûr qu’on est encore au tout début de l’augmentation de notre courbe épidémique. Il faut s’attendre tout au long de la prochaine semaine d’avoir un nombre de cas importants qui seront confirmés », a-t-elle prévenu.

Des discussions avec Ottawa

François Legault a soutenu mardi qu’il est encore « prématuré » pour le gouvernement Trudeau d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Le premier ministre faisait ainsi écho à l’appel téléphonique tenu la veille entre les provinces et Ottawa. « C’est important que le Québec garde toute sa flexibilité », a prévenu M. Legault.

« Je comprends que dans une situation idéale, on pourrait prendre le temps de tout uniformiser dans les provinces, mais la situation est différente d’une province à l’autre et puis je pense que c’est important que le Québec garde toute la marge de manœuvre pour mettre en place des mesures rapidement », a-t-il expliqué.

François Legault a également réitéré auprès d’Ottawa que la « priorité des priorités » est l’approvisionnement en matériel médical, surtout les équipements pour exécuter les tests, comme les écouvillons. Il assure cependant que le Québec est suffisamment équipé pour encore « quelques semaines ».

« On pense que la crise va durer plus que quelques semaines, a-t-il souligné. Il y a des commandes qui sont passées. Il faut voir si elles vont être respectées […] C’est important que le gouvernement fédéral donne un coup de main pour s’assurer qu’après ces quelques semaines, on va continuer d’avoir tous les équipements nécessaires. »

La ministre de la Santé, Danielle McCann, a aussi voulu être rassurante après que des membres du personnel du réseau de la santé se sont montrés inquiets dans certains médias quant à la disponibilité de masques et de blouses de protection (« jaquettes »).

« Il y en a assez pour toutes les régions. On révise chaque jour et les consignes sont transmises à tous les établissements du Québec. »

— La ministre de la Santé, Danielle McCann

François Legault a par ailleurs évoqué publiquement le fait que le fédéral pourrait acheminer dès le 6 avril les premiers chèques aux travailleurs qui auront besoin de l’assurance-emploi. « Bon, M. Trudeau m’a dit que les chèques vont être disponibles le 6 avril. Ça, c’est dans deux semaines », a-t-il relaté devant les journalistes.

L’affirmation de M. Legault a surpris à Ottawa. On précise que c’est plutôt le nouveau système pour traiter le nombre très élevé des demandes qui doit être prêt autour du 6 avril prochain. Lorsque le système sera en fonction, il faudra de trois à cinq jours pour traiter une demande et procéder au versement du montant, a indiqué une source gouvernementale.

Oui à la marche… et au vin !

Au cours des prochaines semaines, le gouvernement Legault demande toujours aux Québécois de rester à la maison, dans la mesure du possible, sauf s’ils travaillent dans les services essentiels, pour aider une personne âgée en lui apportant à la maison son épicerie, entre autres, ou pour aller faire une marche.

« C’est important qu’il n’y ait pas de chaos dans la société. La décision de laisser la SAQ et la SQDC ouvertes va aussi dans ce sens-là. Je ne veux pas qu’il y ait une ruée vers la boisson qu’il y a dans les épiceries », a ajouté le premier ministre, ajoutant avec le sourire que « pour réduire le stress, il faut faire de l’exercice, comme prendre une marche, mais parfois, un verre de vin peut aider ».

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