Personnalité de la semaine

Dr Judes Poirier

Avec son équipe, le Dr Judes Poirier a découvert qu’une variante génétique relativement fréquente au sein de la population confère une protection substantielle contre la maladie d’Alzheimer.

Une variante d’un gène ayant pour rôle de régler la production et la mobilisation du cholestérol dans le cerveau modifierait l’évolution de l’alzheimer et pourrait même retarder le déclenchement de la maladie jusqu’à quatre ans.

Cette découverte apporte de nouvelles pistes de recherche dans la prévention de cette terrible maladie. « Depuis une dizaine d’années, on a testé plus d’une centaine de médicaments pour traiter l’alzheimer, sans grand succès. La communauté scientifique se réveille enfin et commence à réaliser que les grandes approches privilégiées dans le traitement de la maladie n’avancent à rien », affirme le Dr Judes Poirier, professeur titulaire au département de psychiatrie et de médecine à l’Université McGill et directeur de l’unité de neurobiologie moléculaire de l’Institut Douglas.

Pour le Dr Poirier, les résultats de ses recherches corroborent une fois de plus l’idée qu’il existe un lien entre le cholestérol et la maladie d’Alzheimer. « Même si le cerveau ne représente que 2 % de tout le poids du corps, il contient 25 % de tout le cholestérol », souligne-t-il.

« Le cholestérol est le meilleur isolant pour les fils électriques de notre cerveau. Il isole quand nos neurones se touchent. » — Dr Judes Poirier

Le chercheur québécois a présenté ses résultats en marge de la dernière Conférence internationale de l’Association Alzheimer à Copenhague. Une partie de la communauté scientifique reste toutefois sceptique devant les découvertes du Dr Poirier, bien que ses recherches aient été menées sur une cohorte canadienne et deux groupes américains bien distincts. « En résumé, on nous a demandé de vérifier nos résultats deux fois plutôt qu’une », ajoute-t-il.

PRÉVENIR PLUTÔT QUE GUÉRIR

Le Dr Judes Poirier et son équipe ont même identifié des molécules utilisées dans de vieux médicaments anticholestérol qui seraient susceptibles de prévenir cette forme de démence. Ces molécules tirées de plantes, et qui pénètrent directement dans le cerveau, pourraient réduire jusqu’à 50 % les risques d’être atteint de la maladie.

« Le problème aujourd’hui, c’est que ces molécules sont retirées du marché parce que leur brevet est expiré. Et les nouvelles molécules utilisées agissent maintenant directement dans le sang, sans passer par le cerveau », explique le chercheur.

Mais Judes Poirier, sommité dans le domaine du vieillissement, de la maladie de Parkinson et de l’alzheimer, n’a pas dit son dernier mot. Le cas échéant, il est même prêt à faire du lobbying auprès du gouvernement pour qu’une vieille molécule prometteuse soit remise sur le marché afin d’aider à la prévention de la maladie.

« L’alzheimer est une maladie qui coûte très cher à la société. Plus de 600 milliards de dollars sont dépensés annuellement dans le monde pour l’alzheimer. Ça représente de 15 à 18 milliards seulement pour le Canada, et 2,5 milliards au Québec. »

Pour le Dr Judes Poirier, la solution réside à n’en pas douter dans la prévention. « Quand un patient s’assoit devant nous et que, au terme de nos tests cognitifs, un diagnostic d’alzheimer est prononcé, c’est de 65 à 75 % de ses neurones qui sont morts. Il est déjà trop tard. »

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