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Bonne nouvelle : la portée des fausses nouvelles serait limitée

Les fausses nouvelles font l’objet d’un vaste débat aux États-Unis et au-delà depuis l’élection présidentielle américaine, mais l’ampleur du phénomène demeure méconnue. Une nouvelle étude émanant de l’Université Northwestern suggère qu’elle pourrait être moindre que ne le suggère l’intensité des discussions.

Pourquoi étudier les fausses nouvelles ?

La victoire de Donald Trump a pris de court nombre d’analystes et de journalistes qui n’avaient pas considéré la possibilité que le candidat républicain remporte la mise. La circulation en ligne de fausses nouvelles est devenue, dans le débat subséquent, un des facteurs régulièrement évoqués pour tenter d’expliquer le comportement de l’électorat américain. Les médias sociaux, Facebook en tête, ont été accusés d’avoir contribué à la propagation d’informations trompeuses qui ont pesé sur l’issue du scrutin. La question a aussi été discutée dans plusieurs pays européens où des élections sont prévues prochainement. Le tout sans que l’on ait une idée précise de l’importance des fausses nouvelles, tant sur le plan quantitatif que qualitatif.

Comment combler cette lacune ?

Jacob Nelson, étudiant au doctorat à l’Université Northwestern, a entrepris de quantifier l’importance du phénomène en comparant la fréquentation en ligne d’une série de sites de médias établis aux États-Unis et de sites de fausses nouvelles à partir des données de comScore, une firme d’analyse. Les sites de fausses nouvelles considérés ont été tirés d’une liste produite par une professeure du Massachusetts, Melissa Zamders, qui travaille sur l’éducation aux médias. Cette liste, difficile à établir de l’avis de M. Nelson, comprend des sites qui produisent des nouvelles de toute évidence fabriquées ainsi que des sites où des nouvelles sérieuses côtoient des informations trompeuses ou déformées. Les sites d’une vingtaine de médias établis comme The New York Times, CNN et Fox News ont parallèlement été retenus.

Qu’a révélé l’analyse ?

Le chercheur a d’abord étudié le nombre de visiteurs uniques par mois pour chaque catégorie de site et a établi leur fréquentation moyenne avant de les comparer. L’exercice a amené le chercheur à conclure que le public intéressé par les sites de fausses nouvelles n’était « pas très important », puisque la moyenne de visiteurs uniques obtenue pour les sites de médias établis était 10 fois plus importante. Il a aussi observé que le nombre de visiteurs des sites de médias établis a augmenté progressivement durant la période ayant précédé l’élection américaine de novembre 2016, alors que le total est demeuré pratiquement inchangé pendant la même période pour les sites de fausses nouvelles. Il a également déterminé qu’une fraction importante des personnes consultant des sites de fausses nouvelles va aussi consulter les sites de médias établis.

Faut-il s’inquiéter malgré tout des fausses nouvelles ?

Le chercheur de l’Université Northwestern estime que les résultats obtenus permettent de relativiser l’importance des fausses nouvelles en suggérant que leur portée demeure somme toute limitée. Le fait que les utilisateurs de ces sites consultent aussi des sites de médias établis est « rassurant », dit-il, pour les analystes qui craignent qu’une partie importante de la population ne vive dans une « réalité tordue et séparée ». L’étude, prévient le chercheur, n’a cependant pas permis de déterminer si les utilisateurs de sites de fausses nouvelles consultent les sites de médias établis pour élargir leurs horizons ou pour conforter ce qu’on leur dit sur les premiers.

Facebook joue-t-il un rôle important ?

Les données recueillies par Jacob Nelson suggèrent que Facebook joue effectivement un rôle important dans la dissémination de fausses nouvelles. Près de 30 % du trafic sur les sites de fausses nouvelles retenus provient de ce média social, soit pratiquement quatre fois plus que pour les sites des médias établis qui ont été considérés. L’initiative de l’entreprise de Mark Zuckerberg visant à permettre aux utilisateurs de marquer les articles qui semblent problématiques en vue de les faire vérifier par des médias de renom ou des vérificateurs de faits constitue une avenue intéressante dans ce contexte, note le chercheur. Une collaboration de ce type a notamment été annoncée pour les États-Unis, la France et l’Allemagne.

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