PEAU À PEAU

Les papas kangourous à la rescousse

Depuis quelques années, la « méthode kangourou » intéresse de plus en plus les obstétriciens nord-américains. Il s’agit de mettre le nouveau-né, particulièrement s’il est né par césarienne ou prématurément, peau contre peau avec sa mère le plus rapidement possible après la naissance. De récentes études tentent de voir si les bénéfices sont aussi là quand bébé est posé sur la poitrine velue de son papa.

« Je me suis intéressée à la question parce qu’il y a de plus en plus de césariennes partout dans le monde », explique Shefaly Shorey, une infirmière qui enseigne à l’Université nationale de Singapour et qui vient de publier une méta-analyse sur le sujet dans la revue Midwifery. « Les bébés sont alors souvent séparés de leur mère. Dans ma pratique, j’ai constaté que les bébés pleuraient dans leur incubateur. Je me suis dit qu’ils devaient se sentir bien seuls. »

30 %

Proportion de femmes qui accouchent de leur premier bébé par césarienne au Québec

Sources : ISQ

L’étincelle est venue de Suède. « J’ai discuté avec un professeur suédois qui avait été invité à notre université et j’ai été surprise de constater que chez lui, il y a un système bien établi permettant aux deux parents de prendre leur bébé peau contre peau peu après la naissance, en toute circonstance. Si nécessaire, il y a des chambres spécialement réservées à cette fonction. »

Quand Mme Shorey a fait une revue de littérature, elle a trouvé beaucoup d’études sur les effets pour les mères et leur bébé, mais peu sur les pères.

« Mais les quelques résultats semblent montrer que comme pour la mère, le contact précoce peau contre peau renforce le sentiment d’attachement du père et aussi celui du bébé. Ça peut avoir des effets à long terme sur le bien-être du bébé et de sa famille. »

— Shefaly Shorey, auteure de la méta-analyse

Des études ont notamment montré que le contact avec la peau du bébé calme mères et pères, ce qui pourrait amplifier le sentiment de calme du bébé à son tour.

Quand le bébé est déposé peau contre peau sur sa mère peu après la naissance, il y a aussi des effets sur sa capacité à contrôler sa douleur et sa température, entre autres bénéfices biophysiologiques. Une revue de littérature publiée par Cochrane en 2012 montrait que l’allaitement est plus fréquent de 27 % quand un bébé est mis en contact avec la peau de sa mère tout de suite après l’accouchement. Évidemment, pour les pères, il ne peut y avoir d’effet sur l’allaitement, nuance Mme Shorey.

À l’hôpital Sainte-Justine, les bébés nés par césarienne sont mis en contact peau contre peau avec leur mère, ou avec leur père si leur mère est trop mal en point, indique le service des communications de l’hôpital pédiatrique montréalais.

L’infirmière singapourienne veut maintenant faire une étude pour voir si les pères qui sont mis en contact peau contre peau après une césarienne, pendant que la mère est en salle de récupération, ont un effet aussi bénéfique sur les bébés. Il s’agit d’une nouvelle avenue de recherche pour Mme Shorey : auparavant, elle a travaillé sur la dépression postpartum, sur le sentiment parental d’être adéquat et sur l’utilisation des applications sur téléphone portable pour éduquer les patients sur leur propre santé.

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