Chronique

Les rumeurs d’expansion se multiplieront

L’obsession des revenus anime la LNH depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle convention collective. La saison prochaine, ceux-ci atteindront 4 milliards. « Et nos meilleures années sont devant nous », affirme Gary Bettman.

Pour poursuivre sur cette lancée, une expansion est nécessaire. La LNH ne laissera pas filer cette extraordinaire occasion d’encaisser des centaines de millions. Voilà pourquoi le commissaire garde toujours la porte ouverte en évoquant ce sujet.

En revanche, l’ajout de quatre nouvelles équipes dès 2017, une perspective avancée par un média américain hier, me semble farfelu. Du coup, aucune ligue ne compterait un plus grand nombre de concessions dans le sport professionnel nord-américain. Même la NFL, qui touche près de 10 milliards en revenus, se limite à 32 formations !

L’intérêt pour le hockey n’est pas généralisé aux États-Unis. La LNH compose toujours avec des situations difficiles en Floride (les Panthers) et en Arizona (les Coyotes). Dans ce contexte, l’addition de quatre nouveaux clubs constituerait une énorme bouchée à avaler.

D’abord, sur le plan des affaires, certains de ces nouveaux venus deviendraient peut-être dépendants du programme de partage des revenus pour boucler leur budget. Or, les organisations riches n’auront sûrement pas le goût de subventionner de nouvelles rivales, alors qu’elles versent déjà une part de leurs profits dans cette caisse centrale.

Ensuite, sur le plan sportif, l’ajout rapide d’une centaine de nouveaux joueurs entraînerait une dilution excessive du produit. Le nombre de matchs somnifères augmenterait, créant ainsi un impact négatif sur les assistances et les cotes d’écoute.

Enfin, une expansion à quatre équipes diminuerait la marge de manœuvre de la LNH pour faire pression sur les gouvernements locaux lorsqu’une de ses organisations est en difficulté.

Un exemple : si le conseil municipal de Glendale a fait pleuvoir les millions sur les Coyotes l’an dernier, c’est en raison de la crainte d’un transfert de concession, à Québec ou Seattle. Si tous les marchés intéressants se retrouvent soudainement avec une équipe, la LNH perdra ce formidable levier de négociation.

***

La LNH a nié, hier, que l’installation d’une nouvelle équipe à Las Vegas était « chose faite ». Et que le circuit accueillerait quatre nouveaux clubs d’ici 2017. Cela lui permettrait, ajoutait-on, de toucher 1,4 milliard en frais d’expansion.

Compte tenu de la valeur actuelle des équipes professionnelles, ce montant semble très bas. Les Bucks de Milwaukee, établis dans un petit marché de la NBA, ont ainsi été vendus 550 millions plus tôt cette année. Il serait étonnant que la LNH se contente d’un paiement de 350 millions par équipe en cas d’expansion.

Cela dit, l’ajout de deux équipes est logique. Et l’établissement de l’une d’elles à Las Vegas est envisageable. Même si cette ville est la capitale du pari et du jeu, un environnement dont le sport professionnel a historiquement voulu se distancier, la LNH n’a jamais écarté cette idée.

À tort ou à raison, les ligues professionnelles ont libéralisé leur approche à ce propos. Les accords promotionnels entre des équipes et des maisons de jeux sont nombreux. Tenez, cet été, les Coyotes ont signé une entente avec les Casinos Gila River pour doter leur amphithéâtre d’un nouveau nom.

La LNH a déjà des liens avec Las Vegas, où elle organise sa remise annuelle des trophées. Un nouvel aréna ouvrira ses portes au printemps 2016. Un des partenaires est la société propriétaire des Kings de Los Angeles. Bref, des relations d’affaires existent entre les intéressés, même si aucun propriétaire n’a encore été publiquement identifié.

À Seattle, la ville dont rêve depuis si longtemps la LNH, la situation est plus complexe. On ignore toujours si un nouvel amphithéâtre sera construit. Un rapport environnemental est attendu cet automne.

Mais même s’il est positif, le chantier n’est pas près d’ouvrir. Les autorités locales ont appuyé le retour de la NBA, pas l’arrivée de la LNH. Pour aller de l’avant sans nouvelle équipe de basketball, l’entente devrait être modifiée, une perspective qui déplaît à plusieurs élus.

Cela dit, un investisseur est intéressé par l’aventure : Victor Coleman, un Canadien établi aux États-Unis, où il a fait fortune dans l’immobilier. Il a rencontré Bettman au printemps et se dit persuadé de mener le projet à terme.

***

La LNH a raison d’être intriguée par l’ajout de deux équipes dans l’ouest du continent. Cela mettrait fin au déséquilibre entre les Associations de l’Est (16 équipes) et de l’Ouest (14 équipes).

Et Québec dans tout ça ? Avant d’envisager une expansion dans la capitale nationale, Bettman voudra sûrement être fixé sur l’avenir des Panthers de la Floride.

Plus tôt cet été, Douglas Cifu, un des copropriétaires de l’équipe, a déclaré que « le modèle d’affaires actuel n’était pas soutenable ». L’organisation exige des fonds publics additionnels pour boucler son budget. Cette demande (86 millions en 14 ans) laisse plusieurs élus songeurs.

De plus, un lobby s’organise afin que cet argent soit plutôt utilisé pour préserver les plages, véritable moteur touristique de la région. La mairesse du comté de Broward, Barbara Sharief, a mandaté un consultant pour examiner quel impact aurait le départ de l’équipe. Son rapport est attendu cet automne.

Québec serait évidemment une destination logique pour les Panthers, comme Winnipeg l’a été pour les Thrashers d’Atlanta.

Quant à Toronto, le peu d’enthousiasme des Maple Leafs face à l’arrivée d’une deuxième équipe dans la région complique les choses.

***

Oui, l’ajout de deux nouvelles équipes est possible dans la LNH. Mais la situation demeure mouvante et des rumeurs comme celles d’hier se multiplieront.

Chose sûre, avec son nouveau Colisée qui ouvrira ses portes l’an prochain, Québec demeure, par expansion ou transfert, une destination de choix pour la LNH.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.