La Presse en mer Méditerranée

Voir l’Italie, et après ?

Après une semaine en mer, l’Aquarius rentre en Sicile pour y déposer ses passagers. Les migrants voient s’approcher l’Europe avec soulagement… et appréhension. Pourront-ils y reconstruire une nouvelle vie ? 

À BORD DE L’AQUARIUS — Quand elle est arrivée à bord de l’Aquarius, Taiwo était au bout de ses forces et peinait à se tenir debout.

Le lendemain, la Nigériane de 31 ans, qui voyage avec son mari et sa fillette de 3 ans, semblait mesurer par où elle était passée. Et la chance qu’elle avait eue d’être toujours vivante.

Sur le coup, elle a retrouvé le sourire. Mais le surlendemain, elle a commencé à s’inquiéter.

« Qu’est-ce qui va se passer en Italie ? Est-ce qu’ils vont nous déporter ? », ne cessait-elle de demander.

Réponse : probablement pas. Pas tout de suite, en tout cas. Une fois qu’elle aura fait sa demande d’asile en Italie, dont le traitement peut prendre jusqu’à un an, elle sera vraisemblablement dirigée vers un centre d’accueil des migrants en Sicile ou ailleurs en Italie.

Si sa demande est acceptée, elle aura un droit de résidence de deux ans – et devra reprendre la procédure par la suite. Sinon, elle sera renvoyée chez elle, avec sa famille.

Pour les mineurs voyageant seuls, la situation est plus facile : ils ont droit à la protection de l’État italien jusqu’à leur majorité. Cela implique, bien sûr, le droit à l’école publique. Par contre, à 18 ans, ils devront passer par le processus de demande d’asile s’ils veulent rester en Europe.

Seule au front

Comme la Grèce au moment de la crise des réfugiés de 2015, l’Italie est seule au front pour gérer cet afflux humain. Les États européens se sont bien entendus sur un projet de relocalisation des migrants dans d’autres pays de l’UE. Mais sur les 39 000 relocalisations planifiées sur deux ans, à peine 6000 ont réellement eu lieu, précise Medea Savary, porte-parole du Haut-Commissariat pour les réfugiés à Catane, en Sicile.

En attendant, la vague migratoire s’intensifie et l’Italie a de la difficulté à l’absorber.

« Les capacités d’accueil sont étirées à l’extrême, les structures d’accueil sont pleines et la circulation est bloquée. »

— Medea Savary

Et ce n’est pas fini. Après avoir laissé débarquer les 267 migrants secourus le 23 juin, l’Aquarius a rejoint les autres bateaux d’ONG dans la zone des sauvetages. 

Le temps était calme et plat. En deux jours, un nombre record de 10 000 migrants en détresse ont été secourus. Et l’été ne fait que commencer.

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