Environnement

« Je veux que nous soyons plus ambitieux »

Le Canada adoptera des cibles plus ambitieuses de réduction de ses émissions polluantes, conformément à l’accord de Paris, mais ne cessera pas tout de suite de subventionner les industries fossiles. C’est ce qu’a indiqué la ministre de l’Environnement Catherine McKenna à La Presse à la veille de son départ pour la COP24.

Des cibles plus ambitieuses… en 2020

« Devons-nous en faire plus [pour réduire nos émissions polluantes] ? Bien sûr ! », s’exclame la ministre canadienne de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna, sans toutefois chiffrer les efforts supplémentaires que le Canada devra faire. Ce n’est d’ailleurs pas à Katowice, en Pologne, où elle arrivera demain pour participer à la 24e Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP24), qu’elle annoncera de nouvelles cibles, mais bien en 2020, comme le prévoit l’accord de Paris, a-t-elle indiqué hier, au cours d’une entrevue accordée à La Presse à Montréal.

Cesser de subventionner les énergies fossiles… en 2025

Catherine McKenna réitère que le gouvernement canadien cessera de subventionner les énergies fossiles « d’ici 2025 », mais n’envisage pas de devancer l’échéance. « Nous sommes en transition, ça ne peut pas se faire du jour au lendemain », argumente-t-elle. Reconnaissant que son gouvernement a « encore du travail à faire », la ministre souligne néanmoins ses investissements dans l’énergie éolienne et solaire, de même que dans les transports en commun, comme dans le train léger sur rail de la capitale fédérale, qui sera « la plus grande réduction [de gaz à effet de serre] dans l’histoire de la ville d’Ottawa ».

Le spectre de Trump

En prévenant que la transition énergétique prendra « des décennies », la ministre McKenna insiste sur l’importance de la réaliser de façon rassembleuse. À moins d’un an des prochaines élections fédérales, l’Alberta, « qui travaille fort » notamment en éliminant le charbon, mais dont « l’économie souffre », préoccupe visiblement la ministre. Si les citoyens « ne sentent pas qu’ils font partie de la transition », perdent leur emploi, « alors les gouvernements changent », dit-elle, en donnant l’exemple des États-Unis, « passés d’un gouvernement complètement investi dans [la lutte contre le] changement climatique à un qui va dans une direction complètement opposée ».

La « nouvelle génération de conservateurs »

Catherine McKenna répète que son gouvernement « a un plan », mais admet rencontrer des défis dans sa mise en œuvre. « On doit lutter contre des gens qui ne veulent rien faire », soupire-t-elle, en blâmant « les provinces, comme l’Ontario, qui reculent sur leurs engagements » et qui ne « veulent pas mettre un prix sur la pollution ». Saluant l’action passée de conservateurs comme Brian Mulroney et George H. W. Bush, qui ont agi « de manière efficace » contre les pluies acides, elle accuse « la nouvelle génération de conservateurs » de minimiser l’importance du réchauffement climatique, en ajoutant qu’ils « ne comprennent pas l’occasion d’affaires » que représente la transition énergétique.

Des négociations difficiles

Catherine McKenna souligne l’importance de la COP24, qui devra déterminer les mécanismes de mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat en prévision de son entrée en vigueur, en 2020, mais prévient que « ça va être des négociations difficiles ». Elle évoque le « besoin » de règles sur la transparence et la responsabilité des parties, de même que sur le rôle du marché, ce qui est « important pour le Québec » en raison de sa participation à la bourse du carbone avec la Californie. « Les entreprises nous disent qu’elles veulent de la transparence, elles veulent voir que les gouvernements sont sérieux. »

Demande d’action collective contre Ottawa

Réagissant pour la première fois à la demande d’action collective contre Ottawa déposée la semaine dernière en Cour supérieure du Québec par l’organisation Environnement jeunesse, Catherine McKenna ne s’en offusque pas. « Je suis absolument sympathique aux gens, particulièrement les jeunes, qui veulent que nous soyons plus ambitieux », dit-elle, en ajoutant : « Je veux [aussi] que nous soyons plus ambitieux. » Elle voit dans cette démarche juridique la démonstration que « les gens veulent voir de l’action » contre le réchauffement climatique. « On a besoin d’entendre ces voix, parce qu’on entend aussi des voix qui disent qu’on ne devrait rien faire, qu’on devrait reculer. »

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