Chronique

Le gala TVArtis

Pierre Bruneau. Dave Morissette. Denis Lévesque. Guy Jodoin. Guy Nadon. Charles Lafortune. Cochez impérativement tous ces noms si vous organisez un pool de prédictions pour le gala Artis de demain soir.

Comme la journée de Bill Murray dans Le jour de la marmotte, cette cérémonie célèbre Pierre Bruneau, Dave Morissette et Guy Jodoin tous les printemps, abaissant le niveau de surprise et d’étonnement autour de zéro. Partez ici la chanson I Got You Babe de Sonny et Cher, merci.

Misez aussi sur Guylaine Tremblay et Éric Salvail, deux des rares vedettes qui cassent, année après année, le quasi-monopole des artisans de TVA sur ces prix décernés par le public.

En coulisse, j’entends plusieurs têtes d’affiche des autres chaînes se demander si ça vaut encore la peine d’assister au (trop) prévisible gala Artis, en sachant pertinemment qu’ils en repartiront bredouille. 

Il y a des limites à servir de tapisserie chic ou de plante verte en tenue de soirée.

Oui, mais c’est le public qui attribue les trophées Artis et le public ne se trompe jamais, il parle avec son cœur, il aime de façon inconditionnelle, direz-vous. C’est plus ou moins vrai.

TVA, c’est exact, accapare la plus grosse part de marché de la télé québécoise avec environ 24 % de toute l’écoute. À l’inverse, cela signifie que 76 % des téléspectateurs se branchent ailleurs qu’à TVA, dont Radio-Canada, V ou RDS. En visionnant le gala Artis, on a l’impression que ces 76 % de la population n’existent juste pas.

Le processus de dévoilement des nommés s’est replié sur lui-même en 2017. Par le passé, TVA organisait un gros évènement public, dans une salle remplie de « vrai monde », pour annoncer les finalistes. Pas cette année. C’est Gino Chouinard à Salut, bonjour qui a égrené la liste des heureux élus pendant la dernière semaine du mois de mars. Il fallait que ça reste dans la grande famille TVA, j’imagine.

Cette façon de fonctionner en vase clos ne servira pas TVA à moyen ou à long terme. Les autres réseaux finiront par se lasser et l’étiquette du gala de « toute la télévision » que porte la soirée des Artis se décollera comme du vieux papier peint défraîchi.

Mon journal ne cadre pas non plus dans la stratégie commerciale entourant le gala Artis. Mardi, j’ai sollicité une entrevue avec Guy Jodoin qui pilotera, pour la deuxième année consécutive, cette fête présentée en direct du Théâtre Denise-Pelletier. Aucune nouvelle. Coup de fil à TVA mercredi, pour un suivi. Toujours pas de réponse. Envoi d’un dernier courriel jeudi matin pour vérifier l’état de la situation. Oh, alléluia, un signe de vie : « Ta demande d’entrevue est déclinée, bonne journée. » Woups.

Probablement que Guy Jodoin n’a jamais été mis au courant de tout ça. Il sert de pion dans cette ridicule guerre d’empires, qui n’a pas à pénaliser les artistes.

Malgré ces enfantillages de cour d’école, je ne m’empêcherai jamais de chanter les louanges de séries du Groupe TVA comme Boomerang, Au secours de Béatrice, Blue Moon ou Victor Lessard. Quand c’est bon, c’est bon. Et il faut l’écrire sans se soucier des luttes de pouvoir qui se trament en coulisse. Voilà.

De retour au gala Artis : bien hâte de voir si l’effet District 31 se fera sentir chez les lauréats. La série quotidienne de Luc Dionne a connu un tel buzz que trois de ses comédiens (Magalie Lépine-Blondeau, Gildor Roy et Vincent-Guillaume Otis) ont été retenus au tableau d’honneur. Au moins un des trois policiers de la SRC devrait dire merci au micro, non ?

La fin des Beaux malaises, qui rend Martin Matte et Julie Le Breton non admissibles aux récompenses, ouvre la porte à du changement dans la catégorie des comédies. Antoine Bertrand et Catherine-Anne Toupin de Boomerang y triompheront fort probablement.

Et la flamme des téléspectateurs pour les deux interprètes principaux de Feux, Maude Guérin et Alexandre Goyette, brûlera-t-elle encore dimanche soir ? Les catégories de séries saisonnières réunissent du gros calibre, dont Marc-André Grondin (L’imposteur), Éric Bruneau (Blue Moon, Mensonges), Vincent Leclerc (Les pays d’en haut), Charles Lafortune (Karl & Max), ainsi que Mélissa Désormeaux-Poulin (Mensonges, Ruptures), Sarah-Jeanne Labrosse (Les pays d’en haut), Fanny Mallette (Feux, Mensonges) et Karine Vanasse (Blue Moon).

L’an passé, TVA a raflé 11 des 16 statuettes, contre 2 pour Radio-Canada, 2 pour V et 1 pour VRAK. L’ordre mondial préétabli sera-t-il bientôt renversé ? Réponse : LOL.

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