Production de Vins québécois

Impossible de répondre à la demande

Ils plantent plus de vignes. Ils agrandissent les surfaces cultivées. Malgré tout, les vignerons québécois, victimes de leur succès causé notamment par l’arrivée des vins d’ici sur les rayons des épiceries et des dépanneurs en décembre 2016, ne réussiront jamais à répondre à la demande, affirme sans détour Yvan Quirion, président du Conseil des vins du Québec, association qui représente les acteurs de l’industrie viticole.

Depuis l’été dernier, plusieurs vignerons qui ont réussi à conquérir une plus large clientèle peinent à fournir un nombre suffisant de bouteilles. Avant 2016, les vins du terroir n’étaient offerts qu’à la SAQ et dans les marchés spécialisés. Maintenant, supermarchés et dépanneurs offrent aussi des bouteilles d’ici. Or, un constat s’impose : « On va toujours manquer de vin si on continue à être obsédés par la qualité », avance M. Quirion, également copropriétaire du Domaine St-Jacques en Montérégie. Or, au-delà de la capacité à produire, c’est l’amélioration de la qualité du produit qui figure parmi les objectifs poursuivis par les vignerons, assure-t-il.

De son côté, le vignoble Les Pervenches vend tout son vin, depuis deux ans… avant même qu’il ne soit embouteillé, soit au total 20 000 bouteilles. D’ici deux ans, la copropriétaire Véronique Hupin et son conjoint devraient être en mesure d’augmenter ce nombre à 23 000. Une quantité qui ne sera toutefois pas suffisante pour satisfaire la clientèle. Mais le couple n’a pas l’intention d’augmenter sa production. « Sinon, on va devenir des gestionnaires de bouteilles, dit-elle en riant. Déjà, mon mari et moi trouvons qu’on ne passe pas assez de temps sur nos vignes… »

On veut produire davantage

Toutefois, même s’ils savent qu’ils ne pourront répondre à la demande, le patron du Domaine St-Jacques admet que lui-même ainsi que plusieurs de ses compatriotes souhaitent produire davantage de vin. 

« On s’est donné comme objectif de produire 10 millions de bouteilles d’ici 2030. »

— Yvan Quirion, président du Conseil des vins du Québec

En ce moment, il se produit environ 2,5 millions de bouteilles annuellement, presque le double de ce qui se faisait il y a cinq ans. Pour y arriver, il faut plus de vignes. « Tout le monde veut agrandir ses surfaces », dit-il. Le nombre d’hectares de raisins destinés à la production de vin est passé de 340 il y a six ans à 802.

Jean-Paul Scieur, copropriétaire du vignoble Le Cep d’Argent à Magog, fait partie de ceux qui veulent prendre de l’expansion. « Dans les deux dernières années, on a doublé notre surface, souligne celui qui est également président de la Fête des vendanges Magog-Orford. On a ajouté 60 000 plants. »

Pour arriver à produire davantage, Le Cep d’Argent a conclu des ententes avec des agriculteurs des environs pour que ceux-ci plantent des vignes que les vignerons achèteront ensuite. « Et on en recherche d’autres [agriculteurs] activement », ajoute M. Scieur.

Et pour cause : les produits du vignoble sont vendus dans 175 épiceries, où on a écoulé 45 000 bouteilles en huit mois. Et quelque 60 000 autres trouvent preneur annuellement à la boutique située sur le site de production. « C’est comme si on avait gagné à la 6/49 ! », lance le vigneron.

Ventes au magasin

Par ailleurs, les supermarchés n’ont pas voulu dévoiler de données concernant les vins québécois offerts sur leurs rayons. Tant chez Metro que chez IGA, on parle d’une croissance constante des ventes depuis 2016. Isabelle Salesse de Metro assure que les produits d’ici bénéficient d’une identification visuelle qui leur est propre. L’enseigne a conclu une entente d’exclusivité pour la vente du vin rosé du vignoble de L’Orpailleur.

Nouveaux produits

Pendant ce temps, les boutiques spécialisées qui avaient le droit de vendre des vins québécois bien avant que la loi ne permette aux supermarchés et aux dépanneurs de le faire doivent maintenant redoubler d’efforts pour dénicher de nouveaux produits afin de se démarquer des grandes surfaces. C’est le cas notamment du Marché des Saveurs au marché Jean-Talon, qui offre à ses clients des vins du terroir depuis une vingtaine d’années. « C’est plus simple quand tu es le seul à vendre des produits québécois, admet Johan Jacques, conseiller à la boutique. Maintenant, ça nous oblige à aller chercher des produits de niche et à trouver d’autres producteurs. » Le magasin fait actuellement affaire avec une quinzaine de vignobles.

VIN QUÉBÉCOIS Quelques chiffres

10,7 millions

Montant des ventes de vin québécois en 2018-2019 à la SAQ

460 330 litres

Quantité de vin québécois vendu en 2018-2019 à la SAQ

135

Nombre de vignobles au Québec

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.