Attitude, la marque qui se veut rassurante

Tout le monde veut du bio ou du nature. Et tout le monde est prêt à en produire. Après tout, quelle clientèle n’aime pas les produits « propres », que ce soit dans l’assiette ou pour la maison ?

Mais est-ce possible de mettre en marché des nettoyants, savons et autres crèmes sans ingrédients potentiellement toxiques qui soient aussi efficaces et abordables que les produits traditionnels, bref, prêts à être embrassés par la grande distribution ? Là est le nerf de la guerre, croit Jean-François Bernier, cofondateur et président de l’entreprise derrière la marque Attitude.

Vous connaissez sûrement ces produits. Il y en a chez Jean Coutu, Provigo, Avril et compagnie, même chez Whole Foods aux États-Unis, ainsi que dans les étalages de diverses grandes surfaces dans 45 pays, de la Scandinavie jusqu’au Japon et en Arabie saoudite, puisque plus de 75 % de la production est exportée.

L’emballage a changé de multiples fois depuis la fondation de l’entreprise en 2006 et bien des gammes se sont ajoutées – pour la maison, pour bébés, pour les enfants, pour les animaux… Mais le concept est toujours le même : Attitude n’utilise pas d’ingrédients « inquiétants ».

Pour Jean-François Bernier, le principe est simple : si de micro-quantités de produits synthétiques peuvent avoir un effet dans nos médicaments, alors pourquoi devrait-on arrêter de s’inquiéter de la présence de micro-quantités de produits synthétiques dans ce qu’on met sur notre peau ? 

« Nous, tout ce qu’on dit, c’est qu’on devrait toujours savoir ce qui contient des ingrédients préoccupants comme les produits cancérigènes, allergènes, mutagènes et les perturbateurs endocriniens. »

— Jean-François Bernier, président d'Attitude

Pour le reste, les consommateurs n’ont qu’à choisir.

Et lui, il leur offre l’option Attitude qui s’affiche clairement : ici, il y a 0 g de « produits préoccupants ».

Et ça marche.

Séduire à l'étranger

Non seulement les gourous de l’Environmental Working Group américain ont appuyé la marque – ces lobbyistes écolos sont devenus la principale référence pour tous ceux qui veulent savoir quels produits sont sans danger pour la santé et pour l’environnement –, mais la clientèle aussi. M. Bernier ne fournit pas de chiffres, mais assure que les ventes sont en pleine croissance, notamment en Asie, et que tout commence avec les produits pour bébés.

Puis l’habitude s’installe, le naturel devient une habitude chez les enfants, chez les parents, et même toutou se retrouve avec du shampoing bio.

Le marché de ce type de produits est en pleine croissance, on le voit partout. Et le PDG dit recevoir régulièrement des offres d’achat pour son entreprise, mais n’y répond même pas. 

« Ce n’est pas ça, le plan. On commence à être bons. Ça va se passer dans les 10 prochaines années. »

Adepte de la méditation, du sport, père d’un petit garçon qui étudie le mandarin, M. Bernier a toujours rêvé d’être entrepreneur. « Je le savais à 14 ans », dit-il. Donc il n’est pas question d’encaisser et d’arrêter.

L’ingrédient-clé de son enfance qui lui a permis de se lancer et d’être là où il est ? L’amour de sa famille, dit-il. Un père comptable, une mère enseignante. Quand on est aimé, explique l’homme d’affaires, « ça aide à tout donner ». On a la force de prendre des risques.

Trimer dur et grandir

Un autre élément important du succès : savoir trouver un équilibre entre la confiance en soi et l’humilité. M. Bernier n’a pas hésité, avec son associé de l’époque, Benoit Lord, à quitter son emploi chez Bombardier, à peine trois ans après sa sortie de l’université, pour acheter une petite entreprise de Saint-Eustache, Bio Spectra, qui produisait des purificateurs d’air à base de charbon. Il se souvient de cette époque avec le sourire. « J’étais dans mon garage, j’étais tellement heureux, c’était ça que je voulais faire. »

Celui qui a aujourd’hui 41 ans, et qui est né à Victoriaville, a toujours su aussi qu’il voulait lancer une entreprise qui vendrait sur tous les marchés. « Notre vie ne serait pas facile si on n’exportait pas », dit-il. Donc, dès le départ, il est parti avec ses huit produits et son idée, dans les foires un peu partout, pour essayer de vendre son concept. Des produits propres pour le corps et la maison.

« On est partis à la dure », dit-il. Sans investisseur extérieur. Juste des économies. Des prêts bancaires sans équité dans la société, pour toujours garder le contrôle. « On n’avait pas d’auto, on en faisait, des sacrifices », raconte-t-il.

Et, petit à petit, l’entreprise a grossi.

En 2010, avec l’aide de la Banque Nationale et du fonds de la CSN, M. Bernier a racheté la part de Benoit Lord, qui est parti étudier la médecine.

La particularité de la croissance : elle s’est faite en gardant la quasi-totalité du travail en interne. « C’est ce qui nous donne notre agilité », dit-il. Du design des emballages à la mise en marché, en passant par le développement des produits, tout se passe dans les jolis bureaux du Mile End aménagés par Bipède Design, salle de sport et cafétéria architecturale incluses. « Ça nous prend six mois, lancer une nouvelle ligne », une rapidité impensable dans les entreprises qui sous-traitent les différentes étapes de R et D.

Et qu’est-ce qui donne les nouvelles idées, les nouvelles pistes ? Les besoins des gens de l’équipe. « On ne fait pas d’étude de marché ou de recherche de tendances. On se dit : “Si j’en ai besoin dans ma vie, ça doit être la même chose pour d’autres.” Et après, eh bien, après on y va. »

Attitude en chiffres

3

Avant de fonder Attitude avec Benoit Lord en 2005, Jean-François Bernier a travaillé pendant trois ans chez Bombardier en Allemagne et aux États-Unis. De 1997 à 2002, il a obtenu un baccalauréat en génie à l’Université McGill, une maîtrise en gestion (ingénierie financière) à HEC Montréal et il a suivi le programme CFA.

2012

De 2012 à 2014, Jean-François Bernier a suivi le programme OPM (Owner/President Management) de la Harvard Business School.

105

Il y a 30 employés au siège social de la marque dans le Mile End. Si on ajoute les équipes de fabrication et de logistique ainsi que l’équipe commerciale en Europe, on compte 105 personnes travaillant pour Attitude. Le modèle de fabrication est mixte : les équipes d’Attitude fabriquent certains produits elles-mêmes et on donne en sous-traitance la fabrication d’autres éléments. À l’exception des couches et des lingettes, tous les produits sont fabriqués au Québec.

245

Nombre de produits Attitude, si on compte tous les différents emballages dans les différentes langues des 45 pays où ils sont vendus.

95 %

Proportion d’employés qui mangent sur place dans cette entreprise du Mile End qui ressemble à un grand loft relax, avec une salle de yoga vitrée.

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