Réplique : Conflit israélo-palestinien

Une émanation de l’islamisme et non une de ses causes

Claude Castonguay promettait récemment dans ces mêmes pages (« Pourquoi toute cette violence ? », La Presse, 28 août 2016) une « perspective historique » sur les exactions djihadistes qui ensanglantent l’aire arabo-musulmane et l’Occident.

Il a malheureusement failli à la tâche en démontrant une ignorance surprenante des faits historiques et en prenant des raccourcis regrettables.

Il déplore « la création, en 1948, de l’État d’Israël en plein territoire palestinien ». Or, il n’y avait pas de « territoire palestinien ». Il y avait une Palestine sous mandat britannique depuis 1919 où cohabitaient des Arabes, des Juifs et des chrétiens. C’est sur cette terre, des siècles avant que le nom de Palestine ne voie le jour, qu’est né le peuple juif qui l’a habitée de façon ininterrompue.

Il reproche à Israël et à l’Occident de nier aux Palestiniens « le droit de ce peuple d’avoir son propre pays ». Rien n’est plus faux. En 1947, l’ONU a décidé de la partition du territoire de la Palestine sous mandat britannique et de la création de deux États, l’un juif et l’autre arabe. Les Juifs ont accepté cette solution. Les Arabes l’ont rejetée.

Entre 1948 et 1967, le territoire revendiqué pour l’État palestinien était sous contrôle arabe (Gaza sous l’Égypte et la Cisjordanie sous la Jordanie). Près de 20 ans au cours desquels les Arabes auraient pu créer l’État palestinien, mais s’en sont bien gardés. L’objectif n’était pas de créer cet État, mais bien d’éliminer Israël.

M. Castonguay accuse Israël de « s’opposer farouchement à la création d’un État palestinien ». C’est encore faux.

Non seulement Israël avait accepté la résolution onusienne de 1947, mais il a appliqué le principe de cette reconnaissance dans toutes les offres de paix qu’il a faites aux Palestiniens, chaque fois rejetées par leurs dirigeants.

Si Israël a réussi à conclure des accords de paix avec l’Égypte et la Jordanie, il reste que, pour une proportion importante de Palestiniens, dont le Hamas, et des acteurs régionaux comme le Hezbollah et l’Iran, tous mus par les plus intransigeantes des idéologies islamistes, le conflit ne porte pas sur les frontières ou les actions d’Israël, mais sur son existence, tout comme un Occident démocratique et pluraliste est inacceptable pour les djihadistes.

Tandis que des centaines de milliers de musulmans sont tués, torturés et mutilés de l’Afrique à l’Asie centrale, prétendre que la furie islamiste du XXIe siècle est alimentée par le souvenir des Croisades témoigne d’un certain égocentrisme pénitentiel déterminé à faire porter sur les épaules de l’Occident les pires abjections du monde.

UNE CRISE QUI SECOUE L'ISLAM

L’islamisme et le djihadisme illustrent fondamentalement une crise qui secoue l’Islam en opposant entre eux ses divers courants. Il s’agit d’un conflit politique interne au monde arabo-musulman où se confrontent depuis les années 20 les idéologies nationaliste et islamiste dans une lutte sans merci pour définir la modernité arabe ou musulmane.

Certes, certains choix politiques occidentaux ont pu contribuer à exacerber les crises dans l’espace arabo-musulman. Or, l’idéologie islamiste demeure une idéologie nihiliste qui n’est pas en quête de justice et de dignité, mais se voue plutôt à l’élimination de toute altérité, que ce soit l’Occident, les courants musulmans traditionnels et réformateurs, ou encore les minorités sexuelles, ethniques et religieuses.

M. Castonguay croit-il vraiment que, si Israël et la Palestine faisaient la paix, ces grandes secousses mondiales s’apaiseraient comme par enchantement ? Le désir ardent de voir un jour s’installer une paix profitable à Israël et aux Palestiniens, désir que je partage viscéralement, ne doit pas nous mener à la naïveté et à l’angélisme.

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