PÉTROLE À L'ÎLE D’ANTICOSTI

Un rapport fédéral contredit les prévisions de Québec

QUÉBEC — Le gouvernement Couillard a annoncé l’automne dernier que l’île d’Anticosti recèle davantage de gaz que de pétrole. Or, un rapport fédéral vient d’arriver à un résultat « diamétralement opposé » : le pétrole constituerait en fait 80 % des hydrocarbures présents dans le sous-sol.

« DIAMÉTRALEMENT OPPOSÉ »

En octobre, les projections rendues publiques par Québec dans le cadre de l’évaluation environnementale stratégique (EES) à Anticosti ont avancé que 78 % des hydrocarbures de l’île seraient du gaz naturel. On prévoyait alors que le développement de la filière serait « principalement un projet de gaz naturel ». Or, la Commission géologique du Canada arrive à un résultat qu’elle qualifie elle-même de « diamétralement opposé ». L’organisme fédéral évalue que c’est plutôt le pétrole qui constitue 78 % du potentiel en hydrocarbures d’Anticosti.

MAJEUR, SELON JUNEX

Le rapport de la Commission géologique du Canada change la donne dans le débat sur l’île d’Anticosti, juge le président de Junex, Peter Dorrins. Selon lui, la présence importante de pétrole améliore la rentabilité du projet. « C’est très important parce qu’en général, le prix du pétrole est plus élevé que celui du gaz et vous avez besoin de moins d’infrastructures [pour le transporter], a résumé M. Dorrins. S’il y a moins de gaz, vous avez besoin de moins d’infrastructures. » Les conclusions de la Commission militent pour que Québec autorise la tenue de forages exploratoires dans l’île cet été, estime-t-il.

MÉTHODES DIFFÉRENTES

Pourquoi la Commission est-elle arrivée à des conclusions aussi différentes de celles de Québec ? Parce qu’elle a compilé des données géologiques déjà publiées et des données confidentielles fournies par les opérateurs présents dans l’île. L’étude de Québec visait à déterminer la rentabilité d’un développement des hydrocarbures à Anticosti. Elle avait basé ses scénarios sur des données de production du shale d’Utica, situé dans l’État américain de l’Ohio. L’utilisation de ce gisement dit « analogue » est une méthode courante.

INCERTITUDE

Le rapport de la Commission géologique du Canada est la première évaluation indépendante du potentiel en hydrocarbures de l’île d’Anticosti. Le chercheur Mathieu Duchesne, l’un de ses auteurs, prévient qu’il subsiste une grande part d’incertitude dans les résultats, car très peu de puits ont été forés dans l’île. « C’est une étude de potentiel, a-t-il dit. Pour passer au stade de réserve et commencer à parler de rentabilité, il faut avoir plus de données, des données de production. »

PAS DE NOUVELLE ÉTUDE, DIT QUÉBEC

Québec n’entend pas refaire son étude de rentabilité du projet Anticosti, malgré les conclusions de la Commission. Au bureau du ministre des Ressources naturelles, Pierre Arcand, on fait valoir que la méthodologie utilisée par Québec n’est pas remise en cause. « Le ratio de 78 % pétrole et 22 % gaz dans l’étude de la Commission représente les ressources en place sur l’ensemble de l’île d’Anticosti, souligne la porte-parole du ministre, Véronique Normandin. Le ratio de 77,5 % gaz et 22,5 % pétrole de l’étude québécoise représente un scénario plausible de production associé à une zone représentant 21 % de la superficie de l’île, soit la zone dans laquelle la ressource exploitable pourrait se situer. »

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