CHU de Québec

Une membre du C.A. démissionne, « déçue » du peu d’intérêt accordé aux usagers

Se disant « déçue » du peu d’intérêt accordé aux usagers et aux citoyens dans le système de santé québécois, Élaine Hémond a démissionné du conseil d’administration du CHU de Québec en mars dernier, a appris La Presse.

La situation était passée sous silence. Mais une remplaçante a été nommée pour succéder à Mme Hémond au début du mois d’août. La porte-parole du CHU de Québec, Pascale St-Pierre, confirme que Mme Hémond a démissionné en mars pour des « raisons personnelles ».

En entrevue à La Presse, Mme Hémond précise qu’elle n’était pas à l’aise avec la place accordée aux usagers. Sans vouloir trop commenter par respect pour la direction en place, Mme Hémond a dirigé La Presse vers une lettre envoyée en avril au sous-ministre adjoint à la santé, Pierre Lafleur, pour justifier sa démission.

Dans la missive, Mme Hémond indique qu’en s’impliquant au conseil d’administration du CHU de Québec, elle voulait « donner suite » à sa préoccupation pour la « prise en compte des valeurs et besoins des usagers/citoyens ».

« Comme je l’ai exprimé dès mon accueil au C.A., en septembre, mon intention était de me rendre utile à cet égard. Ce n’est malheureusement pas ce que j’ai vu et vécu. »

— Élaine Hémond

Mme Hémond raconte par exemple avoir voulu assister comme observatrice à une rencontre du comité des usagers. Demande qui lui a été refusée. « Ce refus, ajouté à ma perception du rôle de figurante que je jouais au sein de cette instance, n’est pas sans susciter mon scepticisme face à la véritable considération des intérêts des usagers et des citoyens dans notre système de santé. »

INQUIÉTUDE PARTAGÉE

Mme Hémond n’est pas la seule à dénoncer le rôle amoindri joué par les usagers dans le réseau de la santé depuis le projet de loi 10 du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, qui a réformé le réseau.

Dans une lettre ouverte publiée la semaine dernière, le Mouvement des personnes handicapées pour l’accès aux services (PHAS) indique que les nouveaux conseils d’administration des établissements de santé sont « composés d’experts nommés par le ministre, où les préoccupations principales tournent autour du médical […] au détriment des services sociaux ».

Le Mouvement PHAS déplore la disparition prochaine du Commissaire à la santé et au bien-être et affirme que les citoyens « n’ont plus accès à des recours pour contester l’inacceptable » et ne peuvent plus participer à la « démocratie du réseau et prendre part aux décisions ».

Claude Brunet, président du Conseil pour la protection des malades, souligne que cette perte de pouvoir des usagers est manifeste. « Auparavant, il y avait deux postes réservés aux usagers sur les conseils d’administration des établissements de santé. Maintenant, il n’y a plus qu’un seul poste. Les usagers ne sont plus au cœur des préoccupations alors que ça le devrait », dit-il.

POSITION NUANCÉE

Pierre Blain, directeur général du Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU), croit quant à lui que les intérêts des usagers sont toujours bien représentés dans le réseau de la santé. Notamment, « les représentants des usagers peuvent maintenant présenter des enjeux stratégiques et prioritaires aux conseils d’administration, qui ont l’obligation d’y répondre, explique M. Blain. Pour moi, c’est une avancée. »

Le RPCU déplore toutefois la disparition du poste de Commissaire à la santé et au bien-être, mais surtout, de son Forum de consultation des citoyens. « Si ce forum disparaît, ce sera vraiment une perte pour les usagers. C’est la voix citoyenne par excellence », précise M. Blain. Cette semaine, le RPCU a demandé au gouvernement de lui confier la responsabilité et le budget de ce forum, qui est de 350 000 $ par an.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), on mentionne que chaque établissement de santé possède son comité des usagers et que ceux-ci « jouent un rôle important dans notre système de santé et de services sociaux à titre de gardiens des droits des usagers et veillent à ce que les usagers soient traités dans le respect de leur dignité et en reconnaissance de leurs droits et libertés ». 

En ce qui concerne la participation d’usagers aux activités du conseil d’administration, le MSSS rappelle qu’en plus d’un représentant des comités d’usagers, le ministre doit nommer à chaque C.A. une « personne indépendante ayant une expérience vécue à titre d’usager des services sociaux ». C’est d’ailleurs à ce titre que siégeait Mme Hémond.

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